Avis du CESE « Des transitions énergétiques adaptées aux territoires des Outre-mer »

Autonomie énergétique : La Réunion part de très loin

15 mars, par Manuel Marchal

Le Conseil économique social et environnemental a adopté le 12 mars un avis insistant sur la mobilisation des énergies renouvelables locales pour atteindre l’autonomie énergétique dans des pays comme La Réunion. Notre île part de très loin. La Réunion importe plus de 80 % de l’énergie qu’elle consomme alors que l’autonomie énergétique pour 2050 est l’objectif de l’État.
Actuellement, deux sociétés extérieures à La Réunion — EDF et Albioma — dominent la production et la distribution. Elles maintiennent les Réunionnais sous la dépendance des importations.
Au niveau du Parti communiste réunionnais, une initiative est proposée par la Section de Saint-Denis : la création de 40 000 centrales solaires pour l’autoconsommation individuelle ou gérées par des coopératives d’habitants au niveau d’un immeuble ou d’un lotissement. Ceci contribuera à accélérer la marche vers l’autonomie énergétique. L’évolution technologique pousse le modèle dominant de production d’électricité à La Réunion vers l’obsolescence grâce à la décentralisation de la production.

« Les territoires ultramarins importent largement une énergie encore très carbonée (charbon, fuel). Particulièrement impactés par le dérèglement climatique, les Outre-mer doivent concilier des objectifs — indissociables et complémentaires — de « transition » et d’« autonomie » énergétique.
Lors de la consultation sur le projet de loi relatif à la souveraineté énergétique, le gouvernement a affiché l’ambition de parvenir à un mix de production d’électricité composé à 100 % d’énergies renouvelables dans les DROM à l’horizon 2030, et à l’autonomie énergétique en 2050. Ces objectifs sont atteignables à condition d’une forte mobilisation de l’ensemble des acteurs tant publics que privés.
Pour réaliser cette autonomie, les Outre-mer détiennent des atouts considérables en matière d’énergies renouvelables : solaire photovoltaïque et thermique, biomasse, géothermie, énergies marines renouvelables… ».
C’est ce qu’indique un extrait de la synthèse de l’avis du Conseil économique social et environnemental adopté le 12 mars au Palais d’Iena à Paris, et ayant pour thème la transition énergétique dans des pays comme La Réunion.

Forte dépendance aux importations

A 6 ans de l’échéance 2030 pour un mix électrique 100 % renouvelables, les majors extérieures qui dominent la production à La Réunion, EDF et Albioma, s’inscrivent dans une réglementation européenne contestée. Car selon l’UE, des arbres coupés ou des résidus de scierie collectés sur un continent lointain et transportés sur des milliers de kilomètres pour être importés à La Réunion sont des énergies renouvelables. L’agrocarburant du groupe Avril importé à La Réunion est aussi considéré par l’UE comme une énergie renouvelable. La structure de production basé sur de grosses centrales thermiques appartenant à EDF et Albioma a été préservé en changeant simplement de combustible importé. Une orientation peu compatible avec la préservation de l’environnement et à l’encontre de l’autonomie énergétique.

Lorsqu’il était ministre de l’Écologie, Nicolas Hulot avait bien cerné le problème en répondant à une question d’une députée : « La conversion totale des centrales à charbon par ce que vous appelez l’utilisation de la biomasse — pour faire simple du bois — pour l’électricité pose des difficultés environnementales (…) tout cela donne un rendement énergétique faible pour produire de l’électricité et souvent un problème d’utilisation massive de bois qui peut contribuer à la déforestation. L’avenir de la biomasse, ce sont des installations de plus petite taille qui produisent de l’électricité et de la chaleur à partir de la biomasse et des déchets. »

La réalité de notre île, c’est un tiers de la production électrique assurée par des énergies renouvelables réunionnaises, c’est bien loin de 100 %.
Quant à l’autonomie énergétique pour 2050, La Réunion part de très loin : moins de 20 % de la consommation totale est actuellement couverte par les énergies renouvelables réunionnaises. Plus de 80 % sont des énergies importées.

25 ans de retard suite à la démolition des projets

Rappelons qu’à partir de 1998 et jusqu’en 2010, la Région Réunion menait une politique visant à atteindre l’autonomie énergétique en 2025 pour La Réunion. Des outils tels que l’ARER ou le PRERURE furent créés. L’utilisation du solaire, de l’énergie de la mer, de la géothermie et la valorisation de la biomasse locale était les piliers de l’autonomie de La Réunion en termes de production d’électricité. La diffusion massive du photovoltaïque devait permettre la décentralisation de la production au profit des particuliers et des entreprises, via l’autoconsommation.
La conversion des transports à l’électricité s’organisait autour de la création d’un réseau ferré reliant toutes les villes du littoral de Saint-Joseph à Saint-Benoît en passant par Saint-Denis. Ce train devait fonctionner à l’électricité.
Pour régler le problème de l’impact de la consommation des voitures électriques sur le réseau, Paul Vergès avait proposé la couverture de la route des Tamarins et de sa future prolongation sous forme de route de moyenne altitude par des panneaux solaires. Ces centrales solaires devaient alimenter les charges rapides des voitures électriques.
Tous ces projets furent démolis par l’arrivée au pouvoir d’une nouvelle présidence de Région à l’écoute des intérêts des importateurs d’énergies, de véhicules et d’un groupe de transporteurs.
Sur la base de l’ambition de l’Etat, notre île aura donc pris 25 ans de retard sur l’objectif initial : autonomie énergétique en 2050 au lieu de 2025.

L’évolution technologique pousse le modèle dominant de production vers l’obsolescence

Mais le maintien de la structure de production à base de grosses centrales appartenant à des sociétés extérieures et fonctionnant avec des énergies importées rend incertain le respect de l’échéance 2050.
Au niveau du Parti communiste réunionnais, une initiative est proposée par la Section de Saint-Denis : la création de 40 000 centrales solaires pour l’autoconsommation individuelle ou gérées par des coopératives d’habitants au niveau d’un immeuble ou d’un lotissement. Ainsi, la population concernée sera à l’abri de la flambée du prix de l’électricité et la domination des entreprises extérieures sera entamée.
Cette évolution est rendue possible par la révolution technologique qui annonce pour le secteur de l’énergie, des bouleversements aussi considérables que ceux qui concernèrent les télécommunications au début du siècle. La base est la décentralisation de la production. Les prix des panneaux solaires ne cessent de diminuer, en faisant l’électricité la moins chère. L’initiative de la Section PCR de Saint-Denis vise à démocratiser l’accès des Réunionnais à l’électricité pas chère tout en contribuant à accélérer l’autonomie énergétique de La Réunion. Nos voisins, et notamment Madagascar, ne s’y trompent pas. L’autoconsommation de l’électricité solaire y est le pilier de l’électrification rurale. L’évolution technologique pousse le modèle dominant de production vers l’obsolescence.

M.M.

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  • Nous avons à la Réunion la possibilité de produire proprement toute l’énergie électrique dont nous avons besoin sans utiliser des produits pétroliers , du charbon, ou des matériaux radioactifs si nous exploitons toutes les ressources naturelles dont nous disposons .

    Nous pouvons augmenter notre production d’énergie hydraulique en construisant des centrales hydroélectrique sur nos rivières et cours d’eau partout où l’on peut avoir un débit et une hauteur de chute suffisants ; ou encore en construisant des barrages pour stocker les eaux de pluie là ou c’est possible . Je rappelle en passant la proposition que j’ai faite dans les journaux de la Réunion au début des années 1980, de construire un grand barrage sur le site du grand étang de saint benoit qui serait rempli par le captage des eaux des crues des ravines situées à proximité notamment de la ravine sèche et du bras cabot .

    Nous pouvons aussi augmenter la production d’énergie éolienne partout où c’est possible.

    Nous pouvons bien entendu augmenter notre production d’énergie solaire en accordant des subventions suffisamment motivante pour l’installation de chauffe eau solaires et de panneaux photo voltaïques, que ce soit pour les résidences individuelles et collectives mais également sur tous les bâtiments publics (établissements scolaires et universitaires , hôpitaux , stades , centre commerciaux aéroport etcet...

    Nous pouvons également donner aux agriculteurs la possibilité d’utiliser leurs terrains agricoles situés dans des secteurs bien ensoleillés pour produire de l’électricité à l’aide de panneaux photovoltaïques . les centres commerciaux utilisent leurs places de parking pour produire de l’électricité , pourquoi les agriculteurs ne pourraient pas le faire également sur leurs terrains ? car l’installation de panneaux photo voltaïques ne les empêcheraient pas forcément de continuer de cultiver leurs terrains . Mais pour cela il faudrait que la réglementation concernant les terres agricoles soient modifiées et que les projets viables soient subventionnés.

    Enfin l’idée de Paul Vergés de recouvrir nos routes à quatre voies de panneaux photovoltaïques est une excellente idée . Il n’est pas trop tard pour la concrétiser . Pourquoi ne pas programmer les travaux correspondant en commençant sur la partie la plus ensoleillée de la route des tamarins .

    Si on ajoute à tout cela la possibilité de produire de l’énergie électrique par la biomasse , par la géothermie , par le mouvement des vagues ou par d’autres moyens efficaces appliquant les lois de la gravité universelle pour produire de l’énergie cinétique , c’est certain que nous pourrons produire toute l’électricité dont nous aurons besoin sans consommer des produits polluants notre atmosphère tels que les gaz et produits pétroliers , ou nous exposant à un risque mortel tel que l’énergie nucléaire .

  • Cela donne de l’espoir pour l’avenir après ces années perdues hélas. Pour le profit immédiat des nantis, on a sacrifié pour longtemps de bonnes initiatives, c’est révélateur du pouvoir des lobbies et du manque de volonté de changer. Le nombre de voitures importées avoisine les 30 000 ! Jamais autant et cela continue. Les clients ne voient pas le long terme mais leur confort, la frime encouragée par les distributeurs, il n’y a qu’à voir le succès des SUV, ce que je remarque, c’est que la couleur noire est appréciée, ce qui entraîne, rien qu’à cause de cela, une plus grand consommation, car l’intérieur est plus chaud, un four. Et que la climatisation est davantage énergivore encore, vérifier que peu d’entre eux sont remplis de passagers. Un très mauvais exemple à transmettre aux enfants, citoyens de demain.
    Recouvrir la Route des Tamarins, pour commencer, puis d’autres ensuite, de panneaux photovoltaiques apporterait plus d’ombre et de l’énergie électrique bien utile, notamment pour le future TER péi, qui va relier j’espère, les communes de Ste Rose à St Joseph, pour les marchandises comme les passagers, les animaux, tous à 160 Km/h, en silence et propre. Les jeunes seront très heureux de trouver du travail pour tracer le futur réseau, conduire, entretenir le matériel, des emplois dignes et durables. Bon We zot tout, et vive le train, électrique cette fois, Arthur.