« L’arbre qui cache la forêt » : la biomasse massivement importée retarde la marche vers l’autonomie énergétique

Biomasse : « le Quotidien » confirme le renforcement de la dépendance énergétique soulignée par « Témoignages »

3 septembre 2024, par Manuel Marchal

La « Une » de ce numéro du « Quotidien » parue la semaine dernière est sans équivoque. Elle souligne qu’avec l’importation de biomasse pour remplacer le charbon des centrales d’Albioma et le fioul de celles d’EDF, rien ne change rien pour La Réunion. Ces énergies soi-disant renouvelables ne le sont pas vraiment, et elles contribuent à maintenir notre pays sous la dépendance des importations pour l’énergie. La Réunion a les moyens de produire toute l’énergie qu’elle consomme, mais cela remet en cause des intérêts qui ne sont pas ceux des Réunionnais.

Depuis cette année, les entreprises extérieures qui contrôlent la production et la vente de l’électricité à La Réunion communiquent sur le « verdissement » de leur production. En raison des engagements pris par l’Union européenne en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, les centrales thermiques fonctionnant aux énergies fossiles sont maintenant interdites. A La Réunion, le charbon et le fioul était la principale source d’énergie primaire des centrales EDF et Albioma.
Cette échéance avait été largement anticipée par la Région Réunion dirigée par Paul Vergès. En 1998, le président de Région de l’époque avait lancé le mot d’ordre d’autonomie énergétique pour 2025 puis les outils pour le mettre en œuvre.

Le sabotage de l’autonomie énergétique prévue pour 2025

Le PRERURE fixait la programmation énergétique pour que les 80 % d’importation du mix énergétique soient remplacés par des énergies renouvelables réunionnaises. L’ARER (Agence régionale de l’énergie Réunion) était chargée de fédérer les acteurs et de l’expérimentation.
A La Réunion, le soleil, le vent et l’énergie de la mer sont présentes en abondance. Cela signifiait qu’à condition d’y mettre les moyens, notre île aurait été libérée des importations d’énergie l’année prochaine. Cette stratégie s’appuyait également sur l’électrification des modes de transport autour d’un tram-train électrique reliant les zones les plus peuplées. La construction de centrales solaires le long de la route des Tamarins visait à fournir le carburant nécessaire à la transition du parc automobile du thermique vers l’électrique. En 25 ans, la réalisation d’un tel projet était réaliste.
L’arrivée de Didier Robert à la présidence de Région en 2010 a remis en cause plus de 10 ans de progrès. L’immobilisme a régné, le lobby des énergies fossiles pouvait dormir tranquille. De leader, La Réunion est maintenant dans l’arrière-garde.
Mais quand l’obligation de mettre fin à l’utilisation du charbon et du fioul arriva, la solution choisie fut de maintenir la structure existante : de grosses centrales alimentées par une énergie primaire importée dont les Réunionnais ne fixent pas le prix.

La vieille structure de production protégée

Ceci permettait de ne pas remettre en cause une structure de production conçue au siècle dernier. Des énergies importées ont remplacé d’autres énergies importées. En conséquence, la biomasse importée maintient La Réunion sous dépendance énergétique.
Les énergies renouvelables présentes en abondance à La Réunion permettent au contraire la décentralisation de la production. Le solaire permet la création de petites coopératives de production à l’échelle d’un immeuble, voire d’un quartier. Dans les Hauts, la biomasse apportée par la canne peut être utilisée pour le chauffage ou la production d’électricité dans des micro-centrales.
Mais ces initiatives d’avenir ne peuvent se développer à grande échelle en raison de la domination de l’importation de la biomasse.
Avec sa « une » évocatrice de la semaine dernière, « le Quotidien » rappelle ce qu’écrit « Témoignages » depuis que le « verdissement » des centrales d’EDF et d’Albioma a été annoncé : c’est l’arbre qui cache la forêt. Ces énergies soi-disant renouvelables ne le sont pas vraiment, et elles contribuent à maintenir notre pays sous la dépendance des importations pour l’énergie. La Réunion a les moyens de produire toute l’énergie qu’elle consomme, mais cela remet en cause des intérêts qui ne sont pas ceux des Réunionnais.

M.M.

A la Une de l’actuImpasse du modèleEnergies renouvelables

Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus