Maîtriser l’énergie : une condition du développement

L’autonomie énergétique : un levier du co-développement

3 juin 2008, par Manuel Marchal

Pour les pays insulaires, les conséquences de l’augmentation des prix des matières premières s’amplifient. C’est notamment le cas pour le pétrole. Il est donc essentiel de trouver des solutions permettant de tourner le dos à un modèle de développement défini dans un contexte radicalement différent. Les travaux menés à La Réunion pour l’autonomie énergétique sont donc suivis de près dans le monde. C’est ce qu’a rappelé la récente visite du ministre mauricien des Finances.

A La Réunion, la hausse du prix du pétrole a des conséquences dans de nombreux domaines. Parce qu’il a été décidé de supprimer le chemin de fer, la totalité des transports intérieurs s’effectue par automobile. Par ailleurs, les moyens de désenclavement maritime et aérien sont également consommateurs d’hydrocarbures. La crise pétrolière ne peut donc qu’être amplifiée dans notre environnement insulaire, car elle concourt directement à la hausse des prix.
Résoudre la question de l’énergie est un préalable à tout développement. Une des raisons du progrès des pays industrialisés est le fait qu’ils aient pu compter sur une énergie bon marché et abondante. Cette époque arrive à sa fin.
Pour sa part, La Réunion dispose en abondance d’énergies qu’elle n’a pas besoin d’acheter. C’est par exemple le soleil, les vagues, la chaleur du volcan, le souffle des alizés, les courants marins, l’eau froide des profondeurs. Ces richesses ne sont pas spécifiques à La Réunion, elles existent dans d’autres pays du monde.
Pour réaliser l’autonomie énergétique en matière de production d’électricité d’ici 17 ans, la Région a mis en place plusieurs outils : l’Agence régionale de l’énergie et le PRERURE. Le PRERURE se fixe notamment une feuille de route fixant l’objectif d’expérimenter à La Réunion des technologies qui seront capables de produire de l’électricité à partir de ces énergies renouvelables, ainsi que des procédés de stockage-destockage afin de permettre à une production massive d’électricité éolienne ou photovoltaïque d’être injectée dans le réseau de distribution.

Une nouvelle ère

Tous ces travaux sont suivis avec attention par d’autres pays confrontés au même défi que La Réunion : maîtriser leur production d’énergie afin de se développer. Car comme notre île, ces pays ne peuvent pas décider du prix du pétrole ou du charbon.
Source d’un gisement d’emplois estimé pour notre île à 15.000, le secteur des énergies renouvelables montre aussi qu’il peut être un des piliers du co-développement de la région. Comme La Réunion, tous les pays de la région doivent relever le défi de l’énergie, tout en préservant leur environnement.
C’est la possibilité de construire de nouveaux partenariats, sous le signe du co-développement, rompant avec la logique héritée de l’époque coloniale. Si on prend un exemple, on peut constater que pendant des décennies, Maurice et La Réunion ont été présentés comme des concurrents, car ces deux pays exportent à destination des anciennes puissances coloniales les mêmes marchandises. Allons-nous être concurrents dans le domaine de l’énergie en recherchant chacun de son côté des solutions à un problème commun ?

Le sillon est tracé

Les faits montrent que c’est la voie du co-développement qui est en train de triompher. La récente visite du ministre mauricien des Finances a montré en effet tout l’intérêt que nos voisins portent à ce que La Réunion est en train d’expérimenter. Souvenons-nous que lors de sa dernière visite à Maurice, Paul Vergès avait été le conférencier d’honneur lors de la cérémonie organisée par la Chambre de commerce de Maurice à l’occasion des 40 ans de l’indépendance de l’île sœur. Soulignons également le partenariat entre l’ARER et l’Assemblée régionale de Rodrigues pour l’élaboration d’une stratégie d’autosuffisance énergétique. Rappelons enfin la signature l’an dernier d’une convention entre l’ONERC (1), la Région et Island News en vue d’appuyer dans l’océan Indien le développement de stratégie d’autosuffisance énergétique avec les îles de la région.
Gageons que cette dynamique va aller en s’amplifiant, car la maîtrise de l’énergie est une condition essentielle au développement des pays de la région.

Manuel Marchal

(1) Observatoire national d’étude sur le réchauffement climatique, il est présidé par Paul Vergès.


Centrales au fuel et au charbon

Une seule certitude : les prix des énergies fossiles augmenteront

Concernant l’électricité, la solution préconisée par le Plan pluriannuel d’investissement de l’Etat prévoit en effet la construction d’une centrale thermique au fuel pour faire face à la hausse de la demande. Or, à la différence du soleil, du vent ou des vagues, la matière première d’une centrale thermique est un produit qui s’achète. De plus, le prix de cette matière varie en fonction de facteurs qui échappent à La Réunion. Depuis la fin du siècle dernier, le prix du baril de pétrole a été multiplié par 6, et la tendance est structurellement à l’augmentation de ce prix.
Dans ces conditions, il est impossible de prévoir le prix de la matière première permettant à ce type de centrale de fonctionner.
C’est la même chose pour le charbon. Energie fossile, ce minerai est disponible en quantité limitée. Il arrivera donc forcément un jour où le prix du charbon flambera. Qui peut prévoir quels seront dans 10 ans les frais d’achat de matière première d’une centrale thermique au charbon construite aujourd’hui ? D’autant plus que ce charbon est une énergie importée par un bateau fonctionnant au fuel, et transporté du quai vers la centrale par des camions mus par un moteur à essence. Or, le prix des hydrocarbures ne cesse de battre des records historiques.

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