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par le Dr Raymond Vergès

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Le gaz va se raréfier

La reconstitution des stocks de gaz pour 2023-2024 est déjà désespérée

vendredi 18 novembre 2022


La Commission de régulation de l’énergie a annoncé le 5 octobre que les réserves françaises de gaz étaient pleines "à plus de 99%". En dépit de ce chiffre positif, les tensions en Europe pour cet hiver restent dans les esprits. D’autant que l’Agence internationale de l’énergie a annoncé que des mesures d’économie de gaz seront "cruciales" cet hiver, afin de maintenir les stocks à des niveaux suffisants en cas de coupure totale du gaz russe et de "vague de froid tardive".


L’AIE a indiqué que la reconstitution des stocks s’est faite grâce à la réduction de notre consommation, de l’ordre de 40 bcm (billion cubic meter = milliards de mètres cubes).

"Au 5 octobre, les fournisseurs ont déjà constitué près de 130 TWh (térawattheures-NDLR) de réserves de gaz, un niveau supérieur à la moyenne des dernières années" qui représente environ les deux tiers de la consommation hivernale des PME et des particuliers, a précisé la CRE dans un communiqué. 

Le gaz russe - sanctionné par l’Union européenne - est parvenu en grandes quantités au cours de l’année 2022. A cela s’ajoute la Chine qui, de confinement en confinement, a permit à la France de se procurer du gaz LNG (+23 bcm) en plus grande quantité. Enfin, l’augmentation des livraisons par gazoducs d’autres pays tels que l’Azerbaïdjan (+50 %, 3 bcm), la Norvège (+5 % ou 5 bcm), l’Algérie (+10 % ou 3 bcm). Ce ne sont d’ailleurs pas ces capacités qui ont compensé la réduction de 60 bcm de gaz russe qui ne nous est pas parvenue sur tout 2022.

L’AIE atteste que la France est en bonne voie, mais reste en alerte, car la reconstitution des réserves a été possible, malgré l’état de la production électrique issu du nucléaire en France et l’usage très important de hydraulique au cours de l’été.

L’injection de gaz dans les stocks a ainsi augmenté de +22% par rapport à la moyenne des 5 années précédentes. Dans son rapport, l’AIE a établi des projections hivernales pour ces stocks "dans l’hypothèse d’un arrêt complet de l’approvisionnement russe à partir du 1er novembre" et en fonction des apports en GNL, une ressource faisant l’objet d’une "compétition mondiale". 

"Sans réduction de la demande de gaz et si l’approvisionnement russe est complètement coupé, les stockages seraient remplis à moins de 20% en février, en supposant un niveau élevé d’approvisionnement en GNL" et "à près de 5% en cas de faible approvisionnement en GNL", a prévenu l’AIE.

En 2023-2024, le gaz russe n’atteindra plus l’Europe. De son côté, la Chine a demandé à son secteur gazier de ne plus revendre du gaz en Europe et au reste de l’Asie en prévision de sa reprise économique qui devrait reprendre à la fin des confinements sanitaires.

Or la Chine a importé, en 2021, 108 bcm de gaz LNG. "Si on veut jouer l’optimisme, on pourrait encore recevoir 25 bcm de gaz russe si Poutine garde au niveau actuel ses livraisons en 2023 mais quelqu’un y croit-il  ?", ont indiqué Charles Cuvelliez et Patrick Claessens, de l’Ecole Polytechnique de Bruxelles, Université de Bruxelles.

Ces derniers ont expliqué dans une chronique sur Lalibre.be que les champs gaziers de Groningue sont limités à une production de 2.8 bcm pour 2023. La production du Danemark ne commencera qu’en 2023-2024, tard selon eux. DE son côté, le Royaume-Uni a déjà relancé tout ce qu’il pouvait en production.

Si La Chine redémarre son économique, elle va capter 85% de l’augmentation de LNG 2023, grâce notamment à ses trois terminaux qui auront soit augmenté leur capacité, soit redémarré.

De plus, l’encombrement des chantiers navals de méthaniers jusque 2027 freinent la production de gaz, car les constructeurs coréens sont saturés. La Chine devraient prendre le relais ont assuré les universitaires. Les Japonais, autrefois leaders du marché, ont un retard technologique les mettant hors-jeu.

Sur le premier semestre 2022, 94 méthaniers ont été commandés pour un montant de 20 milliards de dollars américains (USD), contre 86 sur l’ensemble de 2021. Le prix d’un méthanier a monté de 25 % (à 250 millions d’USD par unité). Même la location des méthaniers a doublé (350 000 USD par jour).

L’Europe manquera pour l’hiver 2023-2024 de 30 bcm de gaz. Même en cas de reconstitution des capacités de production d’énergie par les barrages et le nucléaire, le déficit sera de 22 bcm. "Les perspectives des marchés du gaz restent sombres, notamment en raison de l’attitude imprudente et imprévisible de la Russie, qui a ébranlé sa réputation de fournisseur fiable", a souligné Keisuke Sadamori, directeur de l’AIE pour les marchés de l’énergie et la sécurité. "Tous les signes indiquent que les marchés resteront très tendus en 2023", estime-t-il.

De fait, "il ne faut plus compter sur le gaz", attestent Charles Cuvelliez et Patrick Claessens. Les énergies renouvelables seront la seules alternatives en production et autoproduction pour assurer en énergie les pays européens et du monde.

Le déploiement accéléré des énergies renouvelables est plus que nécessaire, tout comme la migration vers d’autres types de combustibles dans l’industrie et un changement profond des comportements humains.

"Tous les gouvernements doivent désormais tendre, s’entendre et se renforcer pour aider la population à s’équiper, sinon, encore une fois, seuls ceux qui en les moyens pourront se le permettre et ce ne sera pas suffisant en plus ! Et tout cela en 12 mois", ont assuré Charles Cuvelliez et Patrick Claessens.


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