Le baril de pétrole approche les 60 dollars

Menaces sur le budget de l’État et les transports aériens

6 avril 2005

Une nouvelle fois, la hausse du pétrole fait les gros titres des journaux. Du fait de la dépendance de notre mode de développement à cette source d’énergie, le maintien de cette tendance à un pétrole cher aura des conséquences dans de nombreux domaines, amplifiées du fait de notre insularité.

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Avant-hier soir, le prix du baril de pétrole a encore dépassé un nouveau plafond : 57 dollars à Londres, plus de 58 dollars à New York. Depuis janvier, c’est une hausse de 40%. Un phénomène qui est loin d’être conjoncturel, étant donné la nature des causes de ce prix comme par exemple la guerre en Irak, la hausse constante de la demande, l’incertitude qui pèse sur la quantité des réserves ou la persistance de l’Occident dans un mode de vie peu économe en énergie fossile.
Sur ce dernier point, l’attitude du gouvernement américain, taxé avec juste raison de premier pollueur de la planète, est très édifiante. En effet, plutôt que vouloir maîtriser la demande en incitant par exemple leurs citoyens à remettre en cause un mode de vie à l’origine d’un gaspillage considérable d’énergie, les dirigeants de Washington annoncent leur volonté d’exploiter un gisement pétrolier situé dans un des sanctuaires de la biodiversité du continent nord-américain.

Des réserves limitées

C’est une course pourtant perdue d’avance qui s’amplifie car une certitude existe : les réserves de pétrole ont une fin. Selon BP Statistical review, cité hier par “Le Figaro”, "il resterait, au rythme de consommation actuel, entre quarante et cinquante ans de réserves".
Toujours dans son édition d’hier, notre confrère fait état de prévisions des économistes de Goldman Sachs. Selon ces spécialistes, on se dirige vers un pétrole à 105 dollars le baril. “Le Figaro” affirme également "que personne n’entrevoit la fin des tensions actuelles".
Voilà en tout cas qui remet complètement en cause le budget voté en octobre dernier. Le projet présenté par l’actuel président de l’UMP et voté par sa majorité était calculé sur la base d’un pétrole à 36,5 dollars le baril. On est aujourd’hui 50% au-dessus de cette valeur. Se pose alors la question de savoir qui va payer le résultat de cette imprévision. Allons-nous vers de nouvelles coupes dans les budgets des services publics ou de la lutte contre le chômage ?

L’enjeu de notre ouverture au monde

Quant au coût de la vie dans notre île, ne risque-t-il pas d’augmenter quand on voit que tout ce qui est importé par des moyens de transport qui fonctionnent avec des hydrocarbures. Quant à la mobilité des Réunionnais, ne va-t-elle pas se réduire quand on considère que le prix des carburants constituait déjà en octobre dernier environ 30% du prix du billet (1) ?
Quels seront alors les Réunionnais qui pourront voyager en dehors de leur île ? Et quels seront les touristes qui pourront venir chez nous si le prix du baril atteignait effectivement 105 dollars ?
On ne peut faire l’économie de se préparer à cette éventualité, et cela rend d’autant plus urgent la nécessité de faire aboutir la revendication d’une véritable continuité territoriale, assumée par l’État au moins de la même manière que pour la Corse. Des milliers d’emplois sont en jeu, et il y va de l’ouverture de La Réunion sur le monde.

Manuel Marchal

voir l’interview de Gérard Éthève, directeur d’Air Austral, dans “Témoignages” du 22 octobre 2004, p.4.


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