Aménagement du territoire

Construire la nouvelle ville réunionnaise de demain

23 septembre 2006

Qui dit développement durable dit élaboration d’un aménagement cohérent de notre territoire, en équilibre avec le développement économique et l’épanouissement humain. Tracer les contours de La Réunion du million d’habitants sur une terre restreinte est une tâche complexe et décisive pour les aménageurs qui appellent au consensus, à la défense de l’intérêt commun et du bien vivre ensemble. Philippe Berne, Vice-président du Conseil régional délégué à l’Aménagement du territoire, contribue à enrichir le débat et répond à nos questions.

Le SAR a pour objet d’optimiser l’espace, mais aussi de dégager les spécificités des micro-régions de l’île. Quel est l’intérêt de définir des pôles de centralité dans chaque zone ?

- Le SAR qui a été mis en révision par le Conseil régional en 2005 a pour objet de définir les vocations des divers espaces de l’île, de concilier la protection des zones agricoles et l’urbanisation nécessaire liée aux retards structurels de l’île et à sa poussée démographique, de protéger les zones naturelles, de localiser les zones d’activités d’intérêt régional ainsi que les infrastructures routières et de transports en commun nécessaires au bon fonctionnement de l’île. Le futur SAR doit répondre aux 3 grands principes définis en 95 en les amendant et en les améliorant : protection des zones agricoles et des espaces naturels, densification des villes et structuration des bourgs ruraux - rééquilibrage des 4 micro-régions. En ce qui concerne le rééquilibrage, il faut définir les atouts et les handicaps de ces micro-régions, faire émerger les solutions d’aménagement allant dans le sens d’un renforcement des atouts. Des pôles de centralité doivent contribuer à bien structurer, donc à améliorer le fonctionnement de ces micro-régions, cela ne doit pas se faire au détriment des pôles secondaires et des bourgs ruraux.

Est-ce que cela va impliquer une réorganisation administrative ?

- Le SAR n’ a pas mission de proposer une réorganisation administrative, mais il est évident que celle-ci peut contribuer à renforcer les orientations du SAR dans le domaine du rééquilibrage en rapprochant les citoyens des lieux de décisions. C’est une bataille parallèle qui doit être menée.

L’aménagement du territoire fait apparaître des intérêts divergents. Comment défendre avant tout les intérêts communs ?

- L’aménagement du territoire ne fait pas apparaître des intérêts divergents. Il doit contribuer à les concilier. Un problème fondamental est celui du foncier constructible, de sa rareté et de sa cherté.
On devra donc s’appuyer sur une politique cohérente et volontariste d’acquisition foncière par les collectivités, aussi bien pour l’habitat que pour les zones d’activités. C’est cette mission qui a été confiée à l’Etablissement Public Foncier de La Réunion. Le SAR donnera donc les grandes orientations dans ce domaine, mais c’est à l’échelle des Plans Locaux d’Urbanisme (PLU), donc des communes, que se mettront en place - en compatibilité avec le SAR— les acquisitions foncières (essentiellement dans les zones urbaines existantes) nécessaires au développement de l’île et au logement de ses habitants.

Elles se verront confronter à la spéculation foncière. Comment lutter contre ?

- La taxe sur la plus-value foncière est un outil qui permettrait de lutter efficacement contre la spéculation foncière. Il faudrait la mettre en place dans le cadre de l’adaptation permise par le législateur qu’est l’expérimentation. Les fonds issus de cette taxe pourrait abonder les projets de logements sociaux et de viabilisation des parcelles. Dans certains cas, elle pourrait aider à mettre en place les infrastructures nécessaires aux transports en commun.

Mettre en place de nouveaux modes de construction va entraîner des coûts importants. Comment agir pour que personne n’en soit exclue ?

- Il y a deux problèmes à résoudre. Premièrement, comment financer le logement social pour parvenir à une livraison de 6.000 par an ? Les solutions préconisées par le Contrat social sont très prometteuses à ce sujet. Deuxièmement, comment densifier les villes et les bourgs pour ne pas étaler l’urbanisation sur les terrains agricoles, et comment, dans le cadre de cette densification - qui doit être modulée suivant la typologie des agglomérations -, construire la ville de demain en intégrant la mixité sociale, la mise en place des services publics et privés nécessaires, en améliorant les transports en commun, en intégrant les énergies nouvelles et la maîtrise de l’énergie, en réglant l’adduction d’eau potable, le problème du traitement des eaux usées et des eaux pluviales ? La réalisation de cette nouvelle ville réunionnaise va engendrer des surcoûts, mais elle va économiser la mise en place de réseaux par rapport à une démarche d’extension en dehors de la tâche urbaine existante. Il faudra mettre en place des financements complémentaires pour favoriser cette demande. Une réorientation du Fonds Régional d’Action Foncière Urbaine (qui concerne aujourd’hui principalement l’assainissement des eaux) devrait s’opérer dans ce sens. Il faudra renforcer l’ingénierie des communes et les équipes opérationnelles qui travaillent dans les mairies sur l’urbanisme pour donner des réponses appropriées.

Entretien Stéphanie Longeras


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