Gamède : les Mafatais prisonniers des montagnes

Courage et solidarité familiale

2 mars 2007

Pendant près de 3 jours, l’un des soucis majeurs de la commune de La Possession a été de se mettre en contact avec les habitants des différents îlets de Mafate. Sentiers submergés, liaisons téléphoniques précaires, impossibilité d’utiliser l’hélicoptère : les Mafatais n’ont pu compter que sur eux-mêmes et sur cette formidable solidarité qui soude les habitants du Cirque.

Le Maire de La Possession, Roland Robert, a vécu avec beaucoup d’angoisse l’isolement de ses administrés du cœur de l’île. Angoisse de ne pas savoir, de ne pas pouvoir répondre aux éventuels besoins des habitants.
Il a donc décidé de mettre en place un numéro d’appel réservé aux Mafatais, une ligne directe qui faciliterait la liaison. « L’idée était de recenser la nature des besoins, des difficultés, non pas pour intervenir en alerte rouge, chose déjà difficile pour les pompiers, mais pour, dès que possible, apporter des réponses rapides », explique Isabelle Ganot, Directrice de cabinet du maire.

Un bébé prématuré né à Mafate en plein cyclone

Et parmi ces besoins, plusieurs malades sollicitaient des soins. Dès aujourd’hui, le SAMU a pu les évacuer d’Ilet à Malheur les Bas vers Ilet à Malheur les Hauts.
Plus préoccupant, la naissance en plein cyclone d’un bébé prématuré de 2 mois qui a été évacué ce matin par hélicoptère vers le centre hospitalier le plus proche. On dit que les bébés nés en temps de cyclone seront porteurs de chance, c’est tout ce que l’on peut souhaiter. À Grand Place, un homme seul et alité était en rupture de médicaments. Il pourrait être ravitaillé dès aujourd’hui. « J’ai passé près de 200 coups de fils hier que sur le réseau fixe, car la liaison GSM était impossible, commente Isabelle Ganot. J’ai eu des contacts avec La Nouvelle, Ilet à Malheur les Bas, Ilet à Bourse, hier à 13 heures, Aurère... Les habitants de La Plaque gardaient l’électricité en batterie issue du solaire, uniquement pour la liaison téléphonique. Nous pouvions ainsi les informer de l’évolution du phénomène. J’ai pu avoir le malade de Grand Place cloué au lit. Nous avons gardé un contact régulier avec ceux que nous pouvions joindre pour leur apporter notre soutien, pour avoir un interlocuteur qui puisse rassurer les habitants, leur dire que l’on ne les oubliait pas et que l’on allait intervenir sur les priorités ».

5 heures de marche en plein déluge

Mais ce matin encore, aucune nouvelle des habitants d’Ilet Oranger. Les gendarmes de La Possession, très concernés par la situation des Mafatais, envisageaient hier soir les moyens d’intervenir au plus tôt dans le Cirque. Le peloton de gendarmerie de haute montagne envisageait une ascension ce matin. Plutôt risqué. Car s’il semble, selon les informations, qu’aucun dégât matériel ne soit à déplorer, en revanche, toutes les ravines ont été engorgées, les sentiers submergés impraticables, entravant toute communication d’îlet à îlet. Certains Mafatais courageux ont néanmoins pris ce risque sur le sentier qui relie Ilet à Malheur les Bas d’Ilet à Malheur les Hauts. Un parcours que ces marcheurs avérés ont mis 5 heures à réaliser contre 40 minutes habituellement. « Contrairement aux habitants du littoral, les Mafatais sont habitués à ces situations extrêmes. Il faut saluer leur courage, cette solidarité familiale qui prédomine à Mafate », insistait hier Roland Robert, joint rapidement par téléphone.
A Mafate, le cyclone prend une autre dimension, un autre sens où le spectaculaire du phénomène laisse place à l’unité, à la solidarité qui soudent les familles du Cirque. La radio aura permis aussi, par la voix de la Mairie de La Possession, à des mamans d’Aurère de rassurer leurs enfants restés dans les Bas, à la fille du malade de Grand Place de pouvoir parler directement à son papa. Une épreuve pour tous, mais avant tout pour les Mafatais, prisonniers de leurs montagnes.

Stéphanie Longeras


An plis ke sa

Embolie circulatoire à La Possession

« Ce matin (avant-hier - NDLR), les habitants de La Possession n’étaient pas contents », confiait hier Roland Robert. L’alerte rouge levée, les Réunionnais ont été assurés de pouvoir emprunter la route de La Montagne, et c’est en masse que les automobilistes sont venus engorger le centre-ville de la commune. « C’est l’embolie circulatoire dans la ville. On dit aux citoyens que la situation est rétablie, mais lorsque les automobilistes arrivent à La Possession, la route du Littoral est impraticable dès son entrée, où il y a plusieurs mètres de graviers ». Face à cette situation et considérant que ce sont les habitants de La Possession qui subissent le problème sans concertation préalable auprès du Maire, ce dernier a vivement interpellé la Sous-préfecture pour que des solutions rapides soient trouvées.

Et les habitants de la Grande Chaloupe ?

Les impressionnantes cascades qui déferlent actuellement sur la route du Littoral ne doivent pas laisser oublier que les habitants de la Grande Chaloupe ont vécu eux aussi ce cyclone, prisonniers des montagnes, avec comme seul horizon une mer déchaînée. Prisonniers ou presque. Hier matin, les yeux se sont fermés pour leur permettre d’emprunter le “ti train” et ainsi récupérer quelques moyens matériels et vivres avant de rejoindre leurs habitations. Quel autre moyen pour leur venir en aide ?


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