Semaine du développement durable

Des arboretums pour la survie des espèces endémiques

8 avril 2010, par Edith Poulbassia

L’Office national des forêts (ONF) a créé 5 arboretums d’espèces endémiques et indigènes à La Réunion. Une vraie réserve qui commence à porter ses fruits pour préserver la diversité biologique exceptionnelle, mais fragile de l’île. À condition que chacun prenne conscience de la richesse de notre patrimoine naturel.

Une centaine d’espèces d’arbres ou d’arbustes sont en voie d’extinction à La Réunion. Elles se nomment bois de senteur blanc ou bleu, bois blanc, bois de fer, bois d’arnette, latanier rouge, bois puant, bois de sureau, bois de lait, bois de judas, bois d’olive, bois de gaulette, bois d’éponge, mahot tantan, patte lézard, tanguin pays... Pour chacune de ces espèces, l’Office nationale des forêts a recensé moins d’une cinquantaine d’individus dans les habitats naturels. Parfois encore moins. Le bois de senteur blanc, magnifique plante hétérophylle (deux types différents de feuilles), compte moins de 10 spécimens à l’état naturel. La différence entre ses feuilles jeunes, découpées, vert pâle et ses feuilles adultes argentées lui servait, pense-t-on, à échapper aux tortues autrefois nombreuses sur l’île. Le bois de senteur blanc est devenu « un emblème pour la protection de la nature à La Réunion », indique Julien Triolo, ingénieur écologue, responsable des arboretums à l’ONF. Cette espèce rarissime a été reproduite à Brest pour être réintroduite à La Réunion, si bien qu’on la trouve aujourd’hui dans les jardins à l’initiative de la SREPEN (Société réunionnaise d’étude et de protection de l’environnement).

Des espaces d’intérêt national

Que ces plantes endémiques ou indigènes trouvent leur place dans les jardins des particuliers et dans les aménagements paysagers, c’est d’ailleurs l’un des objectifs de l’ONF à travers les 5 arboretums (ou arboreta) de l’île. « Un arboretum est un lieu qui rassemble des arbres dans un but scientifique, ornemental, patrimonial et pédagogique, de sensibilisation à l’environnement », explique Julien Triolo. Une sorte de jardin botanique où l’ONF replante uniquement des espèces endémiques à partir des graines récoltées dans les habitats naturels. Un vrai travail de prospection est mené pour repérer les arbres isolés dans la nature, souvent menacés de disparition par les incendies, les tisaneurs, les espèces envahissantes, la dégradation de l’habitat naturel... Ces plantes ont peu de chance de se régénérer en dehors d’un « abri sécurisé ».
C’est donc le rôle des arboretums de la Providence, de la Grande-Chaloupe, de Saint-Paul, de l’Étang-Salé pour les espèces rares de la forêt semi-sèche, et de l’arboretum de Bois-Blanc pour la forêt humide de basse altitude. Des espaces riches en biodiversité, aujourd’hui reconnus d’intérêt national parmi les 130 arboretums de France.

Une réserve pour nos forêts et nos jardins

Pour les scientifiques, l’arboretum est un espace d’étude accessible. Le CIRAD s’intéresse ainsi à la floraison des espèces endémiques à la Grande-Chaloupe, l’Université à l’étude des oiseaux blancs. L’arboretum est aussi une réserve de graines qui pourront pousser en pépinière, pour ensuite les replanter dans les habitats naturels, afin de préserver ce qu’il reste de forêt semi-sèche ou humide. Depuis quelques années, les particuliers peuvent aussi se fournir en pépinière de l’ONF, surtout pour les espèces indigènes. Les arboretums servent enfin d’espace de démonstration pour les collectivités qui veulent allier aménagement paysager et protection de l’environnement avec les plantes endémiques.
Pour le moment, les arboretums de Saint-Paul et Bois-Blanc sont les seuls à être ouverts au public. Mais l’ONF n’exclut pas une valorisation touristique de l’arboretum de la Grande-Chaloupe avec des guides pays, dans le cadre d’un circuit de découverte du site. Celui de la Providence a plus vocation à devenir un espace de démonstration paysager ainsi qu’un espace pédagogique pour les scolaires.

Textes et photos Edith Poulbassia


De la Grande-Chaloupe à la Providence

Dans le cadre de la Semaine du développement durable, l’ONF nous a fait découvrir son plus ancien arboretum, celui de la Grande-Chaloupe, créé en 1994, et le tout dernier, celui du domaine forestier de la Providence, à la Direction régionale de l’ONF.
L’arboretum de la Grande-Chaloupe est l’aboutissement de 15 ans de travail. Il faut bien ce temps pour qu’un arboretum prenne vie. Il est situé en zone de forêt semi-sèche, là où quelques derniers lambeaux subsistent. 95% de la forêt semi-sèche de l’île a en effet disparu. À l’exception du zévi marron, les arbustes de la forêt semi-sèche ne perdent pas leurs feuilles. L’une des plantes caractéristiques de ce type de forêt est le bois puant, dont il ne reste plus que 200 individus repérés dans les ravines de l’Ouest. Au total, l’arboretum de la Grande-Chaloupe contient 36 espèces d’arbustes pour 400 individus sur un demi hectare.
L’arboretum de la Providence accueille les plantes depuis 5 ans. Près de 400 individus, dont 300 plantés depuis l’année dernière pour 40 espèces. Comme le bois de lait, le bois d’arnette, le bois de fer, bois d’olive, bois de gaulette... L’ONF travaille en collaboration avec le Conservatoire botanique. Une cinquantaine de plants, dont le bois d’éponge, sont ainsi venus enrichir l’arboretum de la Providence. Celui-ci s’étend sur un hectare, mais est extensible à 5 hectares.
La Providence était à l’origine une forêt semi-sèche, la première à faire l’objet d’une description au début de la colonisation, vers les années 1700. Les premiers reboisements de l’île ont eu lieu à la Providence, avec des bois rouge et des grands nattes.

EP


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