Projet de ville éco-citoyenne d’Alain Bénard à Saint-Paul

Guy Ratane-Dufour, président du MGER : « une utopie sectaire »

3 novembre 2006

Construire à l’emplacement de l’antenne Oméga à Cambaie une ville éco-citoyenne, c’est ce que propose Alain Bénard, maire de Saint-Paul. Une ville de 30.000 à 50.000 habitants, qui s’étendra sur 165 hectares selon le “Quotidien” d’hier, et dont le premier lotissement sera livré en 2010. Guy Ratane-Dufour, Secrétaire Général du Mouvement de la Gauche Écologiste Réunionnaise, affirme son opposition à un projet jugé irréaliste.

Une ville éco-citoyenne où vivraient entre 30.000 et 50.000 habitants, une ville sans limite de hauteur, avec une plage artificielle, un port, un hippodrome, et surtout sans voitures, propice au développement de la “réunionité”, lieu de mixité sociale... La ville la plus parfaite possible.
Guy Ratane-Dufour, président de la MGER (Mouvement de la Gauche Écologiste Réunionnaise), pourtant ardent défenseur d’un mode de vie respectueux de l’environnement, ne voit dans ce projet qu’une « utopie sectaire ». Pour lui, « le maire de la plus grande commune de l’île rêve à des choses impossibles ». D’abord parce qu’une ville se construit avec une histoire, et non pas de toute pièce. Pour preuve, ce concept de ville-nouvelle dans les années 1970 en France qui n’a jamais fonctionné. Ensuite parce qu’en voulant créer une plage artificielle, un hippodrome, bâtir des tours, des barrières à l’écoulement des eaux, il faudra utiliser des matériaux non écologiques. « Cette ville-nouvelle relève d’une vision totalement mégalomaniaque, rajoute le président de la MGER. Et qui dit nouvelle ville, dit aussi nouveau conseil municipal. Qui sera le maire de cette commune ? ».

Pas besoin de mettre les habitants sous cloche pour l’épanouissement de l’identité réunionnaise

Ce projet irréaliste ne l’est pas seulement d’un point de vue écologiste. Ce que critique Guy Ratane-Dufour c’est la conception même du vivre ensemble qu’il propose. « Alain Bénard se prendrait-il pour Noé ? », s’interroge-t-il. Tout est en effet prévu dans cette ville-nouvelle pour que les habitants y vivent reclus, jusqu’à un centre des affaires pour y travailler. La ville serait même un lieu privilégié qui échapperait à « la dérive communautaire », propice au développement de la réunionité, lieu de mixité sociale et culturelle. « Un délire », souligne Guy Ratane-Dufour, convaincu qu’il n’y a pas besoin de mettre les Réunionnais sous cloche pour permettre aux cultures de se côtoyer et à l’identité réunionnaise de continuer à se construire.

L’écologie est une préoccupation globale

Pas besoin non plus, de fabriquer une nouvelle ville sur 165 hectares de terrain pour y faire vivre l’écologie. Ce mode de vie doit et peut être appliqué à toute l’île de façon plus simple, avec une vraie volonté politique. « Alain Bénard a-t-il l’intention de construire un mur autour de cette ville, et de changer l’air qu’il y aura au-dessus, pour qu’elle soit une ville écologique ? », plaisante le président de la MGER, signifiant de cette manière que l’environnement est un problème global, qui doit être traité de façon globale.
« Ce n’est pas une ville écologique qui résoudra le problème, c’est l’ensemble de la collectivité qui doit réagir. Les mesures son parfois simples, il suffit de les appliquer. La MGER préconise par exemple d’imposer des taxes aux propriétaires de gros véhicules, qui polluent plus. A-t-on sérieusement besoin de telles voitures sur une petite île comme la nôtre !, s’exclame Guy Ratane-Dufour. À Londres, le maire a eu le courage de mettre en place le péage pour l’entrée des voitures en ville, ce qui a réduit d’un tiers la fréquentation. Il s’attaque maintenant aux 4x4. Chez nous, il n’y a pas de volonté politique. Regardez à Saint-Denis. La circulation a été rouverte aux voitures. »
Pour le président de la MGER, le Maire de Saint-Paul a l’habitude d’afficher une image écolo et altermondialiste, sans vraiment passer à l’action dans sa propre commune. « Alain Bénard peut très bien mettre ses convictions en œuvre dans sa commune, sans construire une ville écologique qui ne verra le jour qu’en 2015. Il peut interdire les voitures en centre ville, favoriser les transports en commun propres, s’occuper des stations d’épuration pour le traitement des eaux usées, aller vers l’énergie solaire comme le fait la Région. Il a de quoi faire déjà, la réalité est à portée de main », conclut Guy Ratane-Dufour.

E. P.


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