Déchets et maladies émergentes

La population au cœur de la lutte

10 octobre 2006

À La Réunion, la Semaine nationale de réduction des déchets a un relief particulier avec l’émergence ou le retour de maladies favorisées par la présence de détritus. Contre le chikungunya et la leptospirose, la meilleure arme à employer est de développer la responsabilisation de chacun. Et si l’État et les collectivités ont le devoir de contribuer à la lutte dans le cadre de leurs compétences respectives, l’action de la population, consciente de l’importance de vivre dans un environnement préservé, est efficace et valorisante.

Chikungunya et leptospirose sont deux maladies mortelles qui continuent de toucher La Réunion. Ces deux fléaux ont au moins un point commun : la présence de déchets dans les cours ou au bord du chemin sont des lieux favorisant la prolifération des vecteurs de ces épidémies : le moustique et le rat.
Pour combattre le chikungunya et la leptospirose, plusieurs mesures sont mises en œuvre. Elles visent à réduire la population des vecteurs des épidémies. Contre le chikungunya et autres maladies transmises par les moustiques, l’accent est mis sur les opérations de démoustication par insecticides sur les adultes et les larves. Viennent également les moyens de protection de la population afin d’éviter les piqures. Contre la leptospirose, les collectivités locales organisent des opérations de dératisation, en association avec la population, notamment par la distribution de kit de dératisation.
Limiter le risque de propagation des épidémies en contrôlant le nombre de moustiques et de rats par l’emploi de substances mortelles pour les vecteurs des maladies est un moyen de lutte. Un autre est de limiter les lieux de vie et de reproduction des rats et des moustiques où qu’ils se trouvent : la voie publique, les ravines et les habitations. Cela passe par le ramassage systématique des déchets et la surveillance de lieux humides chez les particuliers et dans les entreprises, tels que les réservoirs à ciel ouvert ou les coupelles des pots de fleurs.

La lutte mécanique

Faire reculer ces foyers potentiels de nuisance, c’est l’objectif de la lutte mécanique. Avant le pic épidémique du chikungunya, dans plusieurs communes, un partenariat entre mairies et associations a permis la mise en place de déchetteries mobiles.
Un des mérites de ces initiatives a été de faire prendre conscience à la population qu’elle est un acteur décisif de la lutte. Elles ne relèvent aucunement de la volonté de stigmatiser ou de désigner des boucs-émissaires. Au contraire, elles procèdent de la volonté de donner aux citoyens davantage de moyens pour assainir leur cadre de vie. La décheterrie mobile se traduit par la démarche de faire venir dans les quartiers un message de sensibilisation et de responsabilisation, ainsi que les moyens humains et matériels pour que chacun amène sa pierre à un environnement plus sain, débarrassé des déchets, condition essentielle pour mener la bataille contre les risques sanitaires.
En liaison avec ce dispositif, les écoles sont aussi des lieux de prise de conscience des comportements à adopter pour faire reculer les maladies infectieuses. Le principe est de considérer que l’élève est un relais d’information privilégié, dans le sens où il est une voix qui compte dans le cercle familial. Expliquer dans les écoles des gestes qui peuvent être facilement mis en œuvre, c’est aussi un moyen de montrer aux plus jeunes qu’ils sont aussi impliqués dans la lutte. Autrement dit, ils sont porteurs d’un message de responsabilisation qui affirme que chacun, à son niveau, a le devoir d’agir pour vaincre collectivement ce chikungunya qui a frappé plus d’un Réunionnais sur trois.

Amplifier la prise de conscience

Ce qui est mis en place contre le chikungunya est aussi un moyen de lutter contre la leptospirose, étant donné que les lieux de stockage sans contrôle de déchets sont des zones qui facilitent la prolifération d’un des principaux vecteurs de cette maladie animale transmissible à l’être humain.
Pour limiter la population des rats, il ne suffit pas de dératiser, il est essentiel de priver ce rongeur de ces zones de repli que sont les dépôts sauvages. D’autant plus que l’action de la pluie permet à la bactérie Leptospira de se répandre sur une superficie plus grande et d’atteindre les cours d’eau. Traiter ce mal à la racine implique aussi d’amplifier le sens de la responsabilité de chacun, afin qu’au niveau du citoyen et de l’entreprise s’opère une prise de conscience de ce qui peut en coûter à la collectivité quand le traitement des déchets se fait par leur abandon dans une ravine, au bord du chemin ou près d’un étang.
Vivre dans un environnement assaini des déchets que l’être humain produit est un moyen de faire reculer les épidémies. À l’heure où sur la planète émergent ou réapparaissent de graves maladies comme le chikungunya, la leptospirose, le West Nile, et au moment où le paludisme continue de sévir dans notre région, il est primordial que la population s’approprie ce mot d’ordre. Faire de chacun un acteur responsable de la protection de l’environnement est une condition d’une plus grande sécurité sanitaire et par là même du développement du pays.

M. M.


Leptospirose : attention danger

Alors que plus de 200 Réunionnais ont perdu la vie du fait du chikungunya, une autre épidémie s’amplifie dans notre île, avec plusieurs cas mortels : la leptospirose. Cette maladie est transmise par une bactérie Leptospira qui vit essentiellement chez les rongeurs, et aussi dans les zones humides. Sa transmission se fait surtout suite à un contact avec les milieux souillés par des animaux infectés. Ces derniers rejettent la Leptospira dans la nature par leurs urines. L’être humain peut alors être contaminé par contact d’une plaie avec la bactérie, notamment lors d’un séjour prolongé dans de l’eau infectée. Il faut également se méfier des morsures, qui peuvent ouvrir des “portes d’entrée” à la bactérie.
Cette dernière passe ensuite dans le sang où elle se multiplie. Elle atteint ensuite la rate, le foie, le cerveau et d’autres organes. C’est dire l’importance d’un dépistage précoce en cas d’exposition à ce risque. C’est l’occasion de rappeler l’importance de la prévention auprès de toutes les personnes qui travaillent en extérieur. Sont particulièrement visés les agriculteurs, les agents du traitement des eaux usés, les pisciculteurs, les pêcheurs et les employés des abattoirs. Face à ce risque, ces travailleurs doivent avoir le droit à une vaccination systématique.
Prévenir passe aussi par l’information, le nettoyage des berges des cours d’eaux, l’assainissement des lieux de baignade, la désinfection des locaux infectés et le respect des règles générales d’hygiène, notamment le lavage systématique des mains et le port de gants.
Et afin d’anticiper tout risque, il convient de bannir des comportements condamnables tels que l’abandon de carcasses d’animaux dans les ravines ou à proximité des cours d’eau. Des gestes qui, en plus d’être une atteinte à la propreté de l’environnement, sont des actes qui mettent en péril la sécurité sanitaire de la population.


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