2010, année de la biodiversité

Le Mozambique et Madagascar au cœur d’expéditions naturalistes

8 janvier 2010, par Edith Poulbassia

Deux pays auxquels l’Histoire nous lie intéressent les chercheurs au plus haut point. Il s’agit du Mozambique et de Madagascar. Ces deux pays de l’océan Indien ont été choisis pour être le point de départ d’un programme de recherche sur la « biodiversité négligée »... Celle qui cache encore ses mystères, ses milliers d’espèces endémiques, la plupart inconnus des scientifiques. L’objectif est de mieux connaître ces espaces riches en espèces et menacés pour mieux les protéger.

Le programme “Planète Revisitée” rassemble ainsi des naturalistes et systématiciens à l’initiative du Muséum d’Histoire Naturelle et de l’ONG Pro Natura International, en partenariat avec l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature). Des chercheurs locaux et internationaux sont associés aux expéditions. Selon les scientifiques, seulement 1,8 million d’espèces seraient connues à ce jour sur la planète, et il resterait entre 8 à 30 millions d’espèces à découvrir... avant qu’ils disparaissent, si rien n’est fait pour enrayer la sixième grande extinction.

Une course contre la montre

Pour faire l’inventaire de ces espèces inconnues, il faudrait aux scientifiques entre 250 à 1.000 ans ! Mais la connaissance de ces espèces est indispensable « avant de décider qu’est-ce qu’on laisse et qu’est-ce qu’on garde », affirme Olivier Pascal, chef de mission de l’expédition du Mozambique. « Nous sommes la première génération de scientifiques conscients qu’un tiers ou la moitié de la biodiversité disparaîtra d’ici la fin du siècle et que 80% n’est pas encore décrite », souligne Philippe Bouchet, professeur au Muséum national d’Histoire Naturelle. C’est pourquoi, le programme “Planète Revisitée” s’est engagé dans une course contre la montre avec des moyens pour réduire le temps de collecte et d’analyse.
Du 1er au 15 décembre 2009, la première expédition s’est dirigée vers les forêts sèches du Mozambique. La deuxième expédition est prévue pour avril 2010 pour découvrir les zones côtières du grand Sud malgache ainsi que les profondeurs du Canal du Mozambique. Budget global des deux expéditions : 2 millions d’euros.

Forêts sèches en lambeaux

Une expédition d’un tel niveau d’expertise est une première au Mozambique pour les forêts sèches côtières. De la situation, de l’étendu et du contenu de ces forêts, les scientifiques ne savent presque rien. Les études n’existent que pour les forêts du Kenya et de Tanzanie. L’expédition s’est soldée par « une collecte de spécimens importante, voire exceptionnelle en termes de plantes et d’animaux. Par contre, la forêt ne subsiste que sous forme de lambeaux disparates », raconte Olivier Pascal, pour qui il faudrait arriver à protéger une surface 50 à 100 fois plus importante que celle explorée (20.000 km2) pour « garder un échantillon représentatif » des forêts sèches victimes de l’agriculture et de l’exploitation du bois. “Planète Revisitée” a décidé de s’intéresser au « petit peuple de la biodiversité », c’est-à-dire les plantes et insectes, ce qui le plus souvent est laissé de côté, alors que leur rôle est fondamental pour les écosystèmes.

La promesse des coquillages

À Madagascar, l’expédition du mois d’avril se déroulera en deux temps. À l’extrême Sud de la Grande-Ile, Fort-Dauphin et Lavanono, là où les eaux sont froides et colonisées par les algues brunes. Une région qui n’attirait pas l’attention des chercheurs jusqu’à la découverte par les collectionneurs de coquillages, depuis une dizaine d’années, de nouvelles espèces de cônes, porcelaines, volutes. Philippe Bouchet croit ainsi en « un potentiel de découverte extrêmement important » du grand Sud malgache, et ne voit en ces coquillages que « la partie émergée de l’iceberg ». « Dans le Pacifique, il y a un siècle que l’on n’a pas fait de découverte de ce genre », compare-t-il. Il avance que la moitié des espèces de l’extrême Sud côtier malgache pourrait être endémique.
L’autre mission concernera le Canal du Mozambique pour une exploration entre 100 à 1.000 mètres de profondeur. Une région menacée par la surpêche.
“Planète Revisitée” a fait le choix de concentrer ses efforts sur les 11 points chauds de biodiversité les plus menacés (il ne reste que 10% des superficies originelles) sur les 34 définis au niveau mondial par l’ONG Conservation International.

E.P.

Pour suivre les expéditions : Le blog de Planète Revisitée, www.laplaneterevisitee.org


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus