Mise aux normes européennes des réseaux d’assainissement

Le partenariat institutionnel : un atout pour faire entendre la population

1er juillet 2008, par Manuel Marchal

Hier, à l’invitation du préfet, des élus des communes, du Conseil général et de la Région participaient à une table-ronde avec le représentant de l’Etat. A l’ordre du jour, la mise aux normes des réseaux d’assainissement à La Réunion, la facture est estimée à plus de 365 millions d’euros. Qui va payer ?

Le dossier de la mise aux normes des stations d’épuration connaissait hier une étape importante.
Rappelons que 8 maires ont été mis en examen pour pollution, une procédure unique sur le territoire de la République. Cette procédure exceptionnelle est liée à la non application des normes européennes en matière d’assainissement. Or, lors de la séance des questions à l’Assemblée nationale, Jean-Louis Borloo annonçait que 156 collectivités ne respectent pas les normes européennes.
Les élus sont mobilisés de longue date. Outre les projets qui en sont au stade de la consultation des entreprises, plusieurs motions ont été rendues publiques.
C’est tout d’abord celle de l’Association des Maires, déposée le 29 mai à la Préfecture. Les maires de La Réunion tout d’abord « s’insurgent contre un tel procédé qui consiste purement et simplement à instrumentaliser l’institution judiciaire comme si elle pouvait gérer, par ses moyens coercitifs, les questions relevant des compétences des collectivités territoriales », rappellent la condamnation de l’Etat par l’Union européenne pour le non respect des normes européennes dans de nombreuses collectivités, et souhaitent être fixés de manière définitive sur le mode de financement des stations d’épuration.

« Rétablir le co-financement à hauteur de 80% »

Rappelons que lorsque les communes ont lancé leurs projets, le financement Etat-Europe était à hauteur de 80% du montant de l’investissement. Aujourd’hui, c’est l’incertitude, et selon les éléments en leurs possessions, les maires ont indiqué le 29 mai dernier que la subvention couvrait environ 30% de l’investissement.
Le 10 juin, lors de la séance plénière de la Région ayant à l’ordre du jour l’avis de la collectivité sur le projet de loi-programme pour l’Outre-mer, les conseillers régionaux ont adopté une motion de solidarité envers les élus mis en cause, et demandant la concertation et le dialogue « pour examiner ensemble les problèmes et trouver ensemble des solutions ». Le lendemain, deux motions sont présentées à la séance plénière du Conseil général. La première apporte la solidarité de l’assemblée aux maires, et soutient la proposition de l’AMDR de « réclamer à l’Union européenne et à l’Etat de rétablir le co-financement à hauteur de 80% au lieu des 30% actuels ».
L’enjeu du financement est en effet considérable. Ce sont plus de 365 millions d’euros à débourser pour la mise aux normes européennes de tous les réseaux d’assainissement à La Réunion. Et sur cette somme, l’Etat propose 62 millions d’euros, a rappelé Maurice Gironcel, 1er vice-président du Conseil général, lors de la dernière séance plénière. Sur la base de ce financement, l’élu indique que sur le territoire de la CINOR, et compte tenu des subventions, la facture payée par l’usager sera une hausse de 400% de la taxe d’assainissement.

Une population encore plus fragilisée

Or, cette hausse interviendrait au moment où La Réunion est touchée par une augmentation généralisée des prix, notamment de première nécessité. Ce phénomène lié au contexte mondial est amplifié par les spécificités de La Réunion : insularité, chômage de masse entraînant une grande pauvreté. Ce serait donc sur les épaules d’une population dont plus de 40% a si peu de revenus qu’elle a droit à la CMU que reposerait donc l’effort financier de la mise aux normes européennes. Cette dernière décision est l’application d’une loi découlant d’une directive européenne.
Un élément important entre en jeu. Il a été évoqué lors de la dernière séance plénière du Conseil général. C’est l’annonce par Maurice Gironcel du décalage de plusieurs années entre le moment où l’Etat a appris que les nouvelles normes européennes allaient être appliquées et celui où l’Etat a informé les collectivités territoriales compétentes dans le domaine de l’assainissement.
Sachant que la mise aux normes est inéluctable, est-ce à la population de payer ce retard ?
Dans cette bataille, les collectivités ont réussi à parler d’une même voix. Ce partenariat institutionnel est essentiel pour faire avancer l’intérêt général. Cette stratégie a déjà permis d’obtenir des modifications favorables dans le projet de loi-programme. Gageons que sur la question de l’assainissement, elle débouchera sur le succès de la population réunionnaise.

Manuel Marchal


Financement : la part de l’Etat dépassera légèrement 34%

Dans un communiqué diffusé hier par le Préfecture, le préfet annonce une subvention de 126 millions d’euros pour l’assainissement, dont 73,7 millions d’euros pour les stations d’épuration. Par ailleurs, il indique que la Caisse des dépôts et consignations mettra en place cette année un total de 300 millions d’euros de prêts bonifiés pour le financement des réseaux d’assainissement.
Par ailleurs, le préfet indique que « sur les 13 communes mises en demeure, en décembre 2006, de s’équiper de stations d’épuration, toutes ont respecté l’échéance prescrite pour le dépôt de leurs dossiers (19 au total), même si certains doivent encore être complétés ». Et il annonce qu’« une commission “eau-aménagement”, composée de services de l’État et d’élus, va être installée très prochainement sous l’égide du SGAR, pour piloter la mise en place de ces financements ».
Concernant la période 2000-2006, le préfet déclare que sur les 86,2 millions de subvention consacrés aux stations d’épuration, 9,9 millions d’euros ont été utilisés. Ce qui signifie par conséquent que 77,3 millions d’euros n’ont pas été mobilisés.
Si le préfet indique une hausse des investissements « en matière d’eau et d’aménagement », force est de constater une baisse des crédits pour les stations d’épuration : de 86,2 millions d’euros à 73,7 millions d’euros, soit 13 millions d’euros de moins.
Quoi qu’il en soit, alors que les investissements sont estimés à plus de 365 millions d’euros, les subventions de l’Etat dépasseront à peine 34% de cette somme. Car il est bien entendu que les 300 millions d’euros que les élus pourront mobiliser auprès de la Caisse des dépôts et des consignations sont des prêts, pas des subventions.
La réunion d’hier à la Préfecture permet donc de clarifier la part de l’Etat dans le financement.

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Messages

  • Je suis sûr que mes propos vont choquer beaucoup de personnes. Avant même les élections communales, j’avais écrit avec E. Fruteau pour lui donner une appréciation des retards de mises aux normes dans certains domaines ( Eau-Assainissement-Déchets ....) sur la commune de St André. Il est vrai que les moyens judiciaires sont disproportionnés pour l’équipe actuelle, d’autant que l’ancienne équipe est entièrement responsable de la situation, mais pour autant il en va aussi de la santé des réunionnais dans ces affaires et même de leur pouvoir d’achat. Par exemple, être obligé d’acheter de l’eau en bouteille après une grosse pluie n’est pas normal quand on pourrait boire une eau du robinet potable et non jaunie par par la terre.
    Il y a d’autres choses à voir à la Réunion : la sécurité routière... port du casque obligatoire, ceinture de sécurité, éclairage nocturne des 2 roues, piétons devant marcher à gauche, enfants à l’avant d’une voiture ... la liste est longue. Ces contraintes permettent de sauver des vies et ne sont ni de droite ni de gauche. Alors il ne suffit de me dire .. Ici on est à La Réunion , comme on m’a dit récemment et ensuite de pleurer et demander au maire de refaire une route parce qu’un gamin sans casque est mort sur un chemin de terre alors qu’il roulait à moto à plus de 90 km/h.
    Voilà les propos que je voulais vous écrire. Ils sont critiques sûrement, mais la Réunion c’est aussi la France et j’aime La Réunion

  • lorsque vous écrivez que la mise aux normes est inéluctable et que vous vous interrogez sur le point de savoir si c’est à la population de payer ce retard, j’avoue que les bras m’en tombent car je vous rappelle que l’impôt est payé par la population et qu’en définitive c’est bien à la population de payer les dépenses publiques. Jusqu’à nouvel ordre l’argent ne tombe pas du ciel !!!

    Par ailleurs je me demande à quoi servent les effectifs, parfois pléthorique, des collectivités si celles-ci attendent d’être averties par l’Etat des nouvelles dispositions légales, quelles soit nationales ou européennes. Le retard dont fait état le maire de Sainte Suzanne n’existe pas car nul n’est censé ignorer la loi.

    Enfin le coût, très faible de l’eau à la réunion est la cause du gaspillage de ce précieux liquide. La consommation d’eau à la Réunion est bien plus importante que celle constatée dans les autres départements y compris les autres DOM.

    On trouve bien de l’argent pour des réalisations de prestige dont l’utilité n’est pas prouvée !!!!!


Témoignages - 80e année


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