Ainsi que l’ont rappelé les intervenants à la conférence, le dossier “Parc national” a été accepté en janvier 2008 par le comité national des biens français. En juin-juillet, il doit franchir une nouvelle passe, avec l’avis du Comité du patrimoine mondial. Si cet avis est positif, des experts de l’UICN
(Union Internationale pour la Conservation de la Nature) seront dans l’île en octobre ou novembre, pour vérifier sur place que les Réunionnais sont majoritairement conscients de la valeur patrimoniale de leur île, et capables d’en préserver la richesse exceptionnelle. « Pour un mode de gestion durable, il faut que chacun s’approprie ce projet » ont insisté tour à tour Isabelle Bracco et René Robert. Si le constat des experts de l’UICN est positif, d’ici un an, en juin-juillet 2009, nous pourrions voir nos "Pitons, cirques et remparts" inscrits au patrimoine mondial de l’humanité.
Avant cette date, le Parc national aura fait paraître - sans doute vers septembre 2008 - un ouvrage de vulgarisation d’environ 300 pages, reprenant l’essentiel de l’argumentaire, de façon linéaire et pédagogique, accessible au plus grand nombre.
L’enjeu de cette publication est de permettre à chaque Réunionnais de s’approprier les éléments qui fondent la demande d’inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO et de montrer une volonté de protéger cette unicité dans la durée. Sait-on par exemple qu’il existe ici des orchidées “pollinisées” par un oiseau - et non par un papillon, comme à Madagascar ? Mais cet oiseau - zoiso blan - est très menacé. Les oiseaux endémiques ont disparu à 70%, avec la tortue. Si notre faune reste importante, elle est très largement amputée. La végétation originelle aussi a reculé avec la colonisation de l’île par l’homme.
Parmi ses spécificités, La Réunion a la particularité d’être une île océanique tropicale - c’est-à-dire qu’elle n’est rattachée à aucun socle continental, mais a surgi de l’océan par l’activité volcanique - et dans cette famille (des îles océaniques), elle fait figure d’exception, par la richesse de ses milieux naturels préservés. Elle est aussi signalée comme l’un des sept sites mondiaux nés d’un point chaud profond, directement relié au cœur de la terre, les autres points chauds prenant naissance dans des zones plus superficielles du manteau ou de la croûte terrestre. Un point chaud est une percée du magma au travers de la plaque terrestre. La théorie géologique des “points chauds” attribue, dans l’Océan Indien, une même origine volcanique aux territoires situés le long d’un arc reliant le Deccan (Inde) aux îles Mascareignes (Sud-ouest de l’Océan Indien).

La Réunion, ainsi que d’autres îles des Mascareignes, a été identifiée comme faisant partie des 34 hauts lieux de la biodiversité mondiale (UICN). Le long d’un “gradient” de 3.000 m à deux versants - l’un au vent, l’autre sous le vent - s’est peu à peu installée une biodiversité unique de 230 espèces végétales endémiques, dont la moitié est aujourd’hui menacée.
René Robert a expliqué comment tout le cœur montagneux de notre île, et singulièrement ses hauts remparts, constituait « le trait d’union de tous les ensembles du patrimoine naturel de La Réunion ». La valeur patrimoniale proposée au label de l’Unesco couvre les deux massifs volcaniques et les trois cirques majeurs.
Dans cette stratégie de préservation, le Parc national - qui couvre 40% de l’île - est avec les PLU de Cilaos et de Salazie, l’outil de portage du dossier auprès de l’Unesco.

P. David

Isabelle Bracco, responsable du Parc national (secteur Est) :
le développement durable, c’est tout un ensemble de pratiques

Quel sens particulier prenait votre présence ici, à Hell-Bourg, dans la présentation des enjeux qui lient notre “patrimoine mondial” et le développement durable ?
- Il y a une valeur particulière de notre présence à Hell-Bourg puisque les cirques de Hell Bourg et de Salazie ont choisi de faire partie du dossier “Patrimoine mondial”. D’où l’enjeu particulier de cette conférence : il est très important que les Réunionnais comprennent bien les raisons pour lesquelles La Réunion est un territoire exceptionnel, notamment les cirques - le fil directeur de ce dossier étant “Pitons, cirques et remparts”. Volonté de sensibiliser les populations des cirques aux spécificités de l’île qui font l’objet de la candidature Réunion au Patrimoine mondial. De Plus, Salazie et Hell-Bourg en particulier sont l’une des portes d’accès privilégiée vers le cœur du Parc national - et donc nous, ses animateurs, allons préparer des interventions régulières pour partager avec les habitants des cirques connaissances et traditions et déployer ensemble une dynamique sur la préservation du Parc.

L’Exposition présentée ici depuis deux mois met l’accent sur 10 enjeux primordiaux. Pensez-vous qu’ils soient bien connus d’une façon générale ?
- Le développement durable est souvent réduit à une notion unique - trier ses déchets, ne pas jeter n’importe où, par exemple - ou alors il ne dit rien à personne, parce qu’il est perçu comme trop abstrait.
L’idée, pour que l’île se développe harmonieusement autour de son cœur naturel, est qu’il faut garder à l’esprit tous les efforts à faire au quotidien. Pour que les hommes vivent en équilibre, dans un bon cadre de vie, cela nécessite des précautions de tous les jours comme celles qui sont rappelées sur les panneaux. C’est tout un ensemble de bonnes pratiques à avoir au quotidien : pas seulement la préservation de la nature - même si j’y suis très attachée - pas seulement le tri des déchets ou les énergies renouvelables. Mais aussi tout ce qui est rappelé ici et que nous voulons faire partager par la population.

Propos recueillis par P. David

10 enjeux du développement durable

L’Exposition “terre sauvage, développement durable” est tirée du numéro spécial que la revue "Terre sauvage", sur une proposition du Parc National, a dédié à La Réunion.
Elle est déjà passée par le domaine des Tourelles et y retournera certainement dans un avenir proche (mi-juillet). Elle va surtout tourner dans des écoles qui le souhaitent, pour faire travailler les élèves sur une conception globale du développement durable.
Les panneaux présentent "les 10 enjeux du développement durable", à savoir :
réussir le Parc naturel
sauver le lagon
rouler plus collectif (et en co-voiturage)
urbaniser sans s’étendre
miser sur les énergies renouvelables
traiter les eaux usées
cultiver plus sain, plus bio
trier et traiter les déchets
maintenir le lien social
préserver l’identité créole