Incinérateur à La Réunion

’Un débat public doit être mis en place’

8 septembre 2006

L’ACCIDOM Réunion tire les enseignements de la visite du Ministre de l’Outre-mer. Elle estime que le gouvernement ne veut plus imposer sans discussion un incinérateur pour gérer les déchets et appelle à une large concertation publique, pour que les Réunionnais puissent décider de la solution qu’ils estiment la plus juste. Mais le débat ne doit pas être faussé.

Pour l’ACCIDOM, association contre l’installation d’un incinérateur pour traiter les ordures, le ton du discours gouvernemental a changé affirmant qu’il y a quelques mois, Dominique de Villepin et Nelly Olin "voulaient imposer “à la hussarde” un incinérateur" et que maintenant, le Ministre de l’Outre-mer "se refuse à préconiser quoique ce soit et même à prononcer le mot", en se "bornant à dire" que le gouvernement "aidera financièrement" le projet voulu par les élus locaux.
Les élus locaux favorables à l’installation d’un incinérateur sont de plus en plus "solitaires", dit l’ACCIDOM depuis qu’André Thien-Ah-Koon et Alain Bénard (Président du TCO porteur du projet avec la CIVIS), deux poids lourds de la droite locale, se sont prononcés "pour un rejet catégorique de l’incinération" en utilisant d’ailleurs un certain nombre d’arguments “accidomiens”. À quoi il faut aussi rajouter les réticences de la Présidente du Conseil général pourtant responsable du Plan d’Elimination des Déchets qui préconise l’incinération ainsi que l’opposition de Didier Robert, Maire du Tampon.

Expert controversé

L’ACCIDOM estime qu’"un débat public doit être mis en place" avec deux experts qui viendraient à La Réunion en novembre. D’après des informations reçues par l’association, l’un des experts serait M. Gérard Keck, Professeur de toxicologie et Président du Réseau Santé Déchets, ainsi qu’un professeur à l’Ecole Nationale de Santé Publique. L’association reconnaît la compétence de M. Keck, mais, tout en affirmant ne pas vouloir préjuger de la qualité du débat futur, s’interroge, sachant que "M. Keck s’est déjà prononcé de manière favorable" à l’incinération comme en témoigne sa critique parue en avril 2002, de la position anti-incinération de Greenpeace.

Voici ce qu’il écrit parlant des dioxines :
"... les dioxines constituent des polluants redoutables, et sur lesquels il reste encore beaucoup à apprendre, mais leur dramatisation correspond au but avoué de supprimer tout recours possible à l’incinération des déchets, ce qui semble un parti pris extrémiste et quelque peu dogmatique... Ce n’est pas contribuer de manière responsable à ce débat important que de diffuser des informations alarmistes et souvent erronées car dépassées, et recourant à l’amalgame, au sujet de notre santé et celle des générations à venir.
Comme d’autres filières de traitement, l’incinération est une solution possible en fonction du contexte local, en l’intégrant dans un schéma multi-filières favorisant le recyclage et la valorisation... etc".

L’ACCIDOM se demande donc quelles garanties aurons-nous d’avoir un débat contradictoire si le ou les experts se sont déjà prononcés favorablement sur les incinérateurs ?
Le dossier Incinérateur de la CIVIS continue d’avancer : le 3 août, le dossier d’études a été présenté au Comité Local de Suivi, commission chargée de suivre la gestion des fonds européens.

"Le dossier incinération n’est pas enterré"

D’après les propres estimations de l’association, la CIVIS aurait entre "30 à 40 millions maximum de fonds européens" et en l’état actuel, "20 millions de l’État par le biais du contrat plan État-Région". Soit au total 60 millions sur les 250 officiellement annoncés. Même si l’État met la main à la poche, l’ACCIDOM estime que cela ne suffira pas pour atteindre "total espéré".
Aussi, elle s’interroge sur le financement privé évoqué : "Le problème c’est la répercussion sur les finances des communes et donc sur la TEOM qui doublerait facilement".
Pour l’ACCIDOM, "le dossier incinération n’est pas enterré". Elle estime que le gouvernement a deux problèmes majeurs :
Tout d’abord la division manifeste des élus locaux sur la question, les partisans du projet étant maintenant minoritaires. Ensuite le financement qui ne semble pas ou plus assuré.
Pour ACCIDOM Réunion, le prochain enjeu sera constitué par la forme du débat promis par le gouvernement. Si débat contradictoire il doit y avoir, il faut que les “experts” invités puissent représenter en toute indépendance des arguments réellement contradictoires afin que les Réunionnais puissent se forger une conviction en tant que citoyens soucieux de l’avenir de leur île.


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