L’ingénieur-conseil, un métier à découvrir

6 juin 2006

L’utilisation et la maîtrise des nouvelles technologies au sein de l’entreprise ouvrent de nouveaux horizons.
Sources de nombreuses opportunités, elles peuvent contribuer à rendre nos entreprises plus performantes et plus innovantes.
Se démarquer de la concurrence, s’adapter aux fluctuations d’un marché, anticiper, telles sont les réalités auxquelles doivent faire face les entreprises avec la mondialisation croissante des échanges.

L’Artic propose aujourd’hui une découverte de ce métier.
Christine Niox-Château (chargée de mission à l’Artic) a rencontré M. Olivier Pons (ingénieur-conseil en management) afin de mieux connaître les facettes de ce métier et son action au sein de l’entreprise.

Christine Niox-Château : Pourriez vous nous définir qui est exactement l’ingénieur-conseil ?

- Olivier Pons : L’ingénieur-conseil est un ingénieur qui exerce son métier en profession libérale, ce qui l’oblige à n’avoir que des activités exclusivement intellectuelles.
Par exemple, un ingénieur en aéronautique qui veut créer son entreprise aura comme possibilité, soit de créer une entreprise de construction d’aéronefs, où il sera “chef d’entreprise” et pourra étudier, concevoir et construire ; soit d’être “ingénieur-conseil” et se limiter à la réalisation des plans et des études de ses futurs avions. La construction proprement dite devra être à la charge d’entreprises artisanales ou industrielles.
Voilà ce qui en est pour la définition de l’ingénieur-conseil. Mais, la loi française autorise quiconque à se donner le titre d’ingénieur, et n’offre aucune garantie sur ses compétences.
Seul le titre “d’ingénieur diplômé d’État” garanti que celui, qui le porte, à fait une école d’ingénieurs correspondant à un niveau de formation Bac+5, et qu’il est reconnu comme tel.
La Chambre des ingénieurs-conseils de France (CICF) offre une garantie plus importante. Elle oblige à ses membres d’être diplômés d’État, et d’être reconnus par leurs pairs comme compétents dans leurs spécialités.
Aussi dans la suite de l’interview, je ne parlerai que des ingénieurs-conseils membres de la CICF.
Avec cette restriction, l’ingénieur-conseil est un ingénieur diplômé d’État, qui exerce dans le plus grand respect des règles déontologiques propres à l’exercice en profession libérale, à savoir : l’indépendance, la responsabilité et le secret professionnel, et qui applique le code d’éthique de la CICF : code, qui préconise comme par exemple : la recherche des solutions en accords avec le développement durable, le maintien de sa connaissance et de sa compétence à un niveau en rapport avec le développement de la technologie, ou le refus de fournir des services pour lesquels il n’aurait pas les compétences requises.
Avec autant de philosophie, l’ingénieur-conseil peut devenir plus qu’un métier : un art de vivre.

Quels sont les domaines couverts par les ingénieurs-conseils ?

- En fonction de leurs spécialités, les ingénieurs-conseils peuvent exercer dans les domaines suivants : le conseil en systèmes informatiques, l’édition de logiciels et toutes les activités liées à la réalisation de logiciels, le traitement de données et les activités de constitution et d’exploitation de banques de données, les études de marchés et de sondages, le conseil pour les affaires et la gestion, les études techniques (autres que liées à l’informatique, le BTP par exemple), les analyses, les essais et les inspections techniques, la sélection et la mise à disposition du personnel et l’organisation de foires et salons.
Pour faire face à cette diversité, les ingénieurs-conseils précisent toujours leur spécialité.
Ainsi, l’Ingénieur-Conseil en Management est un généraliste, qualifié pour traiter la plupart des problèmes courants de l’entreprise et/ou un spécialiste dans un certain nombre de domaines (technologies diverses, gestion, marketing, recrutement, organisation, management et informatique.)
Pour ma part, je suis un généraliste ayant comme spécialités l’organisation et l’informatique industrielle.
Je suis généraliste dans la mesure où je peux intervenir de façon générale dans toutes les entreprises. Ma formation me permet d’appréhender aussi bien les problèmes d’une industrie agroalimentaire que d’une travaillant dans le secteur du BTP.
Ma spécialité en organisation me permet d’intervenir au niveau du poste de travail et de définir si, pour l’améliorer, il faut un complément de formation ou un équipement.
Ma spécialité en informatique industrielle me permet de rédiger le cahier des charges de l’équipement à installer, que ce dernier soit une machine automatique ou un poste informatique.

Quel est le rôle de l’ingénieur-conseil en Management ?

- Le rôle de l’ingénieur-conseil en Management est d’apporter ponctuellement une compétence intellectuelle précise à ses clients à partir d’une vue globale de leurs entreprises. Si on devait faire l’analogie avec les métiers de la santé, où l’entreprise serait le patient, l’ingénieur-conseil en Management jouerait le rôle de médecin généraliste : il prescrit le remède pour que l’entreprise évolue correctement.
Ses missions sont : l’audit, l’étude, le conseil, le diagnostic, le pilotage d’un projet, l’assistance, la maîtrise d’ouvrage déléguée, la maîtrise d’œuvre, l’expertise, le développement de logiciels, la réalisation de sites WEB et la formation continue.

Quelles sont ses responsabilités ?

- Ses responsabilités dépendent de la nature de ses missions. En général, elles se limitent à l’apport de tous les éléments, qui permettront au client de faire son choix : le client restant responsable du choix.

À quel moment l’entreprise fait appel le plus souvent à l’ingénieur-conseil en Management ?

- L’entreprise doit faire appel à un ingénieur-conseil pour l’éclairer sur un choix à faire. Elle devrait normalement le consulter lors des études en amont : c’est ce que font les entreprises qui ont déjà travaillé avec un ingénieur-conseil.
Les autres font leur appel une fois que le choix est fait, et souvent pour les aider à sortir des difficultés dans lesquelles elles se sont mises : dans ce cas, l’ingénieur-conseil doit aussi être un bon négociateur.

Quelle place et quelle évolution pour le métier d’ingénieur-conseil en Management au sein des NTIC ?

- Les NTIC sont les réseaux nerveux des entreprises, et du monde économique de façon générale. Elles sont devenues un organe essentiel, que l’ingénieur-conseil en Management ne peut pas ignorer.
Leur évolution est trop importante pour qu’une personne qui désire les maîtriser puisse aussi maîtriser tous les autres domaines d’une entreprise. Avec l’arrivée des NTIC, l’ingénieur-conseil en Management devra de plus en plus se spécialiser pour rester toujours performant. Et, c’est pour ça que j’ai choisi de me spécialiser en organisation et en systèmes informatiques.

Pourriez-vous nous parler de l’étude et du conseil en informatique ainsi que de leurs enjeux ? et notamment à La Réunion ?

- En 1993, La Réunion avait un retard considérable par rapport à la métropole en termes de TIC. En 1995, l’ordinateur avait envahi les couches moyennes de la société, et le GSM prenait son envol. Les entreprises réunionnaises n’avait plus rien à envier à leurs homologues métropolitaines. Aujourd’hui, la Réunion bénéficie d’une très bonne couverture en TIC. Et, même s’ils sont plus élevés que ceux de la métropole, les prix ont baissé et les TIC sont abordables à la plupart d’entre nous.
Si la continuité territoriale n’existe pas encore pour le transport des biens et des passagers, elle est devenue largement opérationnelle pour l’information : il suffit d’un budget modeste pour qu’une entreprise puisse se faire connaître et se vendre dans le monde entier. Les TIC et l’informatique forment un enjeu important pour ouvrir la Réunion à des marchés de niches à l’export.
Or, les produits informatiques sont devenus des produits de consommation (on les trouve dans les grandes surfaces) et lorsqu’ils ne sont pas gratuits, leurs prix varient du simple au décuple. Le consommateur final ne peut plus se fier ni au prix, ni à la marque, comme indicateurs de qualité. Il est obligé pour faire son choix de se référer au descriptif technique. Or la plupart du temps, il est incapable de mesurer ce qui lui faut (RAM, disque dur, fréquence, logiciels, etc.), et il achète souvent une solution largement trop surdimensionnée.
C’est là qu’interviennent les études et les conseils en informatique, qui vont orienter l’achat vers une offre raisonnable, et, en évitant l’investissement dans des systèmes trop lourds, permettre à l’entreprise d’utiliser sa trésorerie pour des actions plus lucratives (marketing, etc...)
Comme l’abondance des produits est forte, le besoin en études et en conseils est de plus en plus important.
Cependant à La Réunion, les études et les conseils sont souvent spécialisés, et sont du ressort des revendeurs de matériels et de logiciels. Leurs commerciaux conseillent de plus en plus des solutions “clé en main” en fonction de la typologie du client (entreprise individuelle, TPE, PME, Grands Comptes, etc.), qui sont ensuite réalisées par des intégrateurs. Le secteur de la formation à La Réunion permettra d’avoir des intégrateurs de haut niveau, notamment avec l’arrivée de Sup Info.
Hélas, ce que nous pouvons reprocher aux études spécialisées, c’est leur manque de vision globale de l’entreprise. Il m’est fréquent de concevoir des solutions coûtant moitié moins que la solution initialement proposée, tout simplement en supprimant de l’offre toutes les fonctions que le client n’utilisera jamais. Cette vision globale est obligatoirement celle d’un ingénieur-conseil en Management, soucieux de la maintenir et de l’affiner (savoir accumulé).
Ce besoin est croissant et il ne pourra être comblé que par des ingénieurs-conseils qui auront fait leurs études en métropole, à moins que la Réunion ouvre d’ici là l’INSIT.
Je pense que pour La Réunion, l’ingénieur-conseil peut être une locomotive à l’export. En effet, comme il agit en amont, c’est lui qui réalise les cahiers des charges des systèmes ou des services qui seront après développés par les sociétés spécialisées. En étant en contact avec des réseaux d’affaires à l’export, il peut ramener du travail aux entreprises réunionnaises.
En résumé, “l’étude et le conseil en informatique” est un métier qui doit peut-être évoluer pour tirer une partie de l’économie locale à l’export.


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