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« Immigration comorienne » à La Réunion : environ 270 Mahorais et quelques dizaines d’Anjouanais, de Mohéliens et de Grand-Comoriens par an seulement
Retour sur l’étude de l’INSEE sur « les migrations résidentielles à La Réunion »
jeudi 28 juillet 2022, par
Entre 2015 et 2019 en moyenne annuelle, les migrants originaires de l’archipel des Comores se composaient d’environ 270 Mahorais et quelques dizaines d’Anjouanais, de Mohéliens et de Grand-Comoriens. Comparée aux 10800 immigrés qui arrivaient chaque année de France sur la même période, dont 7700 de non-natifs, cette « immigration comorienne » à La Réunion est une goutte d’eau. Elle cristallise pourtant nombre de réactions racistes qui expliquent en partie le vote pour l’extrême droite dans notre pays. Or, sauf importantes réformes structurelles, l’immigration des Mahorais à La Réunion ne pourra qu’augmenter dans les années à venir, compte tenu du refus de Paris d’y appliquer l’égalité sociale sur fond de croissance démographique, de crise économique, sociale et environnementale et de montée de l’insécurité.
Le numéro 67 de la revue INSEE Analyses Réunion a pour thème « les migrations résidentielles à La Réunion ». Une partie de l’étude traite des immigrés en provenance d’autres pays que la France. Voici un extrait à ce sujet :
« Les arrivées depuis Mayotte comme les départs vers l’île aux parfums sont faibles. Chaque année, entre 2015 et 2019, 550 résidents de Mayotte s’installent à La Réunion ; autant de personnes font le chemin inverse. La moitié des arrivants sont nés à Mayotte, l’autre moitié en métropole (France — NDLR) (24 %), à La Réunion (17 %) ou à l’étranger (13 %). Ce sont principalement des personnes jeunes qui quittent Mayotte pour La Réunion : la moitié ont moins de 18 ans. Ceux qui sont majeurs sont souvent diplômés et viennent vraisemblablement poursuivre leurs études supérieures, occuper un emploi qu’ils ont trouvé ou en rechercher un. Dans le même temps, 1 500 personnes arrivent chaque année à La Réunion depuis l’étranger. Six sur dix sont natifs de l’étranger : 400 de Madagascar, contre seulement quelques dizaines en provenance de Maurice comme des Comores. La moitié de ces nouveaux arrivants ont entre 18 et 34 ans. Après quelques mois à La Réunion, seuls un quart d’entre eux ont un emploi et autant se déclarent au chômage. »
Une goutte d’eau comparée au 10800 migrants venus de France chaque année
Autrement dit, sur 550 personnes venant chaque année de Mayotte à La Réunion entre 2015 et 2019, la moitié ne sont pas originaires de Mayotte, mais sont des Réunionnais de retour, des personnes originaires de France passées par Mayotte, ou des ressortissants d’un autre pays.
En prenant en considération les migrants originaires de l’archipel des Îles Comores, ils étaient donc bien moins de 400 par an en moyenne sur cette période à venir s’installer à La Réunion pour y chercher une vie meilleure.
Ces chiffres soulignent que ce flux migratoire est bien loin d’être un raz-de-marée. C’est une goutte d’eau comparée aux 10800 immigrés qui arrivaient chaque année de France entre 2015 et 2019, dont 7700 de non-natifs. Pourtant, cette « immigration comorienne », et également l’immigration malgache (400 personnes par an), cristallisent les réactions de racisme qui expliquent en partie le vote pour l’extrême droite.
Facteurs structurels favorisant l’émigration des Mahorais à La Réunion
Il est donc grand temps de déployer des moyens pour lutter contre ce racisme, car l’immigration en provenance de Mayotte va augmenter si aucune réforme structurelle n’est menée dans ce pays. En effet, si la population officielle y est passée de 50000 en 1975 à environ 250000 aujourd’hui, elle sera de près de 500000 habitants en 2050, soit 10 fois plus qu’avant la sécession de Mayotte.
Paris a voulu que Mayotte soit un département français. Par conséquent, les Mahorais ont la nationalité française comme les Réunionnais. Mais ils ne bénéficient pas des droits sociaux liés à cette nationalité. L’égalité sociale ne s’y applique pas. Le SMIC est inférieur à celui de La Réunion, les prestations sociales sont également plus faibles, notamment les allocations familiales. L’application à Mayotte du système dit « départementalisation » a les mêmes conséquences négatives qu’à La Réunion : dépendance aux importations, coût de la vie plus cher qu’en France, chômage massif et donc grande pauvreté. A cela s’ajoutent un sous-équipement encore plus important que La Réunion en termes d’infrastructures publiques. L’insécurité est un très grave problème. Le changement climatique et la pression grandissante sur cette ressource sont responsables d’épisodes de pénurie d’eau qui s’aggraveront.
L’apport essentiel des Comoriens à la construction de La Réunion et de son peuple
Si le système ne change pas, alors un doublement de la population de Mayotte au cours de ces 30 prochaines années ne pourra qu’exacerber jusqu’à l’intenable tous ces problèmes.
La Réunion apparaît alors comme la porte de sortie la plus accessible, c’est en effet le département le plus proche de Mayotte. Et à La Réunion, l’égalité sociale a quasiment été réalisée. En tant que citoyen de la République, les Mahorais bénéficient automatiquement des mêmes droits que les habitants de notre île. Ils peuvent donc accéder aux droits, services publics et infrastructures que Paris leur refuse. Mais ils doivent faire face à un racisme inacceptable dans un pays qui ne compte que des descendants d’immigrés.
Tout comme les Malgaches, les Mozambicains, les Chinois, les Indiens et les Français, les Comoriens sont les représentants d’une des civilisations qui ont constitué le peuple réunionnais. Nombre de Réunionnais ont un ancêtre comorien venu dans notre île comme esclave ou engagé. C’est ce que rappellent de nombreux noms de famille à La Réunion. Les Comoriens firent notamment partie des travailleurs qui permirent à notre île de disposer d’un port et d’un chemin de fer. Au même titre que tous les autres immigrés, ils ont construit La Réunion.
Conférence territoriale élargie aux forces vives
Développer l’apprentissage de l’Histoire de La Réunion dès le plus jeune âge est un des moyens de rappeler cette réalité contribuera à éradiquer le racisme. Le levier essentiel est le développement de notre pays. Remplacer la pauvreté par le plein emploi et donner la possibilité à tous les Réunionnais de vivre dignement seront le meilleur antidote contre le racisme. Nul doute qu’au sein des forces vives de La Réunion, des propositions existent pour atteindre ces objectifs. La Conférence territoriale élargie proposée par le PCR est un moyen de concrétiser toutes ces bonnes volontés. Elle a pour but de favoriser la co-construction et arriver à un projet de développement pensé par les Réunionnais, destiné à régler les problèmes spécifiques à notre île avec des mesures qui seront mises en œuvre par les Réunionnais.
M.M.