Démographie : le 21e siècle sera africain -3-

« Nous aurons beaucoup plus de personnes d’origine africaine dans beaucoup plus de pays »

14 juin 2022

Un article de la BBC intitulé « Pourquoi l’avenir de l’humanité pourrait dépendre de l’Afrique » montre comment le continent le plus proche de La Réunion sera le plus dynamique sur le plan démographique. Pendant ce temps, l’Europe va connaître une baisse importante de sa population qui ne pourra être enrayée que grâce à l’immigration.

Embarcation de migrants interceptée par des militaires à Mayotte.

Pour M. Soudan (François Soudan, rédacteur en chef de l’hebdomadaire français Jeune Afrique-NDLR), le fait que l’âge moyen sur le continent africain soit de « 19 ans, contre 42 ans en Europe » entraînera inévitablement un phénomène de migration.
« La seule issue potentielle pour l’Europe, où les retraités seront deux fois plus nombreux que les travailleurs et où les décès seront plus nombreux que les naissances, est de s’appuyer sur un flux constant d’immigration, la plupart des nouveaux arrivants venant du seul continent dont la population est encore en croissance : l’Afrique », déclare-t-il.
Selon les estimations qu’il a citées, pour maintenir sa population aux niveaux actuels, l’Europe doit intégrer « entre 2 et 3 millions d’immigrants » chaque année.
Les données les plus récentes publiées par la Commission européenne montrent que 1,92 million de personnes ont immigré dans les pays de l’Union européenne (UE) en 2020, mais que 960 000 personnes ont émigré, de sorte que l’immigration nette était de 960 000.

« Beaucoup plus de personnes d’origine africaine dans beaucoup plus de pays »

« Sans la migration, la population européenne aurait diminué d’un demi-million en 2019, car 4,2 millions d’enfants sont nés et 4,7 millions de personnes sont décédées dans l’UE », indique clairement le site de données sur la migration de l’UE.
« La réalité est que, dans la pure logique capitaliste, les gouvernements européens devraient encourager l’immigration, si ce n’est courtiser les migrants avec des primes en espèces », souligne Soudan.
Au lieu de cela, dit-il, ils créent « une myriade d’obstacles à l’immigration ».
Selon le livre de Sciubba, aujourd’hui, seuls 2 à 4 % de la population mondiale vivent en dehors de leur pays d’origine, ce qui pourrait changer radicalement à l’avenir. « Au fil du temps, nous aurons beaucoup plus de personnes d’origine africaine dans beaucoup plus de pays », prédit Christopher Murray, directeur de l’IHME et co-auteur de l’étude publiée dans The Lancet.
Mais quel sera l’impact pour l’Afrique d’être la principale source de jeunesse dans un monde de plus en plus vieillissant ?

Abandonner « représentations stéréotypées » et “marginalisation” de l’Afrique

Les experts sont divisés. Certains pensent que, s’il est correctement exploité, le continent le plus négligé du monde pourrait utiliser son avantage sur les pays dont la population est en déclin pour renforcer sa puissance économique et géopolitique.
À cet égard, ils citent la forte augmentation des investissements de la Chine sur le continent africain, avec la construction de ports, d’aéroports, de routes et d’écoles, entre autres infrastructures.
« Le simple poids des chiffres (de la population) doit provoquer une réinvention des pays africains et de leurs populations », déclare Edward Paice, directeur de l’Africa Research Institute et auteur du livre « Youthquake : Why African demography should matter to the world ».
Dans une tribune publiée en janvier dans le journal britannique Guardian, M. Paice a exhorté la communauté internationale à abandonner ses « représentations stéréotypées » et sa “marginalisation” de l’Afrique.
Il a prévu que l’importance démographique du continent « affectera la géopolitique, le commerce mondial, le développement technologique, l’avenir des religions dominantes du monde, les modèles de migration… presque tous les aspects de la vie ».
D’un autre côté, les plus pessimistes préviennent que sans davantage d’éducation, de développement et, surtout, de création massive d’emplois, la croissance démographique exponentielle de l’Afrique pourrait entraîner une aggravation du chômage, de la pauvreté, des conflits et de la radicalisation religieuse.

La responsabilité des dirigeants

L’un des points de vue les plus alarmistes est celui de Malcolm Potts, professeur à l’école de santé publique de l’université de Californie, qui a prédit en 2013 que la région connue sous le nom de Sahel, la partie nord de l’Afrique subsaharienne, « pourrait devenir la première partie de la planète Terre à souffrir d’une famine à grande échelle et d’une augmentation des conflits, car une population humaine croissante dépasse les ressources naturelles en diminution ».
Pour le Soudan, en fin de compte, le sort de l’Afrique dépendra largement de ce que les dirigeants africains font aujourd’hui.
« Si l’Afrique veut conserver ses citoyens dynamiques, audacieux et créatifs – c’est-à-dire ceux qui sont les plus susceptibles de s’aventurer sur la voie risquée de l’émigration – et récolter les fruits de son dividende démographique en dehors du discours politique, le continent doit mettre l’accent sur l’éducation, les programmes de formation professionnelle et les politiques de création d’emplois tournées vers l’avenir, ainsi que sur un meilleur planning familial », conclut-il.

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