Le rapport du Millénaire dans les mains de Kofi Annan

Que vont faire les pays riches ?

18 janvier 2005

Le secrétaire général des Nations Unies s’est vu remettre hier un rapport contenant des recommandations qui définissent une stratégie d’une ampleur sans précédent pour lutter à l’échelle mondiale contre la pauvreté, la faim et la maladie.

(Page 9)

Intitulé "Investir dans le développement : plan pratique pour réaliser les Objectifs du Millénaire pour le développement", le rapport du Millénaire a été remis hier à Kofi Annan. Ce rapport présente des propositions efficaces - par rapport au coût - qui permettraient de réduire de moitié la pauvreté extrême et d’améliorer radicalement les conditions de vie d’au moins un milliard d’habitants des pays en développement d’ici 2015.
Ces propositions ont été émises par une équipe de 265 des meilleurs experts mondiaux. Elles ont été commanditées en 2002 par le secrétaire général de l’ONU pour élaborer un plan d’action concret qui permettrait à la planète d’inverser le fléau de la pauvreté, de la faim et de la maladie qui frappent des milliards de personnes.
Le Projet Objectifs du Millénaire collabore avec les pays en développement pour déterminer le nombre de mères qui doivent avoir accès à des dispensaires ; le nombre d’enfants ayant besoin de vaccinations ; le nombre d’enseignants dont chaque circonscription a besoin ; le nombre de routes à construire, le nombre de pompes à eau à installer, etc., pour que les différents pays soient sur la bonne voie pour atteindre les objectifs en 2015.

Un monde d’insécurité

Il est encore temps de réaliser les objectifs du Millénaire pour le développement. Même dans les pays les plus pauvres, il est possible d’atteindre les objectifs d’ici à 2015. Toutefois, le créneau se referme et 2005 doit être l’année d’une grande avancée des politiques mondiales pour que les pays les plus pauvres s’engagent sur la voie de la réalisation des objectifs.
Plus d’un milliard de personnes, soit un sixième de la population mondiale, vivent dans la pauvreté extrême, sans eau salubre, alimentation adéquate, soins de santé de base et services sociaux indispensables à leur survie.
Cela signifie qu’une simple maladie, une grossesse inopportune, une sécheresse ou la destruction des récoltes par des parasites peut signifier un arrêt de mort. Dans nombre des pays les plus pauvres, l’espérance de vie est la moitié de celle des pays à revenu élevé, soit 40 ans au lieu de 80.
Les répercussions de cette pauvreté dépassent largement les sociétés touchées. La pauvreté, les inégalités et la maladie sont les principales causes de conflits violents, de guerre civile et d’effondrement d’État. Un monde qui connaît la pauvreté extrême est un monde d’insécurité.

Augmenter l’aide publique au développement

Si, en 2005, le monde entier adopte et applique un plan de réalisation des objectifs, nous pourrons enregistrer en 2015 des succès sans précédent dans la réduction de la pauvreté, de la maladie, de la faim et de la discrimination dans les pays les plus pauvres. Ainsi, non seulement nous sauverons des dizaines de millions de vies, mais aussi nous aiderons la planète à réaliser la paix et la sécurité auxquelles elle aspire tant.
Toutefois, pour que les objectifs du Millénaire pour le développement puissent être réalisés, il faut que les pays donateurs respectent leur part du contrat mondial.
L’une des cibles spécifiques des objectifs est un partenariat mondial pour le développement précisant l’action que doivent mener les pays les plus riches pour financer la lutte contre la pauvreté dans le monde en développement. La réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement exigera une augmentation marquée de l’aide publique au développement.


En bref

Les visages de la pauvreté

Plus d’un milliard d’habitants de la planète vivent de moins de un dollar par jour et 2,7 milliards d’autres s’efforcent de survivre avec moins de deux dollars par jour. Toutefois, la pauvreté dans le monde en développement va bien au-delà de la pauvreté monétaire. Elle signifie devoir marcher plus de deux kilomètres tous les jours, puiser de l’eau et ramasser du bois de chauffe ; elle signifie être victime de maladies éliminées depuis des décennies dans les pays riches.
Chaque année, 11 millions d’enfants meurent - pour la plupart âgés de moins de 5 ans et, pour plus de six millions, de maladies parfaitement
évitables
comme le paludisme, la diarrhée et la pneumonie.
Dans certains pays parmi les plus pauvres, moins de la moitié de enfants fréquentent l’école primaire et moins de 20% l’école secondaire. Au niveau planétaire, 114 millions d’enfants au total ne reçoivent même pas un enseignement élémentaire et 584 millions de femmes sont illettrées.
Voici les faits de base décrivant les causes profondes et les manifestations de la pauvreté qui frappent plus d’un être humain sur trois.

o Santé

Six millions d’enfants meurent chaque année de malnutrition avant d’atteindre leur cinquième anniversaire.

- Plus de 50% des Africains souffrent de maladies d’origine hydrique comme le choléra et la diarrhée infantile.

- Le VIH/SIDA tue chaque jour 6.000 personnes et en infecte 8.200 autres.

- Toutes les 30 secondes, un enfant africain meurt de paludisme, soit plus d’un million par an.

- Chaque année, entre 300 et 500 millions de personnes sont atteintes de paludisme. Environ trois millions en meurent.

- La tuberculose est la principale maladie mortelle associée au sida et dans certaines régions d’Afrique, 75% des personnes vivant avec le VIH ont également la tuberculose.

o Faim

- Plus de 800 millions de personnes, dont 300 millions d’enfants, se couchent le soir le ventre vide.

- Sur ces 300 millions d’enfants, 8% seulement sont des victimes de la famine ou d’autres situations de crise. Plus de 90% souffrent de malnutrition chronique et de carence en oligo-éléments.

Toutes les 3,6 secondes, une autre personne meurt de faim et il s’agit dans la grande majorité des cas d’enfants de moins de 5 ans.

o Eau

- Plus de 2,6 milliards de personnes, soit plus de 40 % de la population mondiale, ne disposent pas de services d’assainissement de base et plus de un milliard de personnes n’ont toujours pas accès à de

Quatre habitants de la planète sur dix n’ont pas accès à de simples latrines.

Cinq millions de personnes, essentiellement des enfants, meurent chaque année de maladies d’origine hydrique.

o Agriculture

- En 1960, l’Afrique était exportateur net de vivres ; aujourd’hui, le continent importe un tiers de ses céréales.

Plus de 40% des Africains n’ont même pas la possibilité d’obtenir suffisamment de vivres de manière régulière.

- La baisse de la fertilité des sols, la détérioration des terres et la pandémie du SIDA ont entraîné une réduction de 23% de la production vivrière par habitant au cours des 25 dernières années, bien que la population ait considérablement augmenté.

- L’agriculteur africain paye les engrais traditionnels deux à six fois plus cher que les prix pratiqués sur les marchés mondiaux.

o L’effet dévastateur de la pauvreté sur les femmes

- Plus de 80% des agriculteurs africains sont des femmes.

- Plus de 40% des femmes africaines n’ont pas accès à l’enseignement de base.

- Six années d’enseignement ou plus signifient pour une femme adulte une amélioration spectaculaire et systématique des soins prénatals et postnatals et des taux de survie à l’accouchement.

- Les mères éduquées font vacciner leurs enfants plus souvent que les autres, à raison de 50% de plus.

- Le SIDA se propage deux fois plus rapidement parmi les jeunes filles non éduquées que parmi les autres.

- Le taux de survie des enfants d’une femme qui a fréquenté l’école primaire pendant cinq ans est de 40% supérieur à celui des enfants des femmes non éduquées.

- Les femmes qui vivent en Afrique subsaharienne ont 1 chance sur 16 de mourir pendant leur grossesse ou pendant l’accouchement. À titre de comparaison, les risques sont de 1 sur 3.700 en Amérique du Nord.

Toutes les minutes, une femme meurt pendant la grossesse ou l’accouchement, et au total, 1.400 femmes meurent chaque jour - quelque 529.000 par an - de causes liées à la grossesse.

Près de la moitié des enfants des pays en développement naissent sans l’aide d’une accoucheuse qualifiée.


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus