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par le Dr Raymond Vergès

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Quel avenir pour le développement durable ?

Quatre tables rondes pour anticiper les suites de la conférence

lundi 2 juillet 2012


Quatre tables rondes de haut niveau se sont déroulées du 20 au 22 juin au Rio Centro, le site de la Conférence des Nations unies sur le développement durable, dans la cité brésilienne. Elles ont, chacune, réuni plus d’une quarantaine de chefs d’État, chefs de gouvernement, ministres ou responsables d’organisations intergouvernementales, d’entités du système des Nations unies et de la société civile qui ont, d’ores et déjà, débattu de « l’après-Rio+20 ».


Organisées parallèlement au débat général de la Conférence des Nations unies sur le développement durable et, quelque peu, plus à l’écart de l’agitation médiatique, l’objectif de ces tables rondes était de réfléchir, pendant les travaux de la Conférence, à « l’après-Rio+20 » en anticipant les difficultés qui se présenteront dans la mise en œuvre des résultats escomptés dans quatre domaines clefs.
Ceux-ci concernaient les objectifs de développement durable ; l’économie verte, la question du développement durable et l’élimination de la pauvreté ; le dispositif institutionnel du développement durable ; les ressources financières, la technologie et le renforcement des capacités.
Ces échanges, qui ont été coprésidés au plus haut niveau par des chefs d’État, dont le Prince Albert II de Monaco ; des chefs de gouvernement, dont le Premier ministre d’Antigua-et-Barbuda, M. Winston Baldwin Spencer, ou des ministres comme Mme María Ignacia Benítez, en charge de l’Environnement au Chili, visaient à offrir un « regard prospectif sur la mise en œuvre des résultats de la Conférence ».
« La question essentielle que nous devons nous poser est la suivante : lorsque nous rentrerons dans nos capitales, quel effet les résultats de la Conférence auront-ils sur les mesures prises à tous les niveaux ? Comment parviendrons-nous à tourner le dos définitivement à l’idée que la vie continue telle qu’auparavant ? », pouvait-on lire dans la note d’information préparée à l’intention de ces tables rondes.

Objectifs de développement durable

Cette première table ronde, organisée dans l’après-midi du 20 juin et coprésidée par le Prince Albert II de Monaco et le Président du Mozambique, M. Armando Emílio Guebuza, était axée sur les objectifs du développement durable, destinés à compléter les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), adoptés à New York lors du Sommet de 2000.

Comment faut-il définir ces objectifs pour qu’à la fois ils soient acceptés universellement et que les pays y adhèrent individuellement parce qu’ils se rattachent à leurs propres priorités ? Cette question a été au cœur des échanges, plusieurs chefs d’État ou de gouvernement appelant à renouveler de manière urgente et forte les engagements pris à Rio, en 1992, lors du Sommet Planète Terre.

Parmi ceux-ci, le ministre de l’Énergie, des Mines, de l’Eau et de l’Environnement du Maroc, M. Fouad Douiri, a mis l’accent sur le transfert de technologies à des coûts abordables. De même que la Représentante personnelle du Roi de la Thaïlande, la Princesse Chulabhorn Mahidol, qui a annoncé la volonté de son pays de mettre en place un centre de coopération régionale dans ce domaine.

Plusieurs intervenants, à l’instar du Président du Tadjikistan, M. Emomali Rahmon, ont souhaité que les objectifs du développement durable soient concrets et transparents, qu’ils se concentrent sur les femmes et les enfants, et qu’ils accordent une place prioritaire aux ressources naturelles, en particulier aux ressources vitales en eau.

L’année 2013 a été proclamée par l’Assemblée générale de l’ONU « Année internationale de la coopération dans le domaine de l’eau », à l’initiative du Tadjikistan, a-t-il rappelé, en invitant les pays à saisir cette occasion de sensibilisation.

La présidente de l’ONG internationale Fonds mondial pour la nature (WWF), Mme Yolanda Kakabadse, a suggéré différentes mesures pour préserver les forêts du globe dans le respect des droits des populations autochtones ; tandis que le patron de la compagnie sud-africaine d’électricité Eskom, M. Brian Dames, a souligné le caractère essentiel des énergies durables.

De son côté, le ministre de la Coopération internationale de la Norvège a appelé à garantir l’accès à l’énergie à 1,3 milliard de personnes qui en sont encore privées. Plusieurs pays, dont les Émirats arabes unis et la Zambie, ont réaffirmé l’importance de l’énergie pour le développement durable et se sont prononcés en faveur de l’initiative “Énergie durable pour tous” de l’ONU.

Économie verte et question du développement durable et de l’élimination de la pauvreté

De quelles capacités et de quelle aide les gouvernements auront-ils besoin pour élaborer et mettre en œuvre des politiques économiques vertes répondant à leur situation et à leurs priorités particulières ? Et de quelle manière la communauté internationale peut-elle le mieux appuyer les pays qui s’efforcent de mettre au point et d’appliquer des politiques économiques vertes ?

Avant de tenter de répondre à ces questions, plusieurs participants à cette seconde table ronde, organisée le 21 juin au matin, ont rappelé que la notion d’« économie verte » n’avait pas encore été définie et qu’il existait, à la lecture du projet de document final, des divergences entre les pays concernant les conséquences de l’économie verte sur le développement durable.

Le ministre de l’Environnement du Soudan, M. Hassan Abdel Qader Hilal, a tenu à réaffirmer, au nom des pays arabes, le droit des peuples sous occupation à jouir du développement durable.

Un certain nombre de pays en développement, de petits États insulaires en développement (PEID) et de pays arabes, dont l’Égypte, ont ensuite insisté sur la nécessité de fournir à ces pays une assistance dans la transition vers l’économie verte, notamment à travers l’Aide publique au développement (APD) et également par le biais d’initiatives dans le domaine de la propriété intellectuelle ou de l’appui à la recherche, par exemple. Ils ont aussi appelé à ce que la transition vers l’économie verte ne soit pas synonyme de nouvelles obligations pour ces pays ou de frein à leur accès aux marchés des pays industrialisés.

« La transition vers l’économie verte va exiger des investissements considérables », a prévenu le Premier ministre de la Barbade, M. Freundel Stuart, dont le gouvernement s’est engagé à créer un Centre des innovations et des technologies et à mettre en place un régime fiscal et budgétaire propice à cette transition.

M. Jeffrey Sachs, professeur à l’Université Columbia et Rapporteur du Dialogue sur le développement durable, organisé par le gouvernement brésilien en marge de la Conférence, a invité les pays à promouvoir des réformes fiscales encourageant la protection de l’environnement. Il a abordé la question d’une taxe modeste sur le carbone et d’autres substances nocives pour l’environnement et a noté que l’idée d’une taxe sur les transactions financières faisait son chemin, sauf à Wall Street ou dans le Centre de la finance à Londres.

Au nom de l’un des neuf « grands groupes » identifiés en 1992 lors du Sommet de la Terre, M. Johan Rockström, de l’Institut de l’Environnement de Stockholm, a souligné que la communauté scientifique et technique reconnaissait sa responsabilité dans la transition vers l’économie verte et qu’elle pourrait aider celle-ci à travers des recherches orientées vers des résultats et l’action.

L’économie verte créera de nouveaux emplois et modifiera favorablement la qualité des emplois, a soutenu le Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT), M. Juan Somavía.

Tandis qu’au nom du groupe des agriculteurs, M. Ron Bonnett, de la Fédération canadienne de l’agriculture, a rappelé la nécessité de veiller à ce que l’aide cible efficacement les fermiers des pays en développement. Il a plaidé pour des stratégies de durabilité à long terme impliquant différents ministères, comme ceux de la Santé, du Transport et de l’Agriculture.

Dispositif institutionnel du développement durable

Le 21 juin dans l’après-midi, les débats — coprésidés par les Présidentes Dalia Grybauskaitė, de la Lituanie, et Laura Chinchilla Miranda, du Costa Rica — ont été axés sur la mise en œuvre et le suivi des engagements politiques. Plusieurs intervenants ont appelé à la mise en place d’un cadre institutionnel fort, en particulier après 2015, date butoir pour la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD).

Comment aider un nouvel organe intergouvernemental de développement durable à obtenir, à un niveau élevé de prise de décisions, une participation active et un suivi des résultats de la Conférence ? Et comment le renforcement du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), l’un des résultats attendus de la Conférence, peut-il être réalisé ?

Plusieurs intervenants ont plaidé en faveur d’une transformation du PNUE en une agence spécialisée des Nations unies, tandis que d’autres ont déploré le fait que le projet de document final de Rio+20 n’ait pas été, selon eux, « plus ambitieux » à ce sujet et n’ait pas répondu aux attentes de la société civile et des « grands groupes » à cet égard.

Plusieurs hauts responsables de pays moins avancés (PMA) et de petits États insulaires ont rappelé leurs besoins en matière de financements et de technologie dans le cadre des dispositifs institutionnels de développement durable, tandis que la directrice exécutive d’ONU-Femmes, l’entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, a appelé à la prise en compte des difficultés de celles-ci en matière d’accès à l’eau, à l’agriculture et à l’assainissement dans l’élaboration des dispositifs.

Ressources financières, technologie et renforcement des capacités

Cette dernière table ronde, qui se tenait le vendredi 22 juin au matin, a été l’occasion, pour les hauts dignitaires des petits États insulaires en développement, de mettre l’accent sur les défis particuliers auxquels ils devront faire face sans transfert de technologies et/ou de renforcement adéquat de leurs capacités nationales.

Les intervenants ont aussi eu, une nouvelle fois, l’occasion d’entendre deux rapporteures du Dialogue sur le développement durable organisé avec la société civile.

Mmes Gro Harlem Brundtland, ancien Premier ministre de la Norvège, et Nawal Al-Hosany, Directrice en charge de la Durabilité pour l’organisation MASDAR, ont ainsi expliqué les attentes en termes de création d’emplois pour les jeunes et les femmes, d’éducation et d’accès à l’eau, à la propriété foncière, ainsi qu’aux énergies durables. L’attention des participants a également été attirée sur les exigences en matière de planification urbaine. Elles ont ainsi, au nom de la société civile, appelé les dirigeants mondiaux à identifier des initiatives environnementales et écologiques novatrices pour les villes et leur population.

Outre les personnes citées, de nombreux autres chefs d’État, chefs de gouvernement, ministres et chefs de délégations ont pris la parole au cours de ces tables rondes. Elles ont aussi pu compter, entre autres, sur la présence des hauts responsables du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme, du Programme des Nations unies pour les établissements humains (UN-Habitat), de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), du Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF), du Programme alimentaire mondial (PAM), de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), du Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP), de l’Organisation maritime internationale, de l’Organisation météorologique mondiale, de l’Université des Nations unies, de la Banque africaine de développement, ainsi que de la Commission économique des Nations unies pour l’Asie et le Pacifique.

Pour les « grands groupes », les participants ont également entendu les représentants du groupe des travailleurs et syndicats ; des peuples autochtones ; des enfants et des jeunes ; des entreprises et de l’industrie ; des autorités locales ; des femmes ; ainsi que des organisations non gouvernementales. Plusieurs d’entre eux ont mis l’accent sur la participation exceptionnelle de la société civile à la Conférence Rio+20.


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