Aminata Traoré et le Forum social mondial de Bamako

’Réaliser que les résistances sont possibles’

21 janvier 2006

Dans son édition de jeudi, “Libération” a publié un entretien avec l’ancienne ministre de la Culture du Mali, Aminata Traoré. Rappelons que Aminata Traoré est membre du comité d’organisation du Forum social mondial de Bamako. Nous reproduisons ci-après cet entretien paru dans les colonnes de notre confrère.

“Libération” : L’idée d’un Forum social mondial éclaté ne risque-t-elle pas d’entraîner une dilution de l’impact des propositions altermondialistes ?

Aminata Traoré : Non. Cela permet d’éveiller les consciences sur plusieurs continents en même temps. Non pas parce qu’il y aurait un altermondialisme africain, mais parce que chaque continent doit puiser dans son histoire, sa mémoire, pour y trouver un levain propre à enrayer “notre mal en dedans”. Entre les forums, les efforts des mouvements sociaux ou des ONG sont parfois teintés de suspicion, souvent réprimés dans les pays non démocratiques. Les pouvoirs nous considèrent comme des empêcheurs de mondialiser en rond. L’effet de masse d’un FSM permet de réaliser que les questionnements sont permis, les résistances possibles. Et dire ce que nos dirigeants ne peuvent pas ou ne veulent pas exprimer à leurs maîtres du Nord.

“Libération” : Même si les résultats, on l’a vu au Sommet de l’OMC de Hongkong, sont très maigres ?

- Peut-être, mais au moins nous écoute-t-on. On pèse davantage sur les décideurs car on a plus de crédits que si l’on se mobilisait seul dans son coin. Avant, les ministres vous détestaient cordialement lorsque vous disiez qu’ils avaient approuvé des décisions de l’Organisation mondiale du commerce qui allaient à l’encontre de leur peuple. Désormais, on a introduit du doute dans ces certitudes. En dépit de nos divergences, ils ne récitent plus la leçon d’une “mondialisation incontournable et irréversible”. Ils s’interrogent, même s’ils ne franchissent pas encore le pas en s’intéressant vraiment aux alternatives que l’on propose...

“Libération” : Les thématiques brassées lors des FSM refont le monde de A à Z. Ne vaudrait-il pas mieux cibler des thèmes spécifiques ou mettre en avant ce qui marche pour sortir de l’“afropessimisme” ?

- L’un n’empêche pas l’autre. Regardez ce qui s’est passé depuis Porto Alegre 2005 : la prétendue annulation de la dette par le G8 de Gleneagles, le mirage de la fin des subventions agricoles à Hongkong, la crise des migrations avec le drame de Ceuta et Melilla, les révoltes dans les banlieues en France.
On ne peut pas faire l’impasse de discuter de façon critique sur cette marche du monde. Et puis le rôle du FSM, c’est de lier les sujets. La Banque mondiale ne fait pas autre chose : elle parle de tout, de l’excision au pétrole, en passant par l’eau et la gouvernance. Nous, société civile, avons le devoir de diversifier nos contrechamps pour embarquer le maximum de gens dans la lutte pour une Afrique qui n’est pas victime d’elle-même.

(Source : “Libération”)


Lancement de la campagne 2006 "Contrôlons les armes"

Trois ONG, à savoir Oxfam International, Amnesty International et le Réseau d’action International sur les armes légères (IANSA), ont lancé jeudi à Bamako, en marge du Forum social mondial, la campagne 2006 "Contrôlons les armes".
La campagne, grâce à l’appui de certains pays comme le Mali, le Ghana et le Sénégal, a déjà amené 40 pays du continent à officialiser leur soutien pour la mise en place d’un instrument juridique contraignant tel un traité sur le commerce des armes au niveau des Nations-Unies.
En Afrique de l’Ouest, la campagne œuvre pour la transformation du moratoire de la CEDEAO en date de 1998 en Convention.
Pour promouvoir la signature d’un traité sur le commerce des armes, la campagne "Contrôlons les armes" a procédé au lancement d’imprimés et de spots radio et télé animés par quelques-unes des grandes célébrités de la musique africaine, telles Tiken Jah Fakoly (Côte d’Ivoire), Oumar Pene (Sénégal).
Ces spots télé et radio, indiquent les initiateurs, seront mis gratuitement à la disposition des médias.
Selon les auteurs de la campagne, plus de 8 millions d’armes légères circulent librement en Afrique de l’Ouest. Chaque année, plus de 8 millions de nouvelles armes sont introduites dans le marché mondial.


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