Lutte contre la mondialisation capitaliste

Un appel à davantage de responsabilités pour une autre mondialisation

Plus de 200.000 participants au rassemblement du Larzac

11 août 2003

De vendredi à dimanche, le rassemblement sur le plateau du Larzac a rencontré un succès qui a dépassé les prévisions les plus optimistes des organisateurs. Plus de 200.000 personnes étaient déjà présentes samedi, obligeant la fermeture du site à tout nouvel arrivant. Hier, toute la presse s’est fait l’écho de cette manifestation, même le ’New-York Times’ a titré sur cet événement, qualifié de « Woodstock antimondialisation ». L’ampleur inattendue du nombre de participants, la diversité des pays représentés, les sujets abordés lors des débats qui se sont succédés pendant trois journées : l’idée d’une alternative à la mondialisation libérale est un sentiment partagé par un nombre croissant de citoyens. Le meeting de clôture de Larzac 2003 s’est tenu hier midi. Compte rendu publié sur le site ’Indymedia’ que nous reproduisons ci-après.

Plusieurs milliers de personnes se sont retrouvées pour le meeting de clôture de Larzac 2003. Il faisait très chaud sur la grande scène du Larzac. Les lances à incendie des pompiers ont pu rafraîchir les participants. les bouteilles d’eau distribuées furent aussi les bienvenues. Le bilan des organisateurs est positif car 350.000 personnes se seraient retrouvées ici, pour un nouveau Larzac plus que d’actualité
Plusieurs orateurs et oratrices se sont exprimés. La première intervention rappelait les luttes du Larzac de 1973 contre l’extension du camp militaire. Un paysan déjà présent en 1973 chanta le Larzac qui luttait à cette époque : « des moutons pas des canons, jamais nous ne partirons, Debré ou de force, nous garderons le Larzac ». Puis intervinrent José Bové, Annick Coupé (pour monde solidaire), et Christine Tellen pour parler de la solidarité locale.

Un débat public sur l’OMC

José Bové, pour la Confédération paysanne, intervint pour dire que les luttes du Larzac sont vivantes, on est passé du "Gardarem Lou Larzac", au "Gardarem lou le monde". L’OMC (Organisation mondiale du commerce) veut diriger nos vies et il faut faire pression sur les gouvernants pour qu’ils ne signent pas les accords. Il faut faire échouer ce sommet qui, s’il passe, appauvrira et détruira de nombreux paysans. Il faut défendre les paysans, pour qu’ils puissent vivre du produit de leur terre.
L’AGCS menace tous les services (eau, culture, santé...), et renforcera le poids démesurés des multinationales. Nous devons refuser les brevets sur le vivant, sur les médicaments, pour défendre un libre accès à l’eau, à la santé pour tous... L’Europe veut aussi lever le moratoire sur les OGM, et donc nous devons poursuivre la désobéissance. L’Europe va discuter sur les brevets des logiciels. il faut dire non, et affirmé notre refus de la dictature de Microsoft. Nous devons demander un débat public sur la position du gouvernement sur ce qu’il fera a Cancun. Nous demandons des comptes à ceux qui signeront les accords qui pourrissent nos vies. C’est nous qui fixons les termes du débat. Nous devons obliger les politiques à accepter le débat. Plusieurs procès vont avoir lieux pour l’affaire de Fumel, ou l’arrachage d’OGM. Il faut transformer chaque procès en tribunaux des droits à la désobéissance et à la résistance. « C’est parce que nous sommes les plus faibles que nous allons gagner ». Enfin, José Bové a indiqué qu’il n’était pas le porte-parole du mouvement social. Il en est un parmi d’autres. Chaque personne est son propre porte-parole, lui étant celui de la Confédération paysanne. Il a rappelé qu’il ne serait pas candidat aux élections, jamais. Ceux qui véhiculent ces rumeurs ne croient pas au mouvement social autonome.

« Ils sont huit, nous sommes des milliards »

Annick Coupé pour Monde solidaire : « il faut articuler les luttes et le Larzac est un moyen pour cela. Les combats qui nous attendent sont nombreux ( RMA, Secu...) surtout face à un gouvernement intransigeant. C’est ici que nous construisons des alternatives au capitalisme et au libéralisme. Les combats pour l’égalité des droits et le partage des richesses va se poursuivre ».
Christine Tellen : « La solidarité au Larzac pour l’organisation de ce Larzac 2003 est énorme. Il faut poursuivre cette dynamique. Tous les Causses du Larzac s’y sont mis. Il faut partager les richesses, et il y en a pour tous. Nous construisons un monde solidaire ou tout le monde a sa place. Nous sommes le pouvoir. Ils sont huit, nous sommes des milliards pour reprendre le slogan de Gênes. C’est à nous de décider ce que nous voulons, c’est à nous diriger nos vies, pas aux multinationales ».

"Culture et mondialisation" en débat à Larzac 2003
La culture vit plusieurs changements importants en ce moment. Les intermittents luttent pour qu’une grande partie de leurs camarades puissent encore avoir le droit de travailler dignement. Et à plus long terme se pose la question de l’avenir de la diversité culturelle dans un contexte de mondialisation libérale. Le débat était animé par plusieurs intervenants : Jean Ferrat, Pascal Thomas, Jack Ralite et la dirigeante d’une maison d’édition indépendante, "Au Diable Vauvert" . Cette conférence initiée par les Amis de l’Humanité se réclame de l’héritage de Jean Jaurès, enfant du Larzac, dans sa lutte en tant qu’intellectuel contre le capitalisme, la guerre et pour l’émancipation ouvrière. Ses principaux intervenants ont appelé à une lutte pour la promotion de la diversité ou exception culturelle au niveau de l’édition, au niveau de la chanson, du cinéma, de la culture en général.

Jean Ferrat par exemple rappelle qu’actuellement il y a de plus en plus d’artistes exceptionnels de part leur talent qui abandonnent l’idée de se produire par le biais de médias officiels telles la télévision et les radios, la culture n’ayant pas la diffusion qu’elle mérite. Il rappelle que, selon un article du "Figaro Entreprise" de janvier 2003, certains artistes ont bénéficié d’une diffusion s’apparentant plus à matraquage qu’à une promotion. Il ne s’agit pas de mettre en accusation les artistes bénéficiant de ce système, mais de dénoncer le peu de cas que les grands éditeurs de disque ("majors")font de talents originaux. Cela met en cause ainsi l’existence de la liberté d’expression d’une grande majorité d’artistes, ignorés par le public car non promus par les "majors" au nom de la libre entreprise.

Pascal Thomas, au nom des cinéastes, exprime le même regret quant au non-respect de la diversité culturelle par les responsables des chaînes de télévision. Ces dernières sont les principaux producteurs des films actuels. Pascal Thomas rappelle que dans les débuts du cinéma, des artistes comme Charlie Chaplin bénéficiaient de crédits sans condition de la part des banques, sans aucun contrôle sur la rentabilité de ses films. De même, le vicomte de Noailles finança "l’Age d’Or" de Bunuel sans connaître le sujet du film. Actuellement 75% des décodeurs ont comme but principal de faire de l’audimat et d’assurer un "prime time", c’est à dire un passage aux heures où la télévision est la plus regardée. Et Jean Ferrat de conclure citant un auteur de littérature « celui qui construit des prisons s’exprime moins bien que celui qui bâtit la liberté ».

Pour Jack Ralite, « il faut avoir l’audace et l’opiniâtreté d’imposer au public ce qu’il ne sait pas qu’il désire ». Il rappelle que le combat des intermittents est la partie émergée de l’Iceberg qui cache les autres atteintes à la culture comme celles qu’ont dû subir ces derniers mois les architectes, les archéologues... Il en appelle à la solidarité vis-à-vis des exigences de l’art, véritable expression de la liberté. Jack Ralite estime que le gouvernement Raffarin a comme projet de transférer une partie du pouvoir législatif et exécutif à des corporations sous forme d’accords sociaux. L’accord de l’AGCS participe de cette logique néolibérale.
Malheureusement il y a une évolution sensible de la relation entre le pouvoir et les artistes. Ce mariage cruel que dénonçait hier Jean Villard a pour effet de remplacer en matière d’art le mot liberté par gestion. Jack Ralite souhaite défendre l’exception culturelle, concept qui montre que le profit n’a pas à légiférer dans l’art. Cette exception est en danger internationalement, malmenée aussi bien par les États-Unis que par les États européens.

Dernier exemple en date, le Conseil d’État en France a rendu un arrêt qui admet l’émission de variété "Popstar" comme une œuvre de création. À ce titre elle aura droit aux aides distribuées par le Fond de soutien des oeuvres de Cinéma, organisation créée aux lendemains de la seconde guerre mondiale pour aider les artistes cinéastes.


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