Vote aujourd’hui à l’Assemblée nationale

Changement de statut d’EDF : conséquences pour La Réunion

29 juin 2004

Les agents d’EDF et de GDF restent mobilisé. Leur intersyndicale appelle à une journée d’actions aujourd’hui à l’occasion du vote à l’Assemblée du projet de loi modifiant le statut des deux entreprises. Quelles peuvent être à La Réunion les conséquences du texte gouvernemental ? Le point de vue de Max Banon, de la CGTR-EDF.

Aujourd’hui, les députés ont à se prononcer sur un texte qui vise à changer le statut de l’entreprise publique d’électricité. Ce texte est présenté par le gouvernement. Jusqu’à présent, EDF est un EPIC (établissement public à caractère industriel et commercial). Dans un EPIC, tout bénéfice doit être réinvesti dans l’entreprise, dans l’amélioration de l’outil, dans des embauches ou alors dans des baisses de tarifs qui bénéficient à l’usager. La loi du gouvernement veut transformer EDF en société anonyme, avec par conséquent des actionnaires qui recherchent le profit par des bénéfices les plus importants possibles.
Ce nouveau statut, s’il est adopté, peut signifier "la fin de la péréquation tarifaire", souligne Max Banon, de la CGTR-EDF. La péréquation fait que tout le monde paie le même prix, quelque soit le lieux où il habite. Ceci peut être remis en cause avec des actionnaires privés. En ce qui concerne La Réunion, une telle remise en cause nous affecterait encore plus gravement qu’ailleurs. En effet, dans notre île, la moitié de la production est assurée par des opérateurs privés. À ces derniers, EDF rachète l’électricité produite plus cher qu’elle ne la revend aux usagers, la différence est couverte par un fonds de compensation qui existe au nom de la péréquation tarifaire. Si cette dernière est remise en cause, que se passera-t-il avec 80% de micro-entreprise et environ 40% de chômeurs ?
Autre sujet d’inquiétude spécifique à notre île : le facteur climatique. La Réunion est souvent touchée par des cyclones. Ces derniers endommagent souvent le réseau électrique. Jusqu’à aujourd’hui, les réparations sont payées par EDF. "Des actionnaires privés voudront-ils assumer cette responsabilité ?", interroge Max Banon. Du fait du changement climatique, ce facteur sera encore plus présent, les cyclones risquent en effet d’être plus nombreux et plus violents.
Quant aux affirmations du gouvernement indiquant qu’EDF ne sera jamais au mains du privé, les précédents de Renault et de France Télécom sont là pour les démentir. "Le jeu comptable peut faire basculer vers le déficit et alors provoquer une ouverture plus importante du capital vers le privé", précise le syndicaliste pour qui accorder déjà une partie du capital, "c’est faire entrer le loup dans la bergerie".
L’urgence, "c’est la suspension du vote pour consulter la population par un référendum", insiste Max Banon. "Nous demandons à tous les élus réunionnais de bien s’informer sur les conséquences de l’ouverture du capital d’EDF et de se positionner", poursuit-il, "notre devoir, c’est laisser à nos enfants un service public de qualité". "Au nom du libéralisme, on est en train de tout casser, déplore-t-il, avant d’ajouter qu’"on peut craindre un retour 50 ans en arrière, c’est totalement incompatible avec le développement durable".

M.M.


An plis ke sa

La privatisation d’EDF : nouvelle attaque contre les plus démunis...
En tant que service public, EDF a mis en place une Commission solidarité afin de préserver les usagers les plus démunis des coupures d’électricité. Car, précise Max Banon, "EDF ne coupe plus, il baisse la puissance". Dans un communiqué diffusé le 18 juin dernier, la direction régionale indiquait que 7.302 usagers "ont bénéficié du service maintien de l’énergie, leur garantissant le maintien d’un minimum d’électricité dans l’attente de la régularisation de leurs impayés". Par ailleurs, "EDF a apporté une contribution de 230.000 euros au “Fonds solidarité énergie” (budget total 497.000 euros). La commission mise en place par cette convention a, pour l’exercice 2003, attribué 1.674 aides pour un montant de 300.000 euros".
Mais tout ceci sera remis en cause en cas de privatisation. Dans ce cadre, le message est clair : pas d’argent, pas d’électricité. Dans plusieurs pays qui ont cédé au libéralisme, les compteurs sont d’un type différents, ils ne fonctionnent que si l’on y introduit une carte prépayée.

...et contre les entreprises
Pour Max Banon, "cette bataille est l’affaire de tous, y compris du monde économique". L’électricité est un point incontournable, au même titre que l’eau ou le foncier. Un des défis des 25 prochaines années est de garantir à un million d’habitants un accès de qualité à l’électricité, à un prix compétitif. Car pendant ce temps, la progression démographique et le développement de l’activité économique entraîne actuellement une hausse de la consommation annuelle de 8% par an.

En attendant les états généraux
La CGTR-EDF prépare activement les prochains états généraux de l’énergie initiés par la Région. Elle est porteuse d’une question sur le projet qui vise à aller vers l’autosuffisance énergétique en 2025. Par qui sera assurée la production ? le privé ou le public ? et qui prendra le relais en cas de catastrophe climatique qui endommage les centres de production à partir des énergies renouvelables ?
Sur la question des énergies renouvelables, Max Banon précise que ces dernières sont un prétexte qui a permis à EDF de ne pas renouveler son parc de production. Ce manque est à l’origine des coupures de délestages que nous avons connu les mois passés. La responsabilité de l’entreprise publique est de d’assurer la réussite d’un plan de rattrapage sur le plan des équipements. Mais en cas de privatisation, qui assumera cette responsabilité ?


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