Les limites du statut de région ultrapériphérique de l’UE

Chômage à La Réunion : 2,5 fois plus que la moyenne de l’Union européenne

7 mai 2022, par Manuel Marchal

Une étude publiée dans la perspective de la Journée de l’Europe rappelle qu’en termes de chômage, La Réunion reste une des régions de l’Union européenne les plus sinistrées : le taux de chômage est 2,5 fois plus important que la moyenne. La Réunion est une région ultrapériphérique de l’UE et peut bénéficier d’une adaptation des politiques européennes. Mais est-ce suffisant ? La suppression du quota sucrier en 2017 par une décision des chefs d’État de l’Union européenne rappelle la fragilité de notre situation.

La Journée de l’Europe le 9 mai et la Présidence française de l’Union européenne au 1er semestre 2022 sont l’occasion de communiquer sur les disparités de taux de chômage entre régions européennes en 2021, notamment au sein des Régions ultrapériphériques (RUP) :

« En 2021, en moyenne annuelle, le taux de chômage au sens du Bureau international du travail (BIT) s’élève à 18 % de la population active à La Réunion. C’est environ 2 fois plus que la moyenne nationale (7,9 %) et 2,5 fois plus que celle de l’Union européenne (7,0 %). À Mayotte, le taux de chômage au 2e trimestre 2021 s’établit à 30 %, à un niveau environ 4 fois supérieur aux moyennes nationale et européenne. La Réunion et Mayotte font partie des 26 régions européennes (sur 242 régions au sens NUTS 21) pour lesquelles le taux de chômage dépasse 14 %, soit le double de la moyenne européenne. Le taux de chômage est plus élevé qu’à La Réunion dans cinq régions espagnoles, trois italiennes et trois grecques. Il est aussi plus élevé à Mayotte, qui est la région européenne au plus fort taux de chômage ».

Voici les explications avancées :

« Parmi les régions européennes, La Réunion et Mayotte partagent avec les autres régions ultrapériphériques (RUP) l’éloignement des marchés d’approvisionnement et d’exportation, ainsi qu’une taille limitée du marché local, ce qui limite leur potentiel de développement économique et peut donc se traduire par un déficit d’emplois. Pour autant, dans les RUP portugaises des Açores et de Madère, le taux de chômage est proche de la moyenne européenne (respectivement 7 % et 8 %). Dans la RUP espagnole des Canaries, le taux de chômage est en revanche de 23 % ».

Le statut de RUP n’a pas empêché la suppression du quota sucrier

La Réunion est une région ultrapériphérique de l’Union européenne. Elle peut donc bénéficier d’une adaptation des politiques européennes. Mais cette adaptation a des limites. Ainsi en 2017, le quota sucrier a été supprimé à La Réunion, alors que les 300000 tonnes accordées n’étaient pas en mesure de perturber un marché européen estimé à plus de 14 millions de tonnes. Le statut de RUP a permis d’obtenir la bienveillance de l’UE quant à des mesures compensatoires de l’État. C’est l’aide de 28 millions d’euros versée à la filière tous les ans.
Par ailleurs, l’Union européenne négocie avec les pays voisins de La Réunion des Accords de partenariat économique qui ouvrent la totalité de notre économie à la concurrence de produits fabriqués avec un coût bien moindre. Les Européens ne sont pas dans ce cas, car leur agriculture ne dépend pas de la production de fruits et légumes tropicaux, et sucre de canne.

Aux Réunionnais de négocier les accords commerciaux les concernant

Malgré le fait que le taux de chômage soit 2,5 fois plus important à La Réunion que celui de la moyenne des régions de l’UE, La Réunion n’est pas à l’abri des conséquences d’une politique européenne conforme aux orientations ultra-libérales de l’Organisation mondiale du Commerce.
Ceci souligne que les limites de la spécificité propre au statut de RUP sont atteintes.
Il faut donc autre chose pour protéger La Réunion : la responsabilité. Cela suppose que les Réunionnais puissent négocier eux-mêmes avec les pays voisins les conditions de leur intégration économique dans leur région. Cela nécessite une délégation de compétences pour que les Réunionnais puissent défendre leurs intérêts, et donc ne soient plus dans l’obligation de s’en remettre aux négociateurs de l’Union européenne qui, fort légitimement, font passer les intérêts de l’industrie et des services européens bien avant ceux de La Réunion.

M.M.

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