Évolution nécessaire ou révolution ? "80% de la surface cultivée en canne pourrait être mécanisable", a défendu Bernard de Ranchin devant un public de planteurs très participatif. Entre leurs doutes et un engagement passionné dans la défense de la canne, les planteurs rassemblés ont donné de leur filière une image contrastée, partagée entre la nouveauté de plusieurs expériences en cours - rapportées par des témoins directs - et les doutes liés à la faiblesse des moyens matériels et financiers qui sont le lot de l’immense majorité d’entre eux. L’exemple est venu d’un groupe d’une cinquantaine de petits et moyens planteurs de l’Antenne 4 : en s’unissant, ils ont pu faire l’acquisition d’une coupeuse-tronçonneuse dont ils attendent 15.000 tonnes coupées dans la prochaine campagne.
La preuve est faite, semble-t-il, dans la profession : la mécanisation, longtemps réservée à quelques grosses exploitations, peut aujourd’hui concerner des petites et moyennes surfaces. Sur les 27.730 hectares plantées en cannes, 11.700 hectares environ (42%) ont une pente inférieure à 10% et 10.605 hectares (38%) ont une pente entre 10% et 20%. Le matériel aujourd’hui disponible fait dire aux techniciens que ces 80% de la surface cannière pourraient être mécanisés dans la coupe. Il a été question des différentes sortes de matériel et des adaptations que des groupements de planteurs leur ont apportées pour les rendre aptes au terrain accidenté de l’île. Il a aussi été question de co-financement, entre fonds européens et aides du Département dont certains plafonds ont été rehaussés.

La canne à quel prix ?

Selon une enquête planteurs du CTICS (Centre technique interprofessionnel de la canne et du sucre de La Réunion), les perspectives à court terme font apparaître un potentiel de 30% de parcelles mécanisables.
Le débat a mis en relief plusieurs expériences en cours, qui montrent que la profession n’est jamais en panne de solutions : entre ceux qui réaménagent leurs parcelles pour les rendre mécanisables et ceux qui bricolent leurs machines pour les adapter au terrain, l’assistance a donné l’image d’une profession qui cherche les moyens de réaliser des améliorations rapides. "Ce n’est ni en Australie ni en Afrique du Sud qu’il faut aller. Les chauffeurs de machine que nous avons ici sont parmi les meilleurs du monde parce qu’ils travaillent dans des conditions très difficiles", a soutenu Didier Foucque, dont l’entreprise (du même nom) a proposé l’aménagement d’une “Austoft TIGE-R”, modèle australien à l’origine.
Un autre planteur a témoigné des efforts (physiques et financiers) qu’il a dû consentir pour obtenir un aménagement de 2,5 hectares de parcelles vouées à l’abandon : 100.000 francs d’apport personnel, pas de récolte pendant deux ans... "Il faut du courage et il faut y croire", a-t-il dit. "Ça m’a coûté très cher" mais la canne plantée après un apport de cendres et de purin promet beaucoup.
Un planteur de Saint-Louis avait décidé de jouer l’amuseur public n°1 pendant la rencontre. À l’énoncé des investissements engagés dans le réaménagement des parcelles, il interpella la tribune : "À quel prix on va vendre la canne, après avoir dépensé tout ça ?", demanda-t-il en créole.
C’est la question clé du moment et personne ne peut véritablement y répondre, ce qui explique encore bien des réticences, surtout chez les anciens. Les engagements les plus passionnés sont venus de jeunes agriculteurs, dont certains (ceux de l’Antenne 4), ont obtenu la mécanisation de leur coupe pour un coût variant entre 14 et 18 euros/tonne.

Pascale David

Concours de coupeurs de cannes

421 kg atèr an un kar d’èr

Six coupeurs de cannes se sont présentés hier au concours organisé par la Chambre d’agriculture, sur un terrain attenant au champ de la Foire agricole de Bras-Panon.
Le vainqueur est un coupeur de Saint-André, Jean-François Sababady, qui a mis au sol en un quart d’heure 421 kg de cannes... ce qui représenterait “mécaniquement parlant” une coupe de 1,7 tonne/heure. Nicolas Agamemnon (2ème) est à 80 kg derrière lui. Les autres concurrents sont Benjamin Sambanon (3ème), Éloi Payet (4ème) et Roland-Gérard Brun (5ème).