« Il n’y a plus de moteur de croissance »

L’effondrement de l’économie réunionnaise confirmé

6 juillet 2011, par Céline Tabou

L’Institut national de la Statistique et des études économiques (INSEE) a dévoilé hier les comptes rapides pour l’Outre-mer en 2010, lors d’une conférence de presse. Contrairement aux estimations de l’IEDOM, La Réunion n’a pas « connu le redressement espéré en 2010 », à la différence de la France. Cette stagnation dans la récession (-0,2%) confirme l’effondrement de l’économie réunionnaise sous le coup de décisions politiques.

La crise est toujours là, et bien plus grave qu’en France. C’est ce que rappelle le bilan économique 2010 de La Réunion. L’an dernier le Produit Intérieur Brut (PIB) de La Réunion était en baisse de -0,2% en 2010 alors que la France avait un taux de croissance de +1,5% contre -2,7% en 2009. L’INSEE précise qu’en valeur, le PIB de l’île est de 2,3% mais avec les importantes hausses des prix, celle-ci ne s’est pas faite sentir. D’où cette baisse globale de 0,2%. À noter que le PIB par habitant connaît une récession encore plus importante : -1,7%.
Constat alarmant de la part des experts économiques : « La Réunion reste la région française la plus touchée par le chômage, avec un taux de chômage défini par le Bureau International du Travail de 28,9% », a indiqué Pascal Chevalier, directeur régional de l’INSEE. D’autant plus que les jeunes sont encore la population la plus touchée par le chômage, avec 55,3% des 15-24 ans sans emploi. Parallèlement, les femmes sont aussi les plus touchées par le chômage avec 14,7% contre 9,8% pour les hommes.

Les décisions politiques influent sur l’économie

Comme l’a montré le rapport de l’INSEE et de l’IEDOM, l’arrêt des grands chantiers a entrainé une baisse des activités manufacturières et un ralentissement de la construction. Arnaud Bellamy-Brown, directeur de l’IEDOM, a d’ailleurs confirmé que « le changement de politique des grands travaux à la Région » a conduit à la chute du secteur de la construction, avec le manque de tuilage des investissements publics, et le manque de logement privé.
L’industrie connait aussi une baisse de 0,8% et la construction de 5,4% en raison de la suppression des grands chantiers tels que la Rocade du Tampon, le Tram-Train, la MCUR, le Zénith ou le Pole Océan. Michel Brasset, responsables des comptes économiques de l’INSEE a expliqué que « l’activité peine à redémarrer. Il s’agit d’un décrochage par rapport à l’évolution nationale, car depuis 1994, la Réunion avait une croissance supérieure à la France ».
Les syndicalistes, acteurs sociaux et les politiques avaient averti des conséquences des décisions politiques de Didier Robert, qui ont contribué à la chute des secteurs d’activité tels que l’industrie manufacturière et la construction. Comme l’a expliqué l’INSEE dans son rapport « dans les travaux publics, la fin des grands chantiers précédents n’a pas trouvé de relais à la hauteur » permettant aux secteurs cités de se relancer.

De plus en plus de chômeurs laissés pour compte

L’INSEE a indiqué dans son rapport que « le nombre de chômeurs indemnisés, que ce soit par le régime d’assurance chômage ou l’État (principalement de solidarité spécifique n’a progressé que de 1% ». Face à la hausse de 12,2% du nombre de demandeurs d’emploi, celle des prestations sociales a connu une augmentation de 1% entre 2009 et 2010. Ce sont ces revenus qui aident les plus démunis, ils restent bloqués et l’État, par son plan de rigueur, n’a pas hésité à faire des économies sur les populations les plus fragiles, comme les chômeurs.
De même, les prestations sociales ont diminué depuis 2009, pour exemple, la part de l’ASSEDIC est passée de 38,2% à 12,0% en 2010. Cet organisme privé chargé de recouvrer les cotisations et d’effectuer le paiement des indemnités de chômage aura reversé moins d’indemnités alors que 12.640 Réunionnais de plus s’étaient inscrits au Pole Emploi entre 2009 et 2010.

Précarité et manque d’investissement

Avec la hausse du chômage, celle des prix et le ralentissement de l’économie réunionnaise, la précarité est toujours aussi dense. Le nombre de contrats aidés a augmenté de 16,3% par rapport à 2009. Seul rempart face au chômage de longue durée pour nombre de Réunionnais, les contrats aidés sont en danger avec les nouvelles mesures gouvernementales, notamment le gel des dotations aux collectivités, qui devraient réduire le nombre de bénéficiaires de ces contrats.
Principaux recruteurs d’emplois aidés, les collectivités doivent également diminuer leurs investissements. « Les budgets primitifs des administrations locales et les comptes de l’État sont ainsi en retrait de 11% sur les projets d’investissement 2010 », a indiqué l’INSEE. De plus, Arnaud Bellamy-Brown a indiqué qu’en dépit des initiatives prises dans les domaines de la mer et des innovations, notamment, « il n’y a plus de moteur de croissance » sur le court et long terme.

Céline Tabou

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