Prix des carburants

L’Etat s’engage dans une impasse en cherchant à dénigrer les collectivités d’Outre-mer

4 décembre 2008, par Risham Badroudine

Les évènements de La Réunion et de Guyane ont montré la manière de procéder de l’Etat. Dans les deux Départements d’Outre-mer, l’Etat a mené une campagne de dénigrement des collectivités locales. La similitude de l’attitude de l’État envers La Réunion et la Guyane montre que c’est une volonté politique affirmée de casser les collectivités locales et leurs représentants.

Au moment où les Guyanais demandent 50 centimes sur les prix à la pompe des carburants, l’Etat leur donne 30 centimes. Le gouvernement joue la diversion.
L’Etat annonce une compensation de 10 millions d’euros. Cette somme n’existe pas, en réalité. Le secrétaire d’Etat à l’Outre-mer Yves Jégo veut la prendre sur un dispositif prévu dans la future loi-programme. Mais la loi pour le développement économique et la promotion de l’excellence Outre-mer ne sera votée qu’en 2009. De plus, ce fonds n’est pas prévu pour les carburants.
En effet, comme le souligne Victorin Lurel, Député et Président de la Région Guadeloupe, les 10 millions d’euros proposés par Yves Jégo au Conseil régional de Guyane en échange d’une baisse des taxes perçues sur les carburants étaient inscrits dans un fonds qui n’a pas encore vu le jour.

« Le gouvernement ne manque pas d’air ! »

« A défaut de crédits, le gouvernement ne manque pas d’air ! », affirme dans un communiqué le président du Conseil régional de Guadeloupe, qui dénonce « un recours à un tour de passe-passe budgétaire pur et simple ».
Le fonds exceptionnel d’investissement qui fournirait ces 10 millions doit être créé en 2009 avec la future loi-programme. Il doit être doté de 16 millions d’euros au total pour tout l’Outre-mer.
Yves Jégo « affecte ainsi pour une seule des 10 collectivités d’Outre-mer 62% des crédits de ce fonds qui n’est même pas encore créé ! », écrit Victorin Lurel, qui dénonce une utilisation « purement conjoncturelle ».
Le député demande au secrétaire d’Etat « d’indiquer dès la discussion ce jour du Budget outre-mer au Sénat où il compte puiser ces 10 millions d’euros ».
Victorin Lurel rappelle que le fonds d’investissement « ne sera officiellement créé qu’après le vote de l’article 16 de la future Loi pour le développement économique de l’Outre-mer (LODEOM), dont l’examen n’est toujours pas inscrit à l’ordre du jour du Parlement ».
Il rappelle aussi que « ce n’est pas la vocation de ce fonds de compenser la diminution de recettes de collectivités locales » qu’entraînerait la baisse des taxes sur les carburants.
Il ajoute que la procédure d’attribution des concours financiers de ce fonds ne se fera pas à l’initiative du ministre, mais fera reposer le futur mécanisme sur des projets élaborés au niveau des collectivités locales, et transmis aux préfets qui instruiront la demande auprès du ministère.

Le geste de solidarité doit provenir de l’Etat

Aujourd’hui, s’il y a un geste de solidarité à faire, c’est à l’Etat de l’accomplir et non à la Région Guyane. En effet, si l’on analyse les niveaux de prélèvement entre la Guyane et la France, on constate que les taxes sont nettement inférieures en Guyane par rapport à la France. (Voir graphique “Comparaison taxes France/Guyane”).
Actuellement, les taxes représentent 17,37% du prix à la pompe (soit 1,14% pour l’Octroi de mer (0,021 centimes) et 16,22% pour la part taxe spéciale sur la consommation de la Région Guyane (0,29 centimes) contre 55% en France. Malgré tout, l’Etat demande à la Région Guyane de payer.
Les Guyanais attendent donc de l’Etat des mesures positives et de la transparence, « le langage de vérité », affirme Antoine Karam, président de la Région Guyane.
L’Etat s’est engagé dans une campagne de dénigrement des collectivités
Si le président de la Région Guyane parle de langage de vérité, c’est qu’actuellement, l’Etat, et dès le début de la crise, s’est engagé dans une campagne de dénigrement des collectivités d’Outre-mer.
Aujourd’hui, seul l’Etat est habilité à fixer le prix des carburants dans les DOM. Il ne peut pas reconnaître et dénoncer les profits considérables réalisés par les pétroliers dans l’opacité la plus totale.
L’Etat ne peut pas accuser les collectivités d’être responsables du prix élevé des carburants dans les DOM, d’autant plus que le niveau des taxes dans les 4 DOM est largement inférieur au niveau des taxes prélevées par l’Etat sur le territoire national. (Voir graphique “Comparaison du niveau des taxes entre la France et les DOM”)

La similitude de l’attitude de l’État envers La Réunion et la Guyane montre une volonté politique affirmée de casser les collectivités locales et leurs représentants.

Risham Badroudine

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