Bilan d’activités de la Région Réunion pour 2006 Avis du CESR

L’évaluation comme maître mot

16 juin 2007

Les membres du Conseil Economique et Social Régional (CESR) étaient réunis hier en Assemblée plénière pour valider les avis de ses commissions sur le bilan d’activités et le compte administratif de la Région Réunion pour l’exercice 2006. Une séance à laquelle a assisté Raymond Lauret, Vice-président de la collectivité régionale, mais aussi un nouveau membre accueilli au sein de la commission “Développement économique”, Jean-Yves Minatchy, Président de la Chambre d’Agriculture, déjà membre du CESR dans les années 90.

Une année 2006 au cours de laquelle la collectivité régionale n’a pas eu besoin de recourir à l’emprunt pour financer ses investissements qu’elle a pu supporter grâce à l’excédent du compte de fonctionnement, les recettes de transfert ainsi que ses réserves. Ce constat est d’autant plus marqué que le montant de ses dépenses a doublé par rapport à 2005 passant de plus de 339 millions à plus de 716 millions.

• Commission “Politique régionale”

Pêche : « prendre la locomotive en main »

La commission “politique régionale”, présidée par Jean-Pierre Avril, s’est néanmoins interrogée « sur les marges de manœuvres existantes pour la collectivité, notamment en termes de fiscalité, à court et moyen termes » pour financer les autres grands projets d’investissement à réaliser. Elle a rappelé son souhait de voir aboutir la réactualisation du Programme Pluriannuel d’Investissements (PPI) prévue depuis 2005. La commission a également souligné la nécessité, dans un contexte de transfert de compétences, de privilégier l’anticipation, d’élaborer des prévisions adaptées et de permettre une meilleure lisibilité des actions engagées, comme dans le domaine de la formation professionnelle qui enregistrerait certains retards qui se répercutent sur l’activité des opérateurs. 2006 a été une année consacrée à la négociation et à l’élaboration des différents programmes européens. La commission a émis le regret que les particularités et potentialités de La Réunion dans le secteur de la pêche au travers du FEP (Fonds Européen pour la Pêche) ne soient pour l’instant pas prises en considération. Lors du débat précédant le vote des avis, Maurice Cérisola soulignera d’ailleurs que s’agissant de la pêche, « on en parle, mais il ne se passe pas grand-chose. Nous sommes entourés d’un milieu marin où il y a plein de poissons, chose rare aujourd’hui, tout le monde vient, mais nous, on ne sait pas. Il faut prendre la locomotive en main pour que la pêche prenne sa place déterminante dans notre économie ». Enfin, sur le volet coopération régionale, la commission “Politique régionale” a souligné le respect des engagements pris par la Région en la matière, constatant également une progression des niveaux de réalisation des engagements (80,9% en 2005 et 88,84% en 2006) et des mandatements (52,2% en 2005 et 73,4% en 2006) qu’elle apprécierait de voir accompagnée d’une évaluation pour l’ensemble des interventions dans le secteur de la coopération. La commission a également estimé nécessaire que la représentation de La Réunion à l’extérieur s’accentue et se traduise par l’implantation de structures dans d’autres pays partenaires, comme il lui apparaît indispensable d’être représentée auprès des autorités européennes.

• Commission “Développement durable”

Endiguement des ravines : pour la création d’un syndicat mixte

La commission “Développement durable”, présidée par Patrick Beyronneau, a constaté et déploré pour sa part « la dégradation du niveau des engagements » de la Région en matière d’aménagement du territoire. Elle a préconisé que l’utilisation des outils techniques et financiers destinés à la maîtrise du foncier soit optimisée, notant que l’évolution démographique réunionnaise appelle à préparer des espaces urbanisés en conséquence. De même, elle a déploré que les interventions en centres urbains, « lieux de vie importants dans la dynamique des villes », soient si faibles et que la politique de structuration des bourgs n’ait toujours pas dépassé le stade des études au détriment de la conduite d’actions de terrain. Constatant que seulement 3 projets d’endiguement des ravines ont été soutenus en 2006, la commission invite la collectivité régionale à défendre à nouveau le projet de syndicat mixte de gestion et d’endiguement des ravines pour favoriser la concertation et l’engagement de tous les acteurs sur cette question essentielle qui engage « la sécurité des personnes et des biens ». Sur le volet environnement, elle estime, « compte tenu des enjeux liés à la protection et la valorisation de l’environnement littoral, que des actions d’envergures doivent être conduites sur l’ensemble du littoral réunionnais ». En matière de politique de maîtrise de l’énergie, elle invite la collectivité régionale à soutenir et développer davantage les opérations pour le développement du solaire photovoltaïque auprès des particuliers. Enfin, en matière de routes et de transports, poste qui fait l’objet en 2006 d’un « taux d’engagement remarquable » de 87%, la commission “Développement durable” a attiré l’attention de la collectivité régionale afin que la sécurisation des tronçons problématiques intervienne avant le transfert effectif de la compétence des routes nationales à la Région prévu au 1er janvier 2008. Pour terminer, au regard des derniers événements climatiques dans l’Ouest, la commission souhaiterait que soit reconsidérée l’option “digue” retenue pour la nouvelle route du Littoral.

• Commission “Développement économique”

Haut-Débit : agir sur les tarifs et les offres de services

S’agissant des aides aux entreprises, Philippe Doki-Thonon, Président de la commission “Développement économique”, a rappelé qu’une réflexion sur le soutien public en faveur des entreprises à La Réunion était actuellement en cours, suite à une saisine du président du Conseil régional auquel le CESR répondra dans le courant du mois d’octobre. La commission a tenu à rappeler que de nombreux projets d’implantation et d’extension d’entreprises n’ont pu se concrétiser ces dernières années, toujours par la faute de foncier disponible. Sur le plan de la continuité territoriale, si le changement des critères d’éligibilité a permis à un plus large public de bénéficier du dispositif, la commission s’interroge « sur l’adéquation des futures demandes avec la dotation annuelle de 8 millions d’euros versée par l’Etat » et propose à nouveau que le CESR soit saisi pour réaliser un bilan du dispositif. Concernant les secteurs “ruralité, aquaculture et pêche”, la commission souhaiterait, dans le cadre de l’harmonisation des compétences entre la Région et le Département, pouvoir mieux distinguer la phase expérimentale de la phase opérationnelle pour permettre une meilleure lisibilité des interventions (“qui fait quoi, qui paie quoi”) visant à favoriser leur articulation, notamment pour les nouvelles filières de diversification telles que le café, les plantes aromatiques et médicinales. Elle a regretté en outre que le pôle de compétitivité agro-nutrition en milieu tropical de La Réunion ne soit pas évoqué dans ces secteurs. Enfin, concernant les NTIC, si la commission note que 52% des Réunionnais disposent d’une connexion Internet à domicile, des efforts importants restent encore à fournir en termes de tarif et de qualité des offres de services haut débit, en espérant que la désignation d’un délégataire de service public pour le réseau région Gazelle permette enfin d’agir sur ces questions majeures. Bruno Millot, chef d’entreprise, prendra un moment la parole lors du débat pour déplorer que le temps de débit entre Saint-Denis et Saint-Louis est aujourd’hui plus long que celui entre Paris et New-York. Il a estimé pour sa part que le plaidoyer en faveur d’un rattrapage au niveau de la Métropole n’était peut-être pas le plus opportun, sachant que tout près de nous, à Maurice, les technologies de la communication sont bien supérieures à celles de la France métropolitaine. « On manque d’ambition pour mettre La Réunion au plus haut niveau mondial », a-t-il conclu.

• Commission “Développement humain”

Passer de « la culture des chiffres » à « la culture de résultats »

Comme le souligne également la commission “Politique régionale”, la formation professionnelle doit faire l’objet d’actions concrètes. Soulignant au préalable l’engagement financier de la collectivité régionale en la matière, Georges-Marie Lépinay, Président de la commission “Développement humain”, a formulé le souhait que dans le domaine de la formation professionnelle, « la culture des chiffres » (prédominant dans toutes les collectivités) soit remplacée par « une véritable culture de résultats » qui passe par l’évaluation afin de mesurer clairement l’impact des financements engagés. Une évaluation pour laquelle le CESR a besoin de la présence ponctuelle d’un élu à ses côtés qui sera plus à même qu’un administratif de répondre aux questionnements d’ordre politique. La commission a également souligné la nécessité de dresser un bilan de la lutte contre l’illettrisme, d’actualiser les données disponibles à ce sujet, afin d’aller plus loin. Bien que la compétence soit partagée entre l’Etat et la Région, elle souhaiterait que le dispositif de VAE (Validation des Acquis de l’Expérience) fasse l’objet d’un engagement plus important, au-delà de la mise en place et du financement des Points Relais Conseils. Pour finir sur la question de la formation, la commission regrette la disparition de l’APR (Association de Promotion Rurale), souligne que le cas de cette association de formation professionnelle n’est pas isolé, mais que c’est l’ensemble du secteur associatif, tous secteurs confondus, et ses relations avec les collectivités qui est fragilisé. Pour terminer sur le volet éducation et mobilité, la commission “Développement humain” insiste là encore sur la nécessité d’évaluation, de suivi et de pilotage des actions, programmes ou projets entrepris par la collectivité régionale. En outre, la commission attend avec impatience les résultats de l’Observatoire de la mobilité, dont l’installation était prévue en janvier 2007, « afin de pouvoir apprécier ce qu’apporte cette phase dans le parcours du jeune ».

• Commission “Epanouissement humain”

Par la voix de sa Présidente, Paulette Lacpatia, la commission a tenu à renouveler son soutien à la collectivité régionale « dans la poursuite de sa politique visant à la consolidation du tissu associatif » dans le domaine du sport et du secteur socio-éducatif, passant par la formation des cadres. Elle a néanmoins estimé que « la capitalisation de l’expérience des athlètes de haut niveau, modèles auprès des jeunes, reste insuffisante » et demandé à ce que, au-delà des efforts faits pour la mobilité et la formation de ces athlètes, le dispositif actuel de reconversion soit renforcé par un dispositif d’accompagnement et de valorisation. De même, au-delà de la conduite des programmes de construction et de réhabilitation des équipements sportifs qui, en outre, devraient aussi être menés dans les quartiers situés dans les écarts, elle a plaidé pour la construction d’un lycée sportif qui pourrait assurer la formation des jeunes sportifs de haut niveau de la zone Océan Indien. S’agissant du secteur culturel, si les actions visant à soutenir la professionnalisation des artistes est une bonne chose, la commission souhaite inciter la Région à continuer de soutenir les salles communales et les petites troupes pour favoriser la démocratisation du spectacle vivant. Revient encore la question de l’évaluation pour mesurer les retombées financières et en termes d’emplois des aides à la production filmographique locale. Elle préconise à nouveau le regroupement des structures muséales vers un partenariat qui pourrait favoriser la mise en place d’un pass-musée. Pour démocratiser la culture, la commission “Epanouissement humain” a tenu à insister sur l’importance d’agir sur la politique tarifaire, la mise à disposition de transports et de tous les outils susceptibles de favoriser l’accès du plus grand nombre à la culture, comme de favoriser l’action des professionnels qui rencontrent le public dans les quartiers. Enfin, la commission préconise un assouplissement des cadres d’intervention dans les domaines culturel et sportif qui permettrait de favoriser la transversalité des projets.

Un bilan riche de préconisations, parfois empreint de critiques ou d’inquiétudes, de la part d’un Conseil consultatif qui, saisi dans cet objectif, tente de proposer une analyse la plus pertinente possible. Conscient des enjeux politiques, de la complexité de certains dossiers, le CESR et ses commissions portent néanmoins un regard sans compromis sur les activités de la collectivité régionale avec le souhait d’être entendu et de pouvoir ainsi concourir par sa réflexion au développement des grands dossiers de La Réunion. Une démarche contradictoire essentielle.

Compte-rendu Stéphanie Longeras


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