Sommet intercontinental à New-Dehli

L’Inde mise sur l’Afrique

10 avril 2008

Le premier sommet Inde-Afrique, qui s’est tenu du 4 au 8 avril à New Delhi, est l’occasion de se pencher sur la nature et les enjeux de ce partenariat en plein essor. Celui-ci illustre la volonté des pays africains de réduire leur dépendance économique à l’égard des anciennes puissances coloniales, des institutions internationales, mais aussi de la Chine.

« Un partenariat dynamique, une vision partagée ». C’est ainsi que le Ministre des Affaires Étrangères indien, Shri Anand Sharma, présente la philosophie du sommet Inde-Afrique, sur le site de son ministère. Ce premier évènement du genre aura pour objet de « renforcer les partenariats déjà existants dans des secteurs aussi divers que l’agriculture, la sécurité alimentaire, la santé, le développement d’infrastructures, la science et la technologie, les médicaments génériques, la formation et l’industrialisation ».

Les autorités indiennes chargées d’organiser le sommet y ont donc invité, en plus de différents chefs d’États africains, les représentants des associations économiques régionales africaines comme le Marché commun d’Afrique orientale et australe (COMESA), la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), ainsi que l’Union africaine et les représentants du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD).

Un partenariat historique et varié

Pour Mohammed Badrul Alam, professeur de science politique à l’Université Jamia Millia Islamia de New Delhi, les relations entre l’Inde et l’Afrique sont basées sur « la compréhension, l’amitié et les bénéfices partagés ». Ces liens, aussi ancestraux que la Route de la soie, se sont renforcés à partir de l’indépendance de l’Inde en 1947. « L’Inde fait du commerce avec tous les pays d’Afrique, mais plus particulièrement avec les pays d’Afrique de l’est, grâce au commerce maritime », explique-t-il. Parmi les produits échangés, figurent le textile, les épices, le thé, les céréales, ou encore des objets artisanaux. Mais les échanges entre l’Inde et l’Afrique concernent avant tout l’extraction et la transformation des matières premières - comme le pétrole ou les activités minières.

Au-delà de l’économie

Les relations entre l’Inde et l’Afrique ne se limitent pas aux échanges économiques : Mohammed Badrul Alam indique qu’il existe aussi « des échanges en termes d’éducation, de partage de Technologies de l’Information et de la Communication ».
À titre d’exemple, le ministre indien des Affaires étrangères cite la mise en place depuis 2004 d’un satellite et d’un réseau de fibre optique pour relier 53 pays du continent africain.
De l’autre côté de l’Océan Indien, ce partenariat est accueilli plutôt positivement, comme l’explique Henri-Elie Ngoma Binda, professeur de philosophie politique à l’Université de Kinshasa en République démocratique du Congo. « La Chine et l’Inde, dits du tiers monde, mais [présentant un] développement admirable, s’offrent aux Africains comme des partenaires à la fois proches de leurs préoccupations et susceptibles de leur apporter, sans trop d’exigences, des possibilités de croissance de leur économie. » Il souligne néanmoins le caractère nécessaire, plutôt que volontaire, de ces liens.

Spécificité de l’approche indienne

Sur la scène africaine, l’Inde a une approche complètement différente de celle de la Chine, affirme Paul-Martel Roy, professeur spécialisé en économie du développement à l’Université du Québec à Montréal. « Les investissements de l’Inde en Afrique viennent principalement d’entreprises privées, alors que ceux de la Chine sont financés par le gouvernement chinois ». Si les anciennes puissances coloniales perdent des marchés en Afrique, au profit de pays comme l’Inde ou la Chine, c’est parce que « la forme traditionnelle de la coopération avec le monde occidental [...] a radicalement déçu [ses] espoirs de développement », explique M. Ngoma Binda. Par conséquent, l’Afrique se convainc de plus en plus qu’il est absolument indispensable et urgent de se tourner vers les pays qui offrent de plus grands avantages comparatifs. C’est une des raisons pour lesquelles les pays africains « se reconnaissent davantage dans les autres pays du Sud », ajoute M. Roy.
« La rage capitaliste de l’Occident pousse l’Afrique dans les mains, jugées plus tendres, de l’Inde et de la Chine », conclut le professeur congolais.

(Sources APEM - Agence de presse Etudiante Mondiale)

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