L’urgence de maîtriser l’approvisionnement en attendant de moins dépendre des importations

La compagnie maritime réunionnaise plus que jamais une priorité

24 mars 2022, par Manuel Marchal

En attendant la mise en œuvre d’un projet réunionnais remettant en cause l’économie de comptoir comme modèle dominant, la création d’une compagnie maritime réunionnaise permettra à notre île de ne pas dépendre de sociétés extérieures pour son approvisionnement. La situation actuelle rappelle que la quête du profit maximum est la priorité de ces sociétés, pas la garantie d’approvisionnement de La Réunion.

Dans un courrier adressé hier aux ministres des Transports et des Outre-mer, les 11 parlementaires de La Réunion indiquent que « nous subissons encore la hausse des coûts liée à la forte reprise de la demande internationale, le coût de transport d’un container entre l’Hexagone et La Réunion ayant été multiplié par trois, a minima. Le déséquilibre entre l’offre et la demande couplé au manque de containers disponibles et de matières premières contribuent à la multiplication par quatre à dix du prix du fret de certaines denrées alimentaires et à la forte inflation constatée sur notre territoire au sein duquel le taux de pauvreté reste l’un des plus importants de France. »
Et de souligner que « le monde socio-économique nous alerte sur une évolution particulièrement urgente et alarmante de la situation : un dérèglement croissant de la desserte maritime à La Réunion avec des risques de raréfaction des rotations. Vous comprendrez que cette situation pourrait à très court terme avoir des conséquences pour notre économie insulaire fortement dépendante aux importations ».
Conclusion : « nous sollicitons une nouvelle fois une intervention rapide, forte et ferme de la part de l’État auprès des opérateurs maritimes, en particulier l’opérateur national, afin qu’ils assurent les relations commerciales vitales pour notre île et ses habitants. »

Ce courrier rappelle deux faits :

- la forte dépendance aux importations
Ceci découle de la persistance à La Réunion d’une économie de comptoir : exportations de produits peu transformés vers une ancienne métropole et importations de produits manufacturés de cette ancienne métropole. Rappelons que plus de 70 % des importations viennent de l’UE, et plus de la moitié de la France. Le reste, principalement du charbon et du carburant, vient d’Afrique du Sud et de Singapour. Comme à l’époque coloniale, les exportations répondent à des besoins d’une ancienne métropole et concernent principalement le sucre.

- la dépendance totale à des sociétés extérieures pour les importations
Les parlementaires décrivent la situation suivante : les bateaux sont de plus en plus rares pour venir approvisionner La Réunion et le prix de cet approvisionnement est toujours plus cher.
Le transport maritime est un marché, et ses acteurs sont d’abord dirigés par le profit. Dans le contexte actuel, il existe sans doute des destinations où il leur est possible de faire plus de profit qu’à La Réunion.

La rupture avec l’économie de comptoir apparaît encore plus comme une nécessité. La crise COVID-19 et la guerre en Ukraine rappelle la vulnérabilité de La Réunion à la moindre crise internationale. Cette vulnérabilité est payée par les plus pauvres qui sont les principales victimes de la hausse des prix causée par le rencherissement des importations.
Changer de modèle ne peut se faire du jour au lendemain, ni en quelques années. Cela découle d’un plan qui fixe un objectif à 20 ans, une échéance raisonnable compte tenu de l’ampleur du défi.

En attendant, il est urgent que les Réunionnais maîtrisent leur désenclavement maritime pour au moins deux raisons. Tout d’abord, avoir la garantie d’être approvisionné, ensuite pour avoir la certitude de pouvoir assurer ses exportations.
L’outil de ce désenclavement est une compagnie maritime réunionnaise. C’est en effet la seule façon d’être sûr que les échanges essentiels entre La Réunion et l’extérieur seront toujours assurés car le centre d’intérêt d’une compagnie maritime réunionnaise sera la desserte de La Réunion, et pas la recherche du profit maximum sur d’autres destinations.

M.M.

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