Une protection contre la vie chère est une principale cause des prix trop élevés

La surrémunération contribue beaucoup à la vie chère à La Réunion

17 janvier, par Manuel Marchal

Selon le résultat d’une étude sur l’octroi de mer commandée par l’Association des maires de France et l’Association des communes et collectivités d’outre-mer, bien plus que les taxes, la vie chère à La Réunion s’explique par la surrémunération des fonctionnaires (+53 %) et de certains salariés du privé. Cette prime, censée compenser le coût de la vie, a des effets pervers : les prix sont calculés en fonction du pouvoir d’achat de ces bénéficiaires qui appartiennent dans notre pays à la classe sociale aisée. Ce système découle du néocolonialisme français, alimente les inégalités et profite aux grandes enseignes françaises implantées à La Réunion. Réformer la surrémunération reste un sujet dérangeant à La Réunion, d’autant plus que les bénéficiaires de ce système ont pris le pouvoir dans la plupart des institutions.

Loin d’être le principal responsable de la vie chère en Outre-Mer, l’octroi de mer reste un pilier essentiel du financement des collectivités et de la protection de la production locale. C’est la conclusion d’un rapport commandé par l’Association des maires de France et l’Association des communes et collectivités d’outre-mer d’après « Localtis ». Selon notre confrère, cette étude a une conclusion dérangeante pour des partisans du système dominant à La Réunion : la société de consommation importée par le néocolonialisme français.
En effet, dans l’article sur cette étude publié le 10 janvier dernier, « Localtis » écrit :
« Par ailleurs, les écarts de revenus des habitants sont de 28 % avec la métropole (France — NDLR) mais avec des inégalités importantes entre les “in” (les fonctionnaires et les cadres du privé) et les “out”, les « exclus du système », souvent éloignés du marché du travail. « Le marché est organisé pour répondre au pouvoir d’achat des “in”. C’est un peu comme si un ouvrier du Nord devait faire ses courses au Bon Marché à Paris », résume Nadia Damardji, dirigeante du cabinet APC, qui a réalisé cette étude. Rappelons que dans les anciennes colonies devenues départements ou collectivités dits d’outre-mer, les fonctionnaires titulaires bénéficient d’une surrémunération. Cette surrémunération augmente le salaire de 53 % à La Réunion, elle est officiellement appelée « prime de vie chère ». Cette surrémunération existe aussi pour des salariés du secteur privé, à un taux plus faible généralement.

Des prix alignés sur les revenus des plus riches

La surrémunération des fonctionnaires titulaires à La Réunion augmente les salaires de 53 %.Elle est présentée comme une compensation pour le coût de la vie plus élevé qu’en France. Cette « prime de vie chère » existe aussi pour certains salariés du privé. Pourtant, ce dispositif entraîne un cercle vicieux. Les commerçants adaptent leurs tarifs aux revenus de cette population aisée, créant un marché tourné vers les consommateurs les plus riches.
Pendant ce temps, la majorité de la population doit faire face à des prix élevés sans compensation financière. Ceci renforce le sentiment d’exclusion et creuse les inégalités économiques.

Comment soutenir le pouvoir d’achat sans créer de l’inflation ?

La surrémunération vise à compenser les surcoûts liés à l’éloignement et à l’insularité, mais elle produit des effets pervers en alimentant la vie chère. Une réflexion s’impose sur les moyens de soutenir le pouvoir d’achat sans créer de l’inflation. Des pistes alternatives pourraient inclure un sévère contrôle des prix, le développement de circuits courts avec les pays voisins pour réduire les coûts des importations de ce que nous ne pouvons pas produire. Cela passe par la nécessaire transparence sur la formation des prix. En effet, si la grande distribution va se fournir à Madagascar plutôt qu’en France, les prix devront baisser et pas être maintenus à l’identique pour augmenter les bénéfices des actionnaires de ce secteur économique.
Ceci interroge sur les bases du régime néocolonial imposé aux Réunionnais : recycler des transferts publics sous forme de salaires et de prestations sociales en profits privés rapatriés en France. La grande distribution est un acteur essentiel de cette privatisation de fonds publics.

La surrémunération : un des piliers du système néocolonial

Rappelons que la surrémunération visait à créer à La Réunion une classe sociale suffisamment nombreuse et dotée d’un pouvoir d’achat nécessaire à la création un nouveau marché : l’achat de produits importés d’Europe pour favoriser emplois et richesses en France. Paris voulait aussi fixer de nouvelles références dans les mentalités pour vanter la pertinence de ce système néocolonial : le mode de consommation de cette classe sociale devait devenir le modèle à suivre. Il fallait changer les mentalités en persuadant les Réunionnais qu’ils devaient consommer comme s’ils étaient en France alors qu’ils n’avaient pas les droits des citoyens français. Cette classe sociale a pris le pouvoir dans la plupart des institutions à la place de l’ancienne aristocratie de la canne à sucre. Paris a ainsi placé en haut de l’échelle sociale une classe dont les revenus sont totalement déconnectés de la création de richesses à La Réunion d’une part, et qui dépend totalement de Paris pour les revenus de ceux appartenant à la fonction publique d’autre part.
Autant dire que poser le débat sur ce sujet dérange beaucoup et montre toute la difficulté à changer les mentalités pour aller vers une Réunion structurellement égalitaire.

M.M.

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  • La sur rémunération appliquée au secteur public ou assimilé entraine une augmentation des prix pour tout le monde si bien que ceux qui ne travaillent pas et qui vivent avec des salaires privés ou des aides publiques qui ne sont pas indexés doivent faire face aux effets de l’augmentation des prix causées par la surrémunération et et vivent dans une situation beaucoup plus difficile que ceux qui sont dans le même cas en métropole ..

    Pour que personne ne soit lésé , il faudrait appliquer une sur rémunération à tout le monde, non seulement à ceux qui travaillent dans le secteur public mais aussi dans le secteur privé ainsi qu’à ceux qui vivent des aides publiques . L’indexation des revenus salariés ou des aides publiques serait la même pour tout le monde . Et pour combler les retards de développement existant entre les Outre mers et la métropole L’Etat pourrait intervenir de manière plus importante dans la mise en oeuvre de projets de développement qu’ils soient publics ou privés qui pourraient donner du travail à tout le monde . .Actuellem
    et générer des recettes fiscales .

    Au lieu de payer les agents publics 52 % de plus qu’en métropole on pourrait peut être appliquer une majoration de tous salaires et des aides publiques de d’environ 15% et attribuer aux collectivités territoriales , communes département et régions d’outre mer une augmentation de 15% de leur dotation globale de fonctionnement financées sur le budget de l’Etat . Ces dispositions devraient être appliquée au moins pendant une dizaine d’année puis corrigées à la la hausse si elles s’avèrent insuffisantes pour rétablir l’égalité entre les citoyens de l’outre mer et de la métropole sachant que l’éloignement et les conditions climatiques tropicales créeront toujours une différence entre le coût de la vie entre les outre mers et la métropole ..

  • Il est important de souligner que certaines personnes, qui étaient jadis engagées dans des luttes pour le développement de notre population, se sont aujourd’hui transformées en profiteurs du système. Ce constat concerne un nombre assez conséquent d’individus.

  • Le plus important ce sont les études à développer surplace à la Réunion, car il y a une fuite des génies réunionnais pour se former en métropole, problème similaire aux Pyrénées orientales ou d’autres départements. Ils restent là bas, il y a moins d’activité, de recherche, de partenaires...Et ceux qui restent explosent les chiffres de pauvreté.


Témoignages - 80e année


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