Le micro crédit

2 novembre 2006, par Risham Badroudine

Le prix Nobel de la paix 2006 a été attribué conjointement à Mohammed Yunus et à sa banque, la Grameen Bank. La “banque des villageois” que Mohammed Yunus a créée il y a plus de 30 ans a bâti son succès en prêtant de l’argent à ceux dont les banques traditionnelles ne veulent pas entendre parler parce qu’ils sont insolvables. Elle a en portefeuille près de 6 millions de clients directs (depuis sa création), contribue à faire vivre 1 habitant sur 10 (directement ou indirectement) et prête aujourd’hui l’équivalent de 1 milliard d’euros par an, ce qui en fait la première banque des pauvres. Sa spécialité est l’octroi de micro crédits (en moyenne 45 euros) pour une durée d’un an.

La Grameen Bank s’est alignée sur les taux pratiqués par les banques traditionnelles. Mais ces dernières se désintéressent des millions de laissés-pour-compte du Bangladesh. Comparée aux usuriers qui exigent jusqu’à 10% d’intérêt par semaine, elle est imbattable. D’autant qu’elle ne réclame aucune épargne préalable. Une caution existe pourtant : tout candidat à un prêt doit constituer un groupe avec 4 emprunteurs. A ces clients, elle offre un vade-mecum (livret de bonne conduite) pour s’extirper du sous développement. Basé sur 4 principes (discipline, unité, courage et travail), Mohamed Yunus fait l’éloge des familles peu nombreuses, de l’hygiène, recommande d’instruire les enfants, de pratiquer un exercice physique, encourage l’épargne familiale et condamne le système de dot ruineux pour les familles... Dans un pays où l’intégrisme n’est pas un vain mot, la Grameen Bank, avec son idéologie de la libération, suscite parfois des haines farouches. M. Yunus est convaincu que la Grameen Bank, par son action, contribue à faire évoluer la société bengali dans la bonne direction.

Le système de micro crédit s’est étendu dans le monde entier. Dans les pays développés, l’économie solidaire est constituée des activités qui tiennent compte de l’organisation ou la préservation d’un lien de solidarité envers des personnes qui ne bénéficient pas d’un partage équitable des fruits de la production. Les procédures de régulation d’un système libéral s’étant montrées insuffisantes pour juguler ses disfonctionnements, l’économie solidaire apparaît comme une façon de placer la personne humaine au centre des perspectives de développement des activités de production. L’économie sociale et solidaire doit reposer sur des principes de solidarité (solidarité entre générations, solidarité au niveau du partage de la production et de la distribution, solidarité entre territoires, solidarité dans la perspective d’un développement durable et équilibré, respectueux de l’environnement...)

Le dynamisme de la création d’entreprise est très vivace à La Réunion. C’est en moyenne 5.000 entreprises qui voient chaque année le jour, sur une population de 30.000 unités. Il arrive donc chaque année une proportion de 15 à 20% d’entreprises nouvelles, principalement dans les secteurs du commerce et des services. Environ 35% de ces créations sont effectués par des personnes en situation de demande d’emploi. Or, les banques n’interviennent que très peu lorsqu’elles ne disposent pas suffisamment de garantie. D’où se sont développés des dispositifs d’appui financier à la création d’entreprise. Mais l’intervention financière n’est qu’un volet des interventions mises en œuvre, car le besoin d’appui individualisé à la gestion a rapidement été manifesté par les créateurs. Les structures ont donc développé des dispositifs de formation ou d’accompagnement permettant aux promoteurs de mieux maîtriser les mécanismes d’une entreprise.
Le crédit solidaire est une manière de transformer les exclus en créateurs de richesse. En leur faisant confiance, on renoue le lien social.

Risham Badroudine

Chronique économique

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