Le secteur public à la française : des grèves mais aussi des dividendes

19 octobre 2007

Si les journées de grève ont baissé de 50% en 10 ans, elles persistent dans le secteur public. Mais on oublie que les entreprises publiques se portent bien, qui viennent de distribuer 4 milliards d’euros à l’Etat.

Les grèves des transports publics sont de celles que l’on subit et que l’on voit : les médias vont nous abreuver de ces cohortes de bons travailleurs qui voudraient bien travailler, mais qui en sont empêchés par les nantis qui veulent défendre leurs privilèges. La France est un pays peu syndiqué, mais où les grèves sont relativement plus importantes qu’ailleurs, notamment dans les pays très syndiqués comme la Suède, le Danemark ou les Pays-Bas. D’autres pays, comme l’Espagne, font autant grève que la France. L’Angleterre aussi. L’Italie un peu plus. La France n’est donc pas un pays de paresseux. La très sérieuse et officielle Agence française pour les investissements internationaux situe la France dans la « moyenne basse », en termes de jours de grève, par rapport aux économies comparables. Le nombre de journées non travaillées a diminué de plus de 50% depuis 1996. Mais la France est un pays où le secteur public est encore bien défendu, de sorte que les grèves du secteur public sont devenus plus importantes, en termes de jours sans travail, que celles du privé.

Le privé ne fait plus grève. Pourquoi ? Parce que les gens sont de plus en plus heureux, avait dit un jour un homme plein d’humour, M. Denis Gautier Sauvagnac, à l’émission “Ripostes”. Non. Il est probable que l’on a de moins en moins le courage de faire grève, chômage et relations de compétitions avec les autres salariés obligent. Voilà pourquoi on parle de grève « par procuration grâce au secteur public ». C’était le grand motif des grèves de 1995, extrêmement populaires, les gens disant : nous, on ne peut pas faire grève, on n’est pas protégés, mais vous qui l’êtes, d’une certaine manière, vous nous protégez. Dans la grève du secteur public, où les consommateurs sont “otages” entre guillemets, il y a aussi du combat par procuration. Le problème de la grève est qu’elle pénalise les non grévistes, mais profite aussi aux non grévistes, car si les grévistes obtiennent certains avantages, ils seront étendus aux non grévistes.

Et, en plus, on ne peut pas accuser les grèves de torpiller les entreprises publiques... Car en ce moment, elles vont très bien. Elles vont même distribuer près 4 milliards d’euros à l’Etat propriétaire, à vous et à moi. Certaines ont le vent en poupe, comme la SNCF, qui devrait enfin voir son rôle accru en termes de transport de voyageurs et de fret. Ajoutons que la fameuse loi sur le service minimum, qui prendra effet en janvier 2008, n’implique aucun service minimum, mais une obligation de négocier calquée sur le modèle SNCF. Non : le seul reproche que l’on peut faire à cette grève est qu’elle est plus politique qu’économique. Mais si vous pouvez me tracer la frontière entre l’économie et la politique, je vous donne un crayon.

Bernard Marie
France Inter et Marianne2.fr


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