Signature des APE intermédiaires

Plus que jamais, une nouvelle gouvernance est indispensable

1er septembre 2009, par Geoffroy Géraud-Legros

Dispositif essentiel de l’extension des règles libérales de l’OMC dans notre région, le processus de négociation et de ratification des Accords de partenariat économique (APE) n’a pas impliqué les Réunionnais… pourtant, des perspectives ont été évoquées au sommet de l’Etat et relayées par les Etats-généraux de l’Outre-mer, afin de poser les bases d’une nouvelle gouvernance qui seule pourra réaliser l’insertion de notre pays dans son environnement régional.

Les APE ont été signés le 29 août 2009 entre 4 pays de la zone — Maurice, les Seychelles, Madagascar, le Zimbabwe — et l’Union Européenne.
Les APE vont bouleverser en profondeur la réalité économique et sociale des Réunionnais. En effet, les Accords font entrer les parties contractantes — dont La Réunion, Région Ultrapériphérique (RUP) de l’Union Européenne — dans le champ de la mondialisation ultralibérale issue des règles de l’OMC.
Supprimant les entraves à la « libre circulation » que constituaient jusqu’alors les droits de douanes, les barrières tarifaires ou les restrictions quantitatives (quotas), les APE permettent non seulement la pénétration du marché réunionnais par des biens produits dans la zone, mais aussi la délocalisation de la production et des services hors de notre île.
Ainsi, la signature de cette convention internationale intéresse-t-elle au premier chef les Réunionnais.

Les Réunionnais tenus à l’écart du processus

Néanmoins, ceux-ci n’ont pas eu voix au chapitre au cours du processus de signature.
Pourtant, la délégation européenne était nombreuse et comprenait, outre la baronne Catherine Ashton, Commissaire européenne au Commerce extérieur de l’Union Européenne, le représentant de la présidence suédoise de l’UE, la secrétaire d’Etat pour le Commerce extérieur du Portugal…
Les démarches de négociation et de finalisation des APE ont ainsi été menées pour les Réunionnais par des fonctionnaires et des juristes européens étrangers aux affaires réunionnaises, à la réalité économique réunionnaise et à la culture réunionnaise : par là, les institutions européennes ont montré qu’elles ne se sont pas départies des travers bureaucratiques qui ont bien souvent accompagné leur intervention et ont essuyé à de nombreuses reprises le feu de la critique.
A deux cents kilomètres à peine de Maurice, à quelques centaines de kilomètres de Madagascar, La Réunion entretient des relations profondes avec les pays de la région, et est profondément ancrée dans son aire, tant par l’origine de son peuplement et par sa culture, que par la dynamique d’initiatives multilatérales qui vont en se multipliant.
Ainsi, le récent Congrès de la WIOMSA a fait apparaître le rôle moteur de notre pays dans la recherche de solutions aux problèmes de la gestion durable des ressources maritimes ; au cours de cet évènement majeur sur le plan du savoir et de l’innovation, des intervenants de tous les pays ont témoigné du dynamisme de la politique réunionnaise en matière de développement durable dans notre zone.
Comment, au regard du rôle affirmé de La Réunion dans son environnement géographique et géopolitique, comprendre que des transformations économiques si décisives que celles des APE puissent s’accomplir sans que les Réunionnais soient admis à y faire valoir leurs points de vue et leurs arguments ? Comment admettre que les Réunionnais, qui seront les premiers à supporter les conséquences de la déréglementation des marchés, soient d’un bout à l’autre, exclus des négociations qui vont sceller leur destin ?

Pour une nouvelle gouvernance

A l’heure de la mondialisation, l’insertion simultanée de notre pays dans plusieurs ensembles économiques, politiques et humains cohérents nécessite un accroissement de la responsabilité réunionnaise, et donc une participation accrue des Réunionnais aux processus internationaux qui les concernent.
Or, le mode de gouvernance dans ce domaine n’offre ni la souplesse, ni l’ouverture nécessaires à une véritable prise en charge par les Réunionnais des aspects de l’évolution internationale qui se rapportent à leurs intérêts. Très présent au cours de la récente crise sociale de l’Outre-mer, ce constat est désormais effectué au plus haut niveau de la République, comme l’a fait apparaître le Président de la République lui-même à l’occasion du lancement des Etats-généraux.
La tenue de ces derniers a permis de donner une impulsion décisive à la réflexion sur l’insertion de La Réunion dans les échanges régionaux. Les fondements existent donc pour faire évoluer les lignes d’une gouvernance qui n’est plus adaptée aux réalités modernes : la distance entre La Réunion de Maurice, où a été signé l’accord, est plus courte que celle qui s’étend entre Paris et Bruxelles !

Geoffroy Géraud

MondialisationA la Une de l’actu

Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus