Inquiétude et mobilisation des salariés

Privatisation : grève à France Télécom

8 septembre 2004

L’ensemble des syndicats de France Télécom ont appelé à la grève hier contre la privatisation de l’entreprise. Ils craignent une diminution de la qualité du service public et protestent contre la dégradation des conditions de travail.

Journée de grève hier à France Télécom. À l’appel des syndicats de l’entreprise, le mouvement était provoqué par l’annonce, le 1er septembre dernier, de la privatisation de l’opérateur de télécommunication. D’après des chiffres de la direction, la grève était peu suivie.
Depuis plus de 10 ans, les gouvernements successifs ont contribué à faire échapper progressivement au contrôle des citoyens un service public indispensable au développement économique. La première étape se déroule sous le gouvernement Balladur avec la transformation en société anonyme. Puis cette politique est poursuivie par les socialistes français avec l’ouverture du capital de l’entreprise encore publique en 1997.

En décembre dernier, un texte de loi offrait la possibilité à l’État de devenir minoritaire, et cette option s’est concrétisée le 1er septembre dernier. Ce jour-là, Nicolas Sarkozy annonçait que l’État avait vendu suffisamment d’actions pour n’être plus majoritaire.
La direction s’est vantée de l’érosion du mouvement revendicatif. On ne peut que constater qu’au fil des années, privatisation rampante a rimé avec précarisation des postes de travail et diminution de la participation aux grèves.
"En octobre 1993, lors de l’annonce du changement de statut, le taux de grévistes avait été de 75%", précise la direction de l’entreprise, "en mai 1995, au moment de la transformation en société anonyme, on avait relevé 64% de grévistes et, en avril 1996, lors de l’introduction en bourse, 45,8%".
Par ailleurs, cette marche vers la privatisation s’est accompagnée de milliers de suppressions d’emplois. Rien que l’année dernière, 13.100 postes ont disparu, dont 7.700 en France. Et pour cette année, la casse est encore plus importante : 14.500 au total, dont 8.800 suppressions en France.
Les salariés sont inquiets. Un sentiment amplifié par la privatisation, note Marc Maouche, président de la CFTC-Télécom. Quant à la CGC, elle déplore une braderie d’une richesse nationale par l’État : "Huit mois après le passage de la loi sans aucune concertation, sans argument de politique industrielle, l’État brade 20% des parts qu’il détient pour renflouer sa caisse", a déploré pour sa part la CGC dans un communiqué.
Quant à la CGT, dans une déclaration publiée hier, elle dénonce la dégradation des conditions de travail à France Télécom et dans les autres entreprises privatisées (voir encadré) .


À qui le tour ?

"Du côté des salariés de France Télécom, dont les conditions de vie et de travail se sont dégradées depuis l’ouverture du capital en 1997, la note risque d’être encore plus sévère", affirme la CGT dans une déclaration diffusée hier sur son site. "Pour satisfaire les investissements privés, la direction a déjà supprimé 8 800 emplois en France en 2004 et en annonce des milliers d’autres dans les années à venir".
"L’inquiétude est grande dans le groupe tant, chez les salariés du privé que chez les fonctionnaires. Mais elle touche aussi tous les salariés des entreprises à participation publique", ajoute la confédération.
"Qui seront les prochains sur la liste ? Air France, Aéroports de Paris, Thales, Areva, les Autoroutes SNANEF et SAPRR, GDF, EDF..?", s’interroge-t-elle.
"Cette politique qui ignore superbement les enjeux industriels et de service public, est dangereuse. Avec la crise qu’a traversée France Télécom ou Alstom, on a encore vu récemment comment ces entreprises privatisées pouvaient devenir fragiles", alertent les dirigeants syndicaux.

Et de préciser : "on a vu certaines comme Péchiney passer brutalement sous contrôle américain. On a aussi noté que dans des secteurs comme l’électricité ou le rail, les privatisations à l’étranger ont abouti à une augmentation des prix et à une dégradation des services pour les usagers". La CGT estime que des alternatives existent : "Des alliances à l’international peuvent se nouer sans passer sous les fourches caudines des marchés financiers".


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