À La Réunion, toutes les marchandises importées et exportées sont soumises aux tarifs décidés par les compagnies maritimes. Manifestement, ces sociétés ont profité de la crise causée par la guerre en Ukraine pour augmenter abusivement leurs profits. C’est ce que rappelle la décision de CMA-CGM de baisser d’un coup de 500 euros par container ses tarifs pour les marchandises importées à La Réunion ou devant être exporté de notre île. Nul doute que des pressions en haut lieu ont provoqué cette décision afin de contribuer au maintien de la paix sociale à La Réunion notamment : CMA-CGM a en effet réalisé un bénéfice de 6,9 milliards d’euros en un trimestre, comme l’a rappelé le journal télévisé de France 2. Personne ne peut croire qu’en appliquant une baisse de 500 euros par container, CMA-CGM va travailler à perte, compte-tenu de la hausse très importante du coût du fret maritime ces derniers mois : les salaires des marins et des autres travailleurs de ce secteur sont très très loin d’avoir connu une telle évolution.

Gazole : 6 centimes de plus qu’en France pour le prix hors taxes du litre

Pendant ce temps, le prix des carburants bat des records à La Réunion : 1,32 euro pour le prix hors taxes du litre de gazole sans la remise de 15 centimes de l’État qui va dans les caisses des compagnies pétrolières. Toutes taxes comprises, le prix du litre du carburant le plus consommé à La Réunion s’élève à 1,79 euros, soit 1,64 euros après versement de la subvention de l’État.
En France, les taxes sont plus importantes. Sachant que le prix moyen TTC qui y est observé se situe aux environs de 2,10 euros par litre, le prix moyen du litre de gazole hors taxes est approximativement de 1,26 euros sans la remise. Autrement dit, le litre de gazole hors taxes est 6 centimes plus élevé qu’en France. Ceci est le résultat des bénéfices des compagnies pétrolières faites sur le dos des Réunionnais. Ceci montre que quand des transporteurs demandent la fin des taxes sur les carburants qu’ils payent, cette revendication a pour effet de jeter le trouble dans l’opinion.
Cette différence est le résultat d’un système : le public ne connaît pas quelle est la répartition des marges sur le prix du carburant à son arrivée à La Réunion. C’est l’opacité la plus totale, seuls sont connus les montants des différentes taxes, dont celui de la taxe sur la consommation qui a une valeur fixe et qui n’a pas bougé depuis 20 ans.
Rappelons qu’en novembre 2018, Didier Robert, alors président de la Région Réunion, avait voulu aligner le montant de la taxe perçue par sa collectivité sur celui de la taxe collectée en France. La Région escomptait engranger 100 millions d’euros par an de la sorte. Mais la population était vigilante et a fait échouer ce projet lors de l’importation du mouvement des gilets jaunes : le 19 novembre 2018, des jeunes de Vauban et des Camélias ont marché sur le siège de la Région qu’ils ont occupé, malgré la présence de dizaines de gros bras, pour demander des comptes à Didier Robert. Résultat : le budget 2020 de la Région Réunion était en baisse de plus de 200 millions d’euros au lieu de plus de 100 millions par rapport à 2019, car l’échec de la hausse de la taxe perçue par la Région présidée par Didier Robert était passé par là.

Les pétroliers contribuent aux hausses des prix en cascade partout à La Réunion

Selon le journal télévisé de France 2, une seule compagnie pétrolière, Total, a accumulé 4,7 milliards d’euros de bénéfices au premier semestre. C’est la conséquence de la flambée des prix des carburants suite au déclenchement de la guerre en Ukraine, qui ne couvre pourtant que la moitié de ce premier semestre. Or, l’Ukraine est poussée par l’OTAN à refuser de faire la paix avec la Russie. Si un coup d’arrêt à ce scandale n’est pas donné rapidement, les prix des carburants vont continuer à afficher des tarifs très élevés pendant encore longtemps. Ceci ne manquera d’encourager une baisse de la consommation, et donc une diminution de la recette de la taxe sur la consommation, alors que les dépenses liées à l’entretien du réseau routier, aux transports collectifs et aux investissements dans la mobilité ne diminuent pas.
Sachant également que la totalité des marchandises sont transportées dans des véhicules qui fonctionnent avec des carburants achetés à prix d’or aux compagnies pétrolières, cette situation favorise une hausse générale de tous les prix qui est payée par tous les Réunionnais, qu’ils soient automobilistes ou pas.

En 2009, la mobilisation a fait baisser les marges des compagnies pétrolières

En 2009, le maintien du prix du gazole autour de 1 euro par litre, pendant que le prix du baril de pétrole s’effondrait, avait été un élément déclencheur d’un vaste mouvement social autour du Collectif des organisations syndicales, politiques et associatives (COSPAR).
Les Réunionnais ne doivent pas oublier qu’en 2009, avec le COSPAR, ils ont obtenu une baisse immédiate des prix des carburants et du gaz prise sur les marges des compagnies pétrolières, et le gel de ces prix pendant 6 mois. CMA-CGM vient d’être contraint de baisser de 500 euros par container ses tarifs pour l’acheminement des marchandises importées. Aux pétroliers de stopper leurs profits abusifs à La Réunion, à condition que l’opinion réunionnaise prenne conscience de l’identité des « profiteurs de guerre » et se mobilise pour cette juste cause.

M.M.