Élections à la CCIR

Tous magouillent, un seul à toutes les qualités

24 novembre 2004

(Page 5)

"Un recul de trente ans en arrière", tel est le constat unanime à propos des récentes élections à la Chambre de Commerce. la fraude a en effet atteint des proportions “dignes” des pires élections truquées des années 50, 60 et 70.
Les Réunionnais ont pu voir se dérouler sous leurs yeux, quasiment dans les conditions du “direct”, les multiples avanies faites scrutin devant désigner la nouvelle équipe dirigeante. Tous les coups sont permis n’ont cessé de répéter certains. Seul le résultat compte ! Moyennant quoi, on a fabriqué et utilisé de fausses enveloppes, fabriqué et utilisé de faux tampons officiels, falsifié les listes électorales, acheté des enveloppes contenant le matériel de vote d’électeurs corrompus, vraisemblablement pris connaissance par des moyens frauduleux des noms de personnes ayant voté sans en référer à ceux qui les démarchaient pour “collecter” leur enveloppe, etc., et quand un électeur “Hoareau” apparaissait comme ayant certainement voté pour un adversaire, on expédiait un nouveau vote, au nom de ce même électeur “Hoareau”. Placée en présence d’un double vote, la Commission des Opérations Électorales (COE) n’avait d’autre solution que d’annuler les deux votes : le vrai et le fraudé. Ce faisant, le fraudeur obtenait que ce soit la COE elle-même qui anéantisse le vote honnête de l’électeur “Hoareau”. Les procédés déloyaux sont allés tellement loin que, selon certains, le contenu d’enveloppes scellées par les électeurs et collectées par un “zakaparèr lanvelop” auraient été ouvertes pour “vérification” du contenu. D’où l’accusation selon laquelle la “vérification” serait allée jusqu’à la “modification”.

Confrontées à de tels agissements, certains candidats se sont pourvus devant le juge électoral. Le Préfet, lui, a eu sur sa table toutes les preuves de la fraude la plus visible qui a conduit à l’annulation de 3.000 votes (27% du total des votants). Il a donc saisi le Procureur de la République qui a diligenté une enquête.

Il est donc prouvé désormais que la fraude directe a été systématique. La fraude indirecte se révèle peu à peu : 300 taxiteurs ont subitement décidé, du fait de leur seule volonté (?), de se faire inscrire en tant que ressortissants de la Chambre de Commerce alors qu’ils relèvent de la Chambre des métiers afin de rafler les sièges du collège Transport. Les vrais transporteurs qui, en ce moment même, sont confrontés à des problèmes de survie n’ont donc plus personne pour les défendre. Et ne parlons pas des morts qui votent, des marchands de légumes et de fruits qui sont classés dans le collège banquiers ou assureurs !

Le scandale est tel que des personnes, pourtant élues et sorties victorieuses de ces élections ont estimé que leurs valeurs, leur conception du rôle de la Chambre de Commerce, leur interdisait de se satisfaire d’une victoire acquise dans des conditions aussi déshonorantes. Ces personnes ont donc pris l’initiative de demander que les élections soient annulées et qu’on les recommence dans d’autres conditions. En agissant de la sorte, c’est l’honneur de la chambre consulaire qu’elles auraient restauré de la façon la plus nette qui soit. Pas de mandat ramassé dans la boue signifiait leur démarche. Quelle n’a pas été leur déception de constater que l’un des leurs repoussait toute possibilité de réhabilitation d’une institution pourtant déjà fort décriée (1).
Refusant d’être éclaboussés par un tel scandale, ceux qui souhaitaient de nouvelles élections ont préféré démissionner.

“Témoignages” a déjà rapporté les injures, insultes et procès d’intention dont ont été l’objet celles et ceux qui se sont opposés à leur colistier Magamootoo.

Mais ce déferlement d’accusations et d’insultes n’a manifestement pas suffit à apaiser la colère de M. Magamootoo. Hier, dans le “JIR” et “le Quotidien”, il a repris ses propos désobligeants sur une pleine page à chaque fois. (voir encadré)

Ces interviews paraissant hier mardi ont donc été réalisées avant hier, lundi.

Or, avant hier est précisément le jour où les “alentours” de M. Magamootoo donnaient une nouvelles version de l’attitude du Président Pascal Thiaw-Kine. On se souvient que, dans la presse de samedi dernier, M. Magamootoo affirmait que le président Thiaw-Kine voulait "offrir la victoire des PME au Medef " (“Quotidien”) ; "aux termes de la motion présentée par le président Pascal Thiaw-Kine, il a été proposé d’offrir la victoire des PME au Medef" (“JIR”). En clair, M. Pascal Thiaw-Kine était devenu le porte-parole du “grand capital”.
Lundi, la “rumeur” se voulait encore plus perfide accusant M. Thiaw-Kine d’être dans la main du groupe Casino, rien que ça ! Et pour demain, ça sera quoi ? Et dire que, pendant sa campagne électorale, Monsieur Magamootoo prônait la réconciliation ...

Mark Alem

(1) - Selon le baromètre BFC-L’Éco Austral-Antenne Réunion réalisé par Ipsos Océan Indien en octobre dernier, 46% des chefs d’entreprise font peu ou pas confiance à la Chambre de Commerce. (cf. “L’Éco Austral” n° 182, novembre 2004, p.14).





Trente années en arrière !

Au “JIR”, M. Magamootoo déclare :
"Le président de la Cgpme a considéré à tort que l’image de son syndicat pouvait pâtir de cette situation".
"À tort" ! Tout est dit : 3.000 votes annulées et transmis au Procureur de la République qui a aussitôt diligenté une enquête ... "à tort" sans doute !

[M. Pascal Thiaw-Kine] "a donc préféré se retirer alors que ni le juge pénal, ni le juge de l’élection ne se sont prononcés. Or personne ne peut se substituer aujourd’hui aux magistrats et condamner avant l’heure des élus issus du suffrage universel".
C’est quasiment mot pour mot le discours tenu, dans les années 50, 60 puis 70, par ceux qui ne rechignaient pas à ramasser leurs mandat dans la boue d’une fraude qui, si elle a été avérée depuis, était alors niée : "Le Tribunal administratif a rejeté tout allégation de fraude. L’élection de M. Untel est ainsi reconnue comme ayant été parfaitement régulière", etc. Aujourd’hui plus personne ne nie le scandale de la fraude électorale de cette époque.

Ne pouvant nier le panachage réalisé sur des centaines de bulletins avec le même stylo et la même écriture, M. Magamootoo refuse l’évidence : "En ce qui concerne le panachage, nous sommes clairs : le juge de l’élection, c’est le tribunal administratif. Il est le seul compétent pour dire si oui ou non le déroulement de la campagne et des élections a eu une influence sur le vote. En dehors de ces deux axes, personne, je dis bien personne, ne peut porter un jugement quelconque" (“Le Quotidien” 23.11.2004).

Rions un moment sur cette perle, seuls les juges peuvent dire "si oui ou non le déroulement de la campagne et des élections a eu une influence sur le vote". Ah bon ? Nous qui pensions bêtement qu’une campagne électorale était destinée à avoir une influence sur les électeurs. Quant aux élections, nous ignorions que seul le juge et personne, je dis bien personne, n’avait le droit de dire si elles avaient ou non eu une influence sur le vote !

Mais on cesse rapidement de rire en lisant cette déclaration révélatrice du la haute opinion que M. Magamootoo a de M. Magamootoo.
"J’ajoute que c’est l e meilleur d’entre nous pour ses compétences et ses convictions qui sera élu. C’est à l’issue du travail que nous avons entamé sur le protocole de gouvernance que cet homme sera désigné. Je serai ce candidat [...]" (“Le Quotidien” 23.11.2004)


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