Projet de loi au Parlement

Un accord pour les pêches dans le Sud de l’océan Indien

28 juillet 2012

L’exposé des motifs permet de se rendre compte de l’importance stratégique de La Réunion dans le dispositif d’exploitation des richesses de l’océan Indien. Voici quelques extraits :

Longtemps les ressources de la mer sont apparues inépuisables. La situation a totalement changé du fait de l’augmentation des besoins d’une population en constante progression, qui a engendré des campagnes de pêche de plus en plus lointaines avec des équipements de plus en plus sophistiqués. Le taux annuel de capture avait déjà atteint 80 millions de tonnes par an il y a quinze ans et l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (OAA/FAO) faisait alors état de données selon lesquelles la biomasse de la plupart des espèces se situait à un niveau critique. La gestion inadaptée des ressources marines vivantes et les perspectives de surexploitation, voire de disparition des stocks ont été perçues depuis longtemps pour certaines espèces (phoque à fourrure en 1911, flétan du Pacifique en 1923, saumon sockeye du fleuve Fraser en 1930, baleine en 1931), mais c’est surtout après 1945 que les Organisations régionales de gestion des pêches (ORGP) se sont développées pour une espèce ou une région donnée, comme une des voies privilégiées pour sauvegarder des ressources aujourd’hui menacées par la pression démographique et l’industrialisation à outrance du secteur de la pêche. (…)

2,7 millions de kilomètres carrés

Les compétences en matière de pêche ont été entièrement transférées à l’Union européenne, avec toutefois une exception pour les pays et territoires d’Outre-mer (listés en annexe II du TFUE) non inclus dans le territoire de l’Union . L’Union européenne est déjà partie au présent accord, qu’elle a approuvé en 2008. Dans le Sud de l’océan Indien, à l’instar de la France, l’Union a le statut d’ « État côtier » (au titre de l’île de La Réunion) et celui d’État pêcheur, car plusieurs navires battant pavillon de pays de l’Union y pratiquent la pêche. La France a la qualité pour devenir partie à l’accord, en son nom propre, aux côtés de l’Union, car les territoires d’Amsterdam et de Crozet sont, aux termes du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), des Pays et Territoires d’Outre-mer (PTOM). (…)

En ce qui concerne l’océan Indien, la France a un intérêt particulier à ratifier cet accord puisque l’insularité qui caractérise les territoires français de l’océan Indien lui confère une zone économique exclusive dans la région de 2,7 millions de km carrés, soit environ un quart du domaine maritime français, et neuf fois la zone métropolitaine.

Un accord de défense des ressources naturelles

La frontière entre sa ZEE et la haute mer est une des plus longues, sinon la plus longue, dans la zone de compétence de l’accord : elle est donc un État côtier incontournable qui doit veiller à ce que la pêche réalisée dans sa ZEE ne soit pas altérée par une surpêche qui aurait lieu en face de sa ZEE. La France peut justifier d’une signature propre de cet accord, qui s’ajoute à celle de la Communauté européenne, pour les cas où ses territoires non communautaires pêchent sous leur pavillon ou ont l’intention, à plus ou moins long terme, de le faire. Les stipulations de l’accord lui permettront de défendre ses ressources naturelles, en particulier les stocks pélagiques dits « chevauchants » (c’est-à-dire circulant entre sa ZEE et la haute mer), qui se situent majoritairement dans les eaux internationales jouxtant sa ZEE et qu’elle pourrait vouloir pêcher au-delà de sa ZEE. L’accord lui donne également les moyens de combattre la surpêche en face de sa ZEE d’États pêcheurs qui cherchent à optimiser leurs droits de pêche hors-ZEE tant que l’accord n’est pas entré en vigueur.

Dispositions de l’accord

Dans cette zone, deux organismes existent déjà : la Commission du thon de l’océan Indien (CTOI/IOTC, compétente pour le thon et les espèces apparentées et couvrant les ZEE et la haute mer) et la Commission des pêches de l’océan Indien du Sud-Ouest (CPSOOI/SWIOFC, couvrant toutes les espèces, sans préjudice des activités de la CTOI, mais seulement dans les espaces maritimes sous juridiction nationale), dont la France est membre. Mais aucune ORGP ne couvrait les espèces non thonières en haute mer et le présent accord relatif aux pêches dans le Sud de l’océan Indien vise précisément à pallier ce vide juridique.

L’accord a donc pour objectif d’assurer la conservation à long terme et l’utilisation durable des ressources halieutiques dans la zone considérée par la coopération entre les parties contractantes et d’y promouvoir le développement durable des pêches (article 2). A vocation à être partie à l’accord « tout État ou organisation d’intégration économique régionale » ( telle l’Union européenne) ayant consenti à être lié par l’accord (article 1 e). L’organe principal est la réunion des États parties, qui a lieu au moins une fois par an (article 5. 2) et prend des décisions sur les questions de fond par consensus (article 8 1. : à noter par comparaison que la CTOI prend ses décisions les plus importantes à la majorité des deux tiers seulement) et sur les autres questions, à la majorité simple des présents et votants (article 8 2.). La réunion des États parties est assistée par un comité scientifique permanent (article 7 1.), par un comité d’application (article 7 2.) qui vérifie la bonne application des décisions de la réunion des États parties, et par un Secrétariat (article 9).

« Un quart des captures de la flotte de pêche française »

« Selon un rapport du Sénat de 1996, l’océan Indien représente un quart des captures de la flotte de pêche française, tous poissons confondus, et de 62% des prises de thonidés (cette proportion est de 3,5% pour l’Atlantique, et de 1,9% pour le Pacifique) ».
Les enjeux de la pêche pour la France dans l’océan Indien

Cet extrait du rapport dresse un état des lieux de la pêche dans la zone économique exclusive dépendant des TAAF.

La présence française dans l’océan Indien repose certes d’abord sur La Réunion et Mayotte. Mais il ne faut pas négliger les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), avec les îles Crozet, Saint-Paul et Amsterdam, ainsi que l’archipel de Kerguelen, qui nous valent une très vaste juridiction maritime. Si Kerguelen ne se situe pas dans la zone couverte par le présent accord SIOFA, c’est en revanche le cas pour Crozet (partiellement), Saint-Paul et Amsterdam. La France, dans l’océan Indien, jouit à la fois du statut d’État côtier, au titre de ces différents territoires, et d’État pêcheur, car plusieurs navires battant pavillon français y exercent.

(…)

Une zone économique exclusive a été établie autour des îles Crozet et Saint-Paul et Amsterdam. La pêche y est exercée exclusivement par des armements français. Les espèces ciblées sont la légine (poisson des grands fonds très apprécié sur les marchés asiatique et américain et ayant une forte valeur marchande) et la langouste. Le volume total des captures autorisées pour la légine dans la ZEE de Crozet s’établit à 700 tonnes tandis que celui qui s’applique à la langouste dans la ZEE d’Amsterdam s’élève à 400 tonnes.

Selon un rapport du Sénat de 1996, l’océan Indien représentait alors un quart des captures de la flotte de pêche française, tous poissons confondus, et 62% des prises de thonidés (cette proportion étant de 3,5% pour l’Atlantique et de 1,9% pour le Pacifique). La frontière entre la ZEE française et la haute mer est une des plus longues, sinon la plus longue, dans la zone de compétence de l’accord relatif aux pêches dans le Sud-Ouest de l’océan Indien. La France est donc un État côtier incontournable, avec un intérêt évident à disposer d’instruments lui permettant d’éviter une éventuelle surpêche dans les eaux internationales voisines de sa ZEE.

La pêche française est pratiquée par quatre sociétés d’armements (SAPMER, CAP Bourbon, la COMATA et Pêche Avenir) et au moins quatre navires (un navire par armement, d’une longueur de 35 à 55 mètres). Ces navires effectuent des campagnes de 2 à 3 mois, essentiellement dans les eaux sous juridiction française incluses dans la zone de compétence de la CCAMLR, organisation en charge des eaux de l’Antarctique. Les temps de pêche de ces navires dans la zone SIOFA qui est l’objet du présent accord sont limités à une dizaine de jours par marée et les volumes qui y sont pêchés sont également limités. Les captures réalisées (essentiellement de la légine) sont bien valorisées commercialement. Elles sont transformées et conditionnées à La Réunion puis exportées ensuite.
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