Projet Pôle Océan de Saint-Denis : des commerçants inquiets

Un projet ambitieux mais des méthodes contestées

24 juin 2004

Le projet Pôle Océan proposé par la Mairie de Saint-Denis vise à offrir des espaces commerciaux multi-fonctionnels prenant en compte les dimensions de plaisir et de loisir liées à l’achat. « Un projet moderne », pour Amine Alibhaye, président de l’ACOD (Association des commerçants dionysiens), qui reconnaît que c’est « à la fois un atout pour le centre-ville mais aussi un défi exceptionnel pour les commerçants actuels ».

Cependant, l’évaluation des indemnisations d’expropriation semble dérisoire à la cinquantaine de commerçants situés sur le tracé. Alors que l’on parle d’un coût de 150 millions d’euros pour la réalisation d’un tel site, la SODIAC (Société dionysienne d’aménagement et de construction) propose de racheter à la moitié, voire au tiers, de leurs valeurs les biens des commerçants.
Bernard Melloni, expert en évaluation immobilière, constate que la valeur du bâtiment, la prise en compte de l’activité, du fonds de commerce, des frais de relogement, de licenciements... sont occultés par l’autorité expropriante. "La question d’une indemnisation juste et équitable est capitale", affirme Amine Alibhaye.
Bernard Melloni, qui a élaboré des dossiers d’estimation complets, constate en outre qu’il existe des "disproportions car des terrains voisins ont des valeurs totalement différentes". Beaucoup sont propriétaires de leur commerce. Cela fait plus de cinquante ans qu’ils vivent et travaillent dans ce quartier du bas de la ville à laquelle une forte valeur sentimentale et patrimoniale les y rattachent. Ce qui fait dire au président de l’ACOD que "les droits fondamentaux, humains, la fierté, la dignité ne sont pas respectés dans ce dossier".
Et au-delà se pose également la question du droit au retour sur le site. Qui va s’y implanter ? Quels investisseurs ? Le droit à l’emploi des Réunionnais sera-t-il de rigueur ? Par manque d’information et de concertation, les inquiétudes sont bien réelles.
Autre problème posé par le président de l’ACOD : "l’équipement actuel du centre-ville de Saint-Denis n’est pas à la hauteur de ce nouveau site". En effet, les éternelles questions de l’insécurité, du stationnement, du manque d’animation... restent toujours en suspens et auraient, selon les commerçants, mérité des mesures préalables. Même avec le parking de 1.200 places qui doit s’ouvrir au bas de la rue Maréchal Leclerc, l’ACOD accuse la Mairie de manquer d’"anticipation" car aucune voie périphérique n’est prévue pour répondre aux besoins en stationnements du carré piéton.
L’ACOD craint que la gestion du centre-ville et celle du nouveau site ne puissent cohabiter harmonieusement : "Comment deux types de commerces peuvent-ils coexister ?", interroge Amine Alibhaye qui souhaite un vrai débat entre tous les acteurs.
C’est pourquoi il demande à la Mairie "une expertise originale se démarquant par le souci d’une approche globale du commerce en ville et l’engagement pour un développement durable pour tous : ville, enseignes et consommateurs. Plus qu’un maître d’œuvre, un opérateur global respectueux des droits et devoirs de chacun".

Estéfany


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