Élections à la CCIR

Un scrutin décrié

8 novembre 2004

C’est aujourd’hui que seront dépouillés les votes à la Chambre de commerce et d’industrie de La Réunion et les résultats proclamés. Quelle que soit l’issue de ce scrutin, l’institution n’en sortira pas grandie.

Tour à tour, les responsables de trois organisations syndicales, Pascal Thiaw Kine pour la CGPME, Paul Martinel pour le MEDEF et Franck Robert du SABR ont mis en cause les conditions dans lesquelles le scrutin s’est déroulé.
La généralisation du vote par correspondance a... généralisé le recours à des pratiques douteuses, dont certaines rappellent celles des années 60/70 lorsque la fraude électorale était courante. On a vu un maire convoquer des commerçants et artisans de sa commune en présence d’un ancien collaborateur et candidat à la Chambre et les menacer de leur couper les accès aux marchés municipaux s’ils votaient mal. On a vu des candidats faire pression, menacer, acheter des votes. Dans un petit pays comme l’est La Réunion et dans un milieu relativement fermé, tout se sait. Personne n’est donc dupe et tout le monde connaît que les résultats qui seront proclamés aujourd’hui sont loin de correspondre à la réalité.
Dans une île au marché très exigu, les rivalités nées d’une concurrence très exacerbée ont du mal à se cicatriser. Tel responsable de société ne votera pas pour tel autre responsable de société, concurrent à la Chambre parce qu’ils se retrouvent, professionnellement, concurrents tout en appartenant au même syndicat.
La fragilité du tissu économique -et donc du corps électoral- ouvre la voie à des pratiques détestables. 90% des entreprises réunionnaises emploient moins de 10 personnes. Dans le BTP, secteur le plus développé, la sous-traitance crée des liens d’obligation. Les chances de survie d’une entreprise restent ici très faibles. "Sur 4.000 entreprises créées chaque année depuis 1995, seules 2.200 parviennent à fêter leur troisième anniversaire. Les chances de survie varient selon le secteur d’activité, le BTP et le commerce connaissent des difficultés alors que l’immobilier semble plus pérenne." (“TER” 2004-2005). Dans un tel contexte, les plus forts peuvent faire étalage de leur force quand cela est nécessaire.
Là-dessus, s’est ajoutée une extrême politisation du scrutin. Cela est dû à la participation comme candidat d’un responsable du PS. Son parti s’est cru obligé de prendre position dans une élection professionnelle, en appelant à sanctionner ceux qui soutiennent le gouvernement Raffarin. Ce candidat a obtenu le soutien d’élus de l’UMP à qui il a promis un retour d’ascenseur de la part de son parti : présence aux municipales de Saint-Pierre pour gêner une liste de l’Alliance, pacte de non-agression pour la prochaine législative vis-à-vis du député sortant de la troisième circonscription, etc.
Le mode de scrutin par collèges et la multiplication des candidatures n’assurent à aucune liste la garantie de l’emporter seule. Dans les jours qui viennent se multiplieront les tractations. Certaines ont déjà commencé. On discutera de postes de vice-présidences ou autres avantages. Avec même la possibilité d’un retour d’ascenseur pour l’élection en mars à la Chambre des Métiers où la plupart des acteurs présents ces jours-ci devraient se retrouver. Ce qui constitue une bizarrerie locale.
Quand on a en tête le montant du budget géré par la CCIR, quand on pense qu’elle a sous sa responsabilité l’aéroport de Gillot et le port de la Pointe des Galets ainsi qu’un important dispositif de formation, on se dit que la campagne électorale n’était pas à la hauteur de la situation et des enjeux.


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