Créatrices d’entreprise et entrepreneuses

Une autre entreprise, une autre société

7 juillet 2005

Les personnes de sexe féminin ont d’autres visions du monde, un autre modèle entreprenarial passant du mode compétitif au mode coopératif. Elles sont souvent meilleures gestionnaires et plus réalistes. Par rapport aux personnes de sexe masculin, elles sont confrontées à un deuxième niveau de difficulté d’ordre familial et domestique. C’est le diagnostic de la Délégation régionale des Droits de la Femme et de l’Égalité qui cherche les moyens de lever les obstacles.

(page 4)

C’est sous l’impulsion de la délégation régionale aux Droits des Femmes et à l’Égalité qu’une vingtaine d’entrepreneuses se sont données rendez-vous hier à la Direction du travail de l’emploi et de la formation. Cette réunion qui clôturait une série de rencontres dans chaque secteur de l’île a été l’occasion de présenter un diagnostic sur l’entreprenariat féminin à La Réunion et de réfléchir ensemble à des axes de développement.

Femmes et entreprises : diagnostic

L’étude de Marie Dupont fait ressortir que les créatrices d’entreprise interviennent majoritairement dans des domaines très ciblés : le commerce et les services aux particuliers, l’éducation, la santé, l’action sociale... Ce qui donne déjà une idée de l’entreprise au féminin.
Bien que les montants investis à la création de l’activité soient similaires d’un sexe à l’autre, la proportion d’hommes est toujours supérieure à celle des femmes.
Quand les hommes créent leurs entreprises, ils sont généralement en activité, alors que les femmes sont, à part égales, soit en activité, sans activité ou au chômage depuis plus d’un an. Il y a trois fois plus de femmes sans activité qui créent leur entreprise que d’hommes.
Si les femmes sont généralement plus diplômées que les hommes, la validation de l’expérience professionnelle reste un atout majeur, encore à valoriser, pour celles qui ont un potentiel certain, sans avoir de diplôme.

L’entreprise, autrement

Marie Dupont fait également apparaître que les femmes sont porteuses d’un autre modèle entreprenarial qui répond aux besoins de la population (commerces de proximité, services aux personnes, activités artisanales et culturelles) et concilie développement du territoire, amélioration de la qualité de vie et valorisation des productions locales. Les cheffes d’entreprise partagent la pratique d’un management passant du mode compétitif au mode coopératif où la qualité des résultats est plus marquée que la recherche du pouvoir. Consciencieuses et volontaires, elles créent beaucoup de petites entreprises, pérennes. L’entreprenariat féminin est un fort potentiel de croissance économique qui doit être encouragé. Il est possible d’accroître fortement le nombre de créatrices d’entreprises si on lève les obstacles.

Double fardeau pour les femmes

L’entreprenariat féminin présente deux niveaux d’obstacles. Le premier, commun à tout créateur d’entreprise, concerne la difficulté de mobiliser les moyens financiers, de se repérer dans la diversité des aides et des acteurs, de supporter la lourdeur administrative et d’avoir un suivi après la création. Le deuxième niveau d’obstacles rencontré par les femmes relève des responsabilités familiales et domestiques encore peu partagées auxquelles s’ajoute un déficit de solutions pour la prise en charge des enfants.
Le rôle du conjoint (soutien, critiques ou blocages) est aussi un facteur décisif. Ayant une expérience moindre du monde du travail, elles ont une culture d’entreprise moins forte. Des stéréotypes dépassés limitent leur accès à certains métiers. Parfois isolées, avec une faible mobilité, les femmes d’entreprises sont coupées des structures d’accompagnement.

Un nouveau modèle d’entreprenariat

Pour que les structures d’appui à la création connaissent mieux l’entreprenariat féminin, il faut faciliter la collecte des données, avec le concours des institutions bancaires, favoriser l’exemplarité des initiatives innovantes et améliorer la communication pour dire quelles solutions existent pour quels obstacles. Un meilleur accès au service d’aide, un service inter-entreprises de garde d’enfant permettraient par exemple d’alléger le double fardeau des responsabilités professionnelles et familiales. Pour se développer dans des filières plus techniques comme les TIC, l’entreprenariat féminin a aussi besoin de formations adaptées. Pour développer la culture d’entreprise, il faut très tôt inciter les jeunes filles à prendre des responsabilités dans les conseils de classe, les associations. Le financement des entreprises appartenant aux femmes peut être facilité grâce au Fonds de Garantie à l’Initiative des Femmes, il existe une gamme d’instruments disponibles et qui ne sont pas toujours connus. Il s’agit aussi de sensibiliser les banques aux atouts de l’entreprenariat féminin pour assurer un accès équitable au financement.
Les ateliers femmes et les réseaux de créatrices et d’entrepreneuses, comme Entreprendre au Féminin Océan Indien, peuvent permettrent aux porteuses de projet de rompre leur isolement et de promouvoir l’image positive de l’esprit d’entreprise au féminin et de renforcer leur représentation.

Eiffel


Frédérique Lebon, déléguée régionale aux Droits des Femmes et à l’Égalité veut mobiliser le vivier féminin. Aujourd’hui une personne sur deux se déclarant prête à créer une entreprise est une femme. Mais sur 100 personnes qui créent effectivement, seules 28% sont des femmes et 80% d’entre elles ont recours au crédit bancaire. À La Réunion, 25,5% des entreprises immatriculées sont dirigées par des femmes. Plus de la moitié d’entre elles étaient en demande d’emploi et 34% Rmistes. La création de leur activité a été un véritable tremplin vers une vie active considérée par la majeure partie comme une expérience enrichissante et épanouissante.
L’action du Ministère délégué à la cohésion sociale et à la parité vise à développer la création d’entreprise par les femmes et la pérennisation de leur activité. Le Fonds de Garantie pour l’Initiative des Femmes existe depuis 1989 mais a été mobilisé en dessous de ses capacités à La Réunion. La procédure était lourde et longue désormais le FGIF est mis en œuvre localement par Réunion-Entreprendre et l’Association des Projets.


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus