Le vote du rapport Fruteau sur la réforme de l’OCM-Sucre

Une position fragile

18 mars 2005

Le rapport de Jean-Claude Fruteau sur la réforme de l’OCM-Sucre, adopté il y a une semaine à une très forte majorité par le Parlement européen, reste très fragile. Tout se jouera en réalité lors du second semestre de cette année avec une étape importante, le 28 avril prochain.

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Jeudi dernier, réunis en session plénière, les députés européens adoptaient le rapport présenté par Jean-Claude Fruteau et Joseph Daul respectivement rapporteur et président de la commission Agriculture du Parlement européen sur la réforme de l’OCM-Sucre.
Ce texte comporte plusieurs aspects positifs : "le Parlement souligne que les réductions de prix proposées devraient être limitées à ce qui est strictement nécessaire, sans aller au-delà de ce qui est exigé pour satisfaire des règles de l’OMC. Les députés demandent le rejet du système de transfert de quotas proposé par la Commission (...). Le Parlement propose que le système actuel de soutien des prix soit conservé comme filet de sécurité pour empêcher un déséquilibrage sérieux du marché du sucre. En outre, un fonds spécifique devrait être établi pour permettre à ceux qui le souhaitent de quitter le système dans des conditions raisonnables, par la vente volontaire des quotas à l’Union européenne à un prix incitatif, dégressif avec le temps, pour une période limitée".

Fruteau fataliste

Or, ce vote très largement favorable du Parlement européen sur un texte comportant de nombreux aspects positifs n’a pas entraîné l’enthousiasme. Seul syndicat à s’être prononcé jusqu’ici, la CGPER a exprimé des réserves. Interrogé par Antenne-Réunion, Jean-Claude Fruteau s’est montré peu convaincant et fataliste. Il a déclaré, en substance, qu’il fallait accepter la réforme tout en cherchant à en limiter les dégâts.
Or, lors de la séance du Parlement européen de jeudi dernier, interpellée à la fois par le rapporteur et par le président de la Commission agricole du PE, la commissaire européenne à l’Agriculture, Mariann Fischer-Boel, est restée ferme et a confirmé la nécessité, l’urgence de la réforme ainsi que son contenu.
S’exprimant en anglais, la commissaire déclarait que l’UE a besoin d’une réforme de son organisation sucrière. Elle rappelait que les bases de la réforme restent la baisse progressive d’un tiers des prix européens garantis d’ici fin 2007 et la diminution des quotas de production ramenés de 17,4 millions de tonnes par an à 14,6 millions en 2008/09.
"Je suis convaincue qu’il s’agit d’un minimum nécessaire pour parvenir à une réforme efficace, équilibrer le marché et respecter nos obligations internationales", a-t-elle déclaré. "Moins nous irons loin maintenant, plus il est probable que nous devrons encore procéder à une réforme dans un avenir proche, avec l’incertitude qui ira de pair pour le secteur", a-t-elle fait valoir.

Tout se jouera en été

Mariann Fischer-Boel a précisé quel calendrier compte adopter la Commission. Rappelant que l’actuel règlement prend fin en juillet 2006, elle a estimé nécessaire d’arriver à un accord d’ici novembre pour que le secteur connaisse avec suffisamment d’avance le nouveau régime qui sera appliqué.
"Je crois que nous devons faire savoir à nos partenaires au sein de l’OMC, avant la conférence de décembre de cette année, quels sont les éléments importants de cette réforme, si nous voulons éviter que cette question du sucre ne gâche la réunion de Hong-Kong", a déclaré Mme Fischer-Boel. Si nécessaire, d’ultimes négociations pourraient donc avoir lieu avant la rencontre de l’OMC en décembre à Hong-Kong.
On pourrait aussi dire que le Parlement européen et sa Commission agricole se sont déterminés un peu hâtivement. Ils ont délivré leur point de vue sur le projet de réforme tel qu’il a été présenté en juillet dernier par Frantz Fischler, ancien commissaire européen à l’Agriculture. Or, celui-ci peut encore connaître des modifications.
L’organisation européenne du marché du sucre a été contestée auprès de l’OMC par le Brésil, la Thaïlande et l’Australie. L’UE a été condamnée pour avoir dépassé depuis 1995 le plafond d’exportation de 1,27 million de tonnes de sucre par an qu’elle s’était engagée à respecter. Bruxelles a fait appel.
Le projet de réforme présenté en juillet 2004 a donc été gelé et l’UE attend le résultat de l’appel interjeté pour affiner ses propositions. Le verdict définitif de l’OMC sur ce dossier est attendu pour le 28 avril.
Mme Fischer-Boel a indiqué jeudi dernier, à Strasbourg, qu’elle espérait présenter aux eurodéputés "avant l’été" ses propositions révisées pour cette réforme. Le rapport présenté par Jean-Claude Fruteau et adopté par le PE serait alors malheureusement presque un coup d’épée dans l’eau. Tout se jouera en réalité lors du second semestre de cette année avec une étape importante, le 28 avril prochain.

J. M.


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