Circuit des Métiers d’Art

Valorisons nos atouts

18 octobre 2004

Entre l’artisanat des petits métiers et l’artisanat d’art, La Réunion recèle un vivier de mains habiles. Pour faire de cet atout un outil de préservation du savoir-faire traditionnel et un secteur économique fleurissant, il faut professionnaliser la filière pour donner aux jeunes les clés de la formation qui ouvriront les portes de son entreprise.

Chaque année, le Salon Fait-Main est là pour nous révéler l’étendue des potentialités du savoir-faire artisanal réunionnais qui est parvenu, au fil des années, à concilier créativité et modernité, qualité et professionnalisme, dans le respect de notre identité.
Grâce aux concours financiers des deux collectivités, un premier fichier des métiers d’art vient d’être créé. Un pôle artisanal permanent devrait également voir le jour, dans le courant du second semestre 2005, dans la seconde longère de l’ancienne gare routière de Saint-Denis. Mais pour que cet artisanat devienne un secteur économique porteur de développement, garant de la pérennisation de notre tradition et des techniques artisanales locales, il est impératif que les filières de formation et d’apprentissage aux métiers d’art tendent vers des niveaux de qualifications supérieures.
C’est ce qu’Emmanuel Lemagnen, délégué départemental de la Société d’encouragement aux Métiers d’Art (SEMA), a souhaité une nouvelle fois démontrer. Pour le lancement des Journées nationales des Métiers d’Art, cet ébéniste de métier qui a délégué dernièrement la présidence du Fait-Main pour se consacrer pleinement à son mandat de conseiller régional, a convié vendredi une délégation d’officiels et de partenaires à découvrir les maillons de la chaîne de la filière artisanale dans les Hauts de Saint-Paul.

Fort engouement pour les métiers d’art

Depuis sa création en 1992, le Centre de formation pour adultes (CFA) métiers d’art a formé 1.000 apprentis aux métiers d’art. La délégation a pu découvrir, tour à tour, les différentes filières qui y sont enseignées : arts graphiques (imprimerie et sérigraphie), couture, fleuristerie, photographie, mais aussi arts appliqués, avec le travail de la pierre et du bois, la bijouterie, et dernièrement la création d’objets design et identitaires.
"Les métiers d’art offrent une diversité infinie et il ne nous est pas possible d’intervenir sur tous", justifie Richeville Melchior, directeur du CFA. Comme il n’est pas possible pour ce centre de formation d’accepter la quelque centaine de candidats (l’apprentissage est soutenu financièrement par la Région Réunion) qui se présentent pour chaque métier proposé. Les prédispositions créatives existent bel et bien sur notre territoire et le Bureau de création, situé dans l’enceinte du CFA, l’atteste. C’est là que sont expérimentées de nouvelles techniques, de nouveaux supports, que des matériaux oubliés sont réhabilités pour permettre aux personnes qui démarrent dans l’artisanat de se faire la main et d’explorer d’autres potentialités. Corne de cerf, peau de requin, œuf d’Autriche : ici rien ne se perd, tout se transforme pour créer de nouveaux débouchés touristiques et identitaires.
Développer l’apprentissage est une chose, mais comment insérer durablement ses nouvelles compétences ? Comment accéder à des niveaux de qualifications et de maîtrise artisanale supérieures, créer son entreprise pour à son tour, accueillir des apprentis, et développer économiquement des filières de haute qualité ?

Créatif et réactif

"On ne peut pas se mettre à son compte avec un CAP, cela demande d’autres bagages", constate Emmanuel Lemagnen. "Les beaux-arts assurent des formations de niveau bac+3, mais les métiers d’art n’ont pas d’institut d’un niveau normal à La Réunion, à la différence des autres régions." Un Institut régional des Métiers d’Art (IRMA) permettrait ainsi de capter les jeunes réunionnais en situation de réussite scolaire pour les interpeller sur des programmes de qualité, et de proposer aux apprentis du CFA de poursuivre leur cursus à l’IRMA pour ensuite créer leur propre travail.
Entre le début du primaire, où les enfants réunionnais s’avèrent très créatifs, et le collège, il y a, selon Emmanuel Lemagnen, une "stérilisation de toutes les formations". Avec une bonne sensibilisation à la matière, un bon niveau technique de formation, "on peut donner d’autres indicateurs de réussite et d’épanouissement humain à notre jeunesse. On a peu de matières premières, mais on peut optimiser notre matière grise. C’est aux jeunes diplômés de développer d’autres compétences dans la zone pour leur employabilité et pour permettre la rentabilité des produits."
Forte de sa jeunesse, de sa créativité, de son savoir-faire traditionnel, de sa situation géographique, La Réunion aurait donc tout à gagner en proposant de nouvelles filières de compétences aux métiers d’art, opportunité de développer de nouvelles orientations économiques dans le respect de notre identité.

Estéfany


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