Affaiblissement de l’euro, restructurations

Washington a tout à gagner de la crise

31 octobre 2008, par Manuel Marchal

Après la restructuration de la finance marquée par la création de la première banque du monde provoquée par la fusion de Bank of America et de Merryl Linch, c’est au tour de l’économie ’réelle’ des Etats-Unis d’être remodelée. C’est en effet dans ce pays que vient d’être créée la première compagnie aérienne du monde, Delta. La veille, l’avionneur Boeing et le fabricant d’aluminium Alcoa ont été les valeurs boursières les plus en hausse à Wall Street. Et l’euro ne retrouve pas la vigueur qu’il avait par rapport au dollar avant la crise. Tout concorde pour constater que si un pays a intérêt à ce que la crise se prolonge, ce sont les Etats-Unis.

Une flotte de 800 appareils, 75.000 salariés, 390 destinations dans le monde, un chiffre d’affaires de 35 milliards de dollars : le gouvernement américain a validé la création de la plus grande compagnie aérienne du monde. Dénommée Delta, elle est le résultat de la fusion de Delta Airlines et de Northwest Airlines autorisée mercredi par le gouvernement des Etats-Unis. La nouvelle compagnie devance une autre société américaine : American Airlines.
Cette restructuration dans le secteur aérien n’est pas sans rappeler celle qu’a connue celui de la finance aux Etats-Unis. La crise a permis la création de la plus grande banque du monde, issue de la fusion de Bank of America et de Merryl Linch.
Pendant ce temps, l’euro a légèrement rebondi. Il valait hier aux alentours de 1,30 dollar, soit beaucoup moins qu’avant le début de la crise. Jeudi, "Les Echos" ont publié un article (voir encadré) précisant que la chute de l’euro par rapport au dollar pourrait se prolonger, jusqu’à atteindre la parité de 1 euro pour 1 dollar.
Interrogé dans "Les Echos", un stratège changes de BNP Paribas note qu’une conséquence de la crise est le retour des capitaux aux Etats-Unis, et le renforcement du dollar en tant que valeur refuge si la croissance économique mondiale continue de diminuer.
Tous ces éléments expliquent pourquoi s’il y a bien un pays qui a intérêt à ce que la crise se prolonge, ce sont les Etats-Unis. Les restructurations en cours dans la finance et l’économie "réelle" soulignent que ce pays continue de placer ses pions afin de maintenir l’hégémonie américaine sur l’économie mondiale. De plus, Washington garde sous le coude un puissant fonds souverain de plus de 700 milliards de dollars, le "Plan Paulson".
Voilà la situation à un peu plus de deux semaines de la première réunion internationale sur la crise. Et devant cette situation, aucune plate-forme commune n’émerge pour tenter de faire contre poids aux décisions politiques du gouvernement américain. Cela rend d’autant plus difficile la concrétisation d’un accord susceptible de donner un coup d’arrêt à l’aggravation de la situation. Et cette aggravation a un résultat : le renforcement de l’hégémonie du dollar grâce à la chute de l’euro.

Manuel Marchal


Selon "Les Echos"

« L’euro pourrait valoir 1 dollar d’ici à quelques mois »

Selon Ian Stannard, stratège changes chez BNP Paribas, la monnaie unique risque d’atteindre prochainement un niveau de parité avec le billet vert. Voici un extrait de l’article des "Echos" de jeudi dernier qui publie cette information.

La politique monétaire et les plans de sauvetage mis en œuvre aux Etats-Unis peuvent-ils affaiblir le dollar ?

- Non, je ne crois pas. La Réserve fédérale américaine, qui se réunit mercredi, devrait réduire ses taux directeurs, de 0,5% probablement, mais cela ne modifiera pas l’environnement du dollar. Les autres banques centrales risquent en effet lui emboîter le pas, soit de manière coordonnée, soit chacune de son côté. Avec la crise, l’évolution du dollar n’est plus déterminée par la politique monétaire. Au contraire, un geste de la FED en faveur de l’économie offre plutôt un soutien à la devise. Par ailleurs, l’impact des plans de sauvetage des autorités américaines sur la fiscalité nationale est relatif si l’on regarde les initiatives prises ailleurs. Le niveau de la dette des Etats-Unis par rapport au PIB sera à peu près l’équivalent de celui de l’Europe. Il n’y a donc pas de raison de voir le billet vert sous pression.

Comment voyez-vous évoluer le couple euro-dollar dans les mois à venir ?

- Je pense qu’on peut prochainement atteindre une parité de 1 euro pour 1 dollar. A la fin de l’année, nous estimons que la monnaie unique devrait valoir 1,17 dollar avant de glisser à 1,07 au premier trimestre 2009. L’euro est pénalisé par des facteurs économiques et politiques : il est plus difficile de prendre des décisions face à la crise en Europe. D’autre part, les pays d’Europe centrale et de l’Est sont touchés de plein fouet. La crise du crédit va affecter durablement ces économies qui représentaient un réservoir de croissance pour la région. Enfin, le ralentissement de la Chine plaide encore pour une hausse du dollar. Les investissements à l’étranger vont se tarir et les capitaux revenir aux Etats-Unis. Face à une panne de croissance mondiale, le billet vert représente un refuge.

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