Elle, moins bien lotie que Lui

9 août 2008

Les femmes restent moins bien protégées contre les vicissitudes du marché du travail. Elles occupent plus de 82% des postes à temps partiel.

Pas l’once d’une atténuation en 2007 : sur le marché du travail, les femmes restent de loin la catégorie la plus discriminée. On savait déjà que pour trouver un emploi en France, mieux valait se prénommer Jean que Jeanne. L’INSEE nous le confirme dans son étude, au regard de l’année dernière.
Dernières embauchées, premières licenciées. « À tous les âges, il y a proportionnellement plus de chômeuses que de chômeurs, mais c’est entre vingt-cinq et quarante-neuf ans que les écarts sont les plus marqués (8,1% contre 6,6%) », affirment les auteurs de l’enquête, François Chevalier, Isabelle Macario-Rat et Anne Mansuy. Au total, sur les 2 millions 215.000 personnes qui se déclarent au chômage, 1 million 121.000 sont de sexe féminin. Mais des disparités plus évidentes apparaissent en fonction de la catégorie socioprofessionnelle. Ainsi, 16% des ouvrières n’ont pas d’emploi contre 9,5% des ouvriers, alors que dans les professions intermédiaires, les différences sont beaucoup moins importantes. Le niveau de diplôme n’y est malheureusement pas anodin : 22,7% des chômeuses ont arrêté leur parcours scolaire après un Brevet des collèges ou un CAP.
Or, pour celles qui arrivent à surmonter ce premier obstacle du mauvais sort des statistiques qu’est l’ANPE, les embûches sont encore nombreuses sur la route qui mène à un emploi stable et sécurisé, égal à leurs compères masculins. Tout d’abord car hommes et femmes n’occupent pas les mêmes postes. « Près de la moitié des femmes sont employées, contre seulement 13% des hommes ; (...) au sein des professions intermédiaires, les femmes sont plutôt infirmières, institutrices ou cadres B de l’administration, tandis que les hommes sont plutôt contremaîtres, agents de maîtrise ou techniciens », révèle l’étude de l’INSEE. Quant à la catégorie des cadres, les femmes restent encore sous-représentées : 13% d’entre elles ont un poste à responsabilité, contre 18% chez les hommes. Même dans les secteurs d’activité dits très « féminisés » que sont l’éducation, la santé et l’action sociale, les femmes se maintiennent à des postes de qualification intermédiaire.
Enfin, reste la plus emblématique des inégalités entre sexes dans le monde du travail : le temps partiel (très répandu parmi les employés). Plus de 82% des emplois à la durée hebdomadaire incomplète restent occupés par des femmes. Pourtant, seulement 29% d’entre elles souhaitent travailler plus (36% pour les hommes), selon l’INSEE. Même parmi les travailleuses de vingt-cinq à quarante-neuf ans, la proportion de femmes qui se déclarent en sous-emploi ne dépasserait pas 30,7%. Des pourcentages qui pourraient trouver une explication dans la modification du questionnaire de l’INSEE, dénoncée en juin par le collectif Autres Chiffres du chômage. « Les enquêteurs ne demandent plus au salarié s’il souhaite travailler plus, mais s’il aurait souhaité travailler plus la semaine dernière ». Comme les salariés ont organisé leur vie personnelle, en particulier la garde des enfants, en fonction du temps partiel, cette nouvelle formulation de la question induirait beaucoup plus de réponses négatives.

Christelle Chabaud


Trois ans d’acharnement contre les 35 heures

« Pour libérer la croissance et faire grandir les entreprises, je ne connais pas d’autres solutions que de travailler plus ». Xavier Bertrand, ministre du Travail. “Les Échos”, 28 mai 2008.

« L’idée la plus fausse en France, ça a été l’idée du partage du temps de travail. Le partage du temps de travail, c’est une erreur économique doublée d’un scandale social... La vérité, c’est que plus il y a de gens qui travaillent, plus on crée des richesses, plus il y a de croissance et plus il y a de travail pour tout le monde ». Nicolas Sarkozy, le 7 mai 2008, lors d’un déplacement dans une usine du côté d’Avignon.

« Quand on fait le comparatif international des heures travaillées, on s’aperçoit que la France est grosso modo 20% derrière les Espagnols, 27% derrière les Danois, 33% derrière les Britanniques... il ne restera pas grand-chose des 35 heures si le champion de l’UMP est élu ». François Fillon. “Le Parisien”, 21 octobre 2006.

« Aujourd’hui, grâce à la gauche, il existe une France des nantis de la RTT de toutes les professions qui bénéficient à la fois d’un travail qualifié, de la garantie de l’emploi et d’une rémunération élevée... ».
Jacques Marseille, professeur à Paris-I. “Le Figaro”, 2 août 2006.

« L’essentiel des différences avec les performances de nos partenaires s’explique par la moindre quantité de travail que nous fournissons ». Extrait du rapport Camdessus demandé par Nicolas Sarkozy. “La Dépêche”, 10 septembre 2004.

« Quel est le pays au monde qui s’est donné ces boulets aux pieds de payer 16 milliards d’euros définitivement chaque année pour qu’il y ait moins de travail ? ». Nicolas Sarkozy. “Le Figaro”, 1er juillet 2004.

« Plusieurs études montrent que le temps libre dégagé par les 35 heures a pu encourager la recrudescence de certains fléaux sociaux tel l’alcoolisme ou la violence ». Nicolas Baverez, essayiste, Institut Montaigne, 10 octobre 2003.

« Le choix du non-travail s’est traduit, dans notre pays, par de faibles gains de productivité, porteurs d’une croissance réduite au minimum ». Hervé Novelli, Proposition de résolution : commission d’enquête sur les conséquences des 35 heures pour l’économie et la société françaises.


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