La résolution des députés communistes français rejetée

Israël : l’Assemblée nationale rejette une résolution dénonçant un « régime d’apartheid »

5 mai 2023

La proposition de résolution condamnant l’institutionnalisation par Israël d’un régime d’apartheid à l’encontre du peuple palestinien, a été rejeté à 199 voix contre 71. Le texte avait reçu le soutien des députés insoumis et écologistes, mais il a été vivement critiqué par les macronistes, la droite et des élus socialistes.

La proposition de résolution tendait à condamner "l’instauration d’un régime d’apartheid par Israël à l’encontre du peuple palestinien, tant dans les territoires occupés (Cisjordanie, incluant Jérusalem‑Est, et Gaza) qu’en Israël et en appelle à son démantèlement immédiat".

Les députés ont indiqué que "tous les critères pour qualifier le régime d’apartheid mis en place par l’État d’Israël sont réunis". Ainsi, "Israël a mis en place un régime institutionnalisé d’oppression et de domination systématique par un seul groupe racial, et affirmé clairement son intention de maintenir un tel régime. Plusieurs ’actes inhumains’ sont couramment commis contre les Palestiniens dans les territoires occupés et en Israël".

Le texte a souligné les conclusions du rapport de Human Rights Watch, intitulé « Un seuil franchi : Les autorités israéliennes et les crimes d’apartheid et de persécution ». les auteurs de ce rapport ont indiqué : "en Israël et dans le Territoire palestinien occupé, les autorités israéliennes ont cherché à maximiser les terres disponibles pour les communautés juives et à regrouper la plupart des Palestiniens dans des zones à forte densité de population. Les autorités ont adopté des politiques visant à atténuer ce qu’elles ont ouvertement décrit comme une ’menace démographique’ posée par les Palestiniens".

Pour maintenir cette domination, les autorités israéliennes exercent une discrimination systématique à l’encontre des Palestiniens : discrimination institutionnelle, des répressions, des violations des droits fondamentaux, des actes inhumains (considéré comme crime d’apartheid), restrictions de mouvement draconiennes, conditions de vie difficiles dans certaines parties de la Cisjordanie, transfert forcé de milliers de Palestiniens hors de leurs foyers, refus du droit de résidence à des centaines de milliers de Palestiniens, suspension des droits civils fondamentaux de millions de Palestiniens, refus quasi catégorique des permis de construire, démolition de milliers d’habitats,

"Refuser à des millions de Palestiniens leurs droits fondamentaux, sans justification sécuritaire légitime et uniquement parce qu’ils sont palestiniens et non juifs, n’est pas simplement une question d’occupation abusive", avait déclaré Kenneth Roth, lors de la parution de ce rapport en 2021. "Ces politiques, qui accordent aux Israéliens juifs les mêmes droits et privilèges où qu’ils vivent et discriminent les Palestiniens à des degrés divers où qu’ils vivent, reflètent une volonté de privilégier un peuple au détriment d’un autre".

Les députés soutiennent toujours Israël

L’Assemblée nationale a largement rejeté ce 4 mai une proposition de résolution communiste condamnant "l’institutionnalisation par Israël d’un régime d’apartheid", malgré les appels d’une partie de la gauche à soutenir un texte "du côté du droit international".

En préambule, le député Jean-Paul Lecoq, auteur du texte, a insisté sur « l’attachement profond » de son groupe « à l’existence de l’État d’Israël », mais défendu le droit de critiquer une « dérive illibérale et coloniale de cet État » sans être taxé d’antisionisme ou d’antisémitisme.

Déposée dans le cadre de la journée réservée aux textes du groupe communiste, la proposition de résolution a fait l’objet de vives critiques dans le camp présidentiel, de la droite et de l’extrême droite, mais aussi d’élus socialistes, ainsi que du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif).

Le socialiste, Jérôme Guedj, a critiqué cette résolution "condamnant l’institutionnalisation par Israël d’un régime d’apartheid à l’encontre du peuple palestinien" à l’Assemblée nationale, à l’initiative des communistes et cosignée par 38 députés PCF et LFI de l’intergroupe.

"Ces 24 pages transpirent la détestation d’Israël", a dénoncé l’élu d’Essonne sur Twitter, après avoir pris connaissance du texte déposé par le communiste Jean-Paul Lecoq, aussi vice-président de la commission des affaires étrangères.

Jérôme Guedj dit pouvoir "défendre" la reconnaissance officielle de la Palestine, mais il s’oppose à la qualification d’apartheid ainsi qu’au boycott de leurs produits : "deux points inacceptables" soutenus par le projet. "Je ne comprends pas en quoi une telle mise au ban d’un État fait avancer d’un millimètre la paix", poursuit-il.

Parmi les signataires, figurent pourtant des membres du Parti Socialiste, dont Christine Pires-Beaune, les écologistes Sabrina Sebaihi et Aurélie Taché, le communiste et ancien candidat à la présidentielle Fabien Roussel, ou encore les Insoumis Adrien Quatennens, David Guiraud et Bénédicte Taurine.

"Il ne s’agit évidemment pas d’une initiative de la Nupes, jamais évoquée ni à fortiori décidée dans notre intergroupe. Des députés PC, LFI, EELV et PS l’ont signé individuellement", a assuré Jérôme Guedj, ajoutant que le PS ne suit "pas du tout ces positions".

« Que les raisons soient politiques, sécuritaires ou religieuses, la politique de colonisation est contraire à la légalité internationale », a de son côté indiqué Jean-Paul Lecoq, arguant que la situation des Palestiniens « relève juridiquement d’une situation d’apartheid ».

« C’est un régime institutionnalisé, gravé dans le marbre de la loi (...), ayant pour but l’oppression d’un groupe sur un autre (et) institutionnellement maintenu en place », a-t-il énuméré, invoquant « les centaines de résolutions de l’ONU, (...) de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe », et « les enquêtes et rapports publiés par des ONG ».

Cette résolution, qui n’aurait pas été contraignante, demandait à l’exécutif la reconnaissance de « l’État de Palestine », le dépôt à l’ONU d’une résolution pour imposer à Israël « un embargo strict sur l’armement », et l’abrogation de « circulaires interdisant l’appel au boycott des produits issus des colonies ».

La résolution a été rejetée par 199 voix contre 71. Les socialistes ont annoncé qu’ils présenteraient dans les prochains jours leur propre résolution sur le sujet.

La présidente du groupe Renaissance, Aurore Bergé, a dénoncé un « geste de détestation de l’État d’Israël », « d’offense » et « de diffamation », et fustigeant une « obsession » contre Israël. « La France est l’amie d’Israël », a martelé ensuite Laurence Boone, secrétaire d’État chargée de l’Europe, rejetant un terme « largement excessif et déplacé ».

« Aujourd’hui l’antisémitisme est principalement à gauche », a lancé le député Les Républicains, Meyer Habib, proche du Premier ministre israélien Benjamin Nétanyahou. « Ce sont des insultes profondes » et des « attaques diffamatoires qui nous éloignent d’un chemin de paix », a fustigé Elsa Faucillon (PCF) dans une fin de séance tendue. « L’antisémitisme nous le vomissons, nous le haïssons », a assuré l’insoumis Aymeric Caron.


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