Démographie

La France ne pourra pas se passer de travailleurs immigrés

Pour faire face à une future pénurie de compétences

29 octobre 2003

Un rapport à contre-courant. Le Conseil économique et social préconise dans un rapport publié lundi de relancer « une immigration maîtrisée ». Il s’agit, selon le conseil de prévoir, une future pénurie de main d’œuvre.

Alors que Nicolas Sarkozy aurait demandé aux préfets de doubler « le nombre total des reconduites à la frontière des étrangers en situation irrégulière », selon "Le Figaro" de lundi, le Conseil économique et social (CES) publie le même jour une étude défendant les atouts de l’immigration pour tenter de préserver la richesse économique de la France. L’assemblée consultative chargée de rendre des avis sur les sujets économiques et sociaux défend une « immigration maîtrisée et organisée ».
Le texte part d’un constat : « le risque de pénurie future de compétences ». Le moyen d’y remédier serait, selon le CES, d’ouvrir les voies légales d’entrée aux immigrants non européens ayant un « projet migratoire », qu’il s’agisse d’une recherche d’emploi ou de l’amélioration de leurs connaissances professionnelles. Actuellement, un étranger originaire d’un pays extérieur à l’Union européenne peut être autorisé à s’installer en France s’il a déjà une offre d’emploi. Dans les faits, cette possibilité est restreinte car il faut prouver qu’aucun Européen n’a postulé à l’emploi revendiqué.

Régularisation de tous les travailleurs

Pour faciliter ces candidatures, le CES préconise l’instauration d’un visa à durée définie pour les personnes à la recherche d’un emploi ou ayant un autre projet migratoire. Les emplois publics devraient être ouverts aux étrangers, et les exceptions rester limitées. Tout en recommandant de renforcer la lutte contre les réseaux d’immigration illégale, le rapport préconise la régularisation des travailleurs en situation irrégulière présents en France pour éviter le développement de l’économie "souterraine". Le CES s’appuie sur une étude de l’INSEE qui préconise une progression de 10.000 nouveaux migrants par an pour atteindre 150.000 en 2010, stabilisée ou non jusqu’en 2020 en fonction de l’évolution de la population active en France. Il recommande également de faciliter les naturalisations, dont la procédure d’acquisition est « actuellement longue, quelquefois dissuasive ». « Tout immigré ne cherche pas nécessairement à s’installer en France », souligne le rapport.

« Une vision dynamique de l’immigration »
L’Institut de recherches économiques et sociales (IRES) vient de publier, dans le cadre de sa "Chronique internationale", un numéro spécial sur "Mouvements et politiques migratoires, les enjeux sociaux". Les chercheurs ont étudié ces mouvements sur le Royaume-Uni, l’Irlande, l’Espagne, l’Allemagne, l’Autriche, la Suède et les Pays-Bas, sur la globalité de l’Union européenne, les États-Unis et le Canada, en se concentrant sur l’accueil des étrangers sur les marchés du travail. Ils constatent que, d’une manière générale, la main-d’œuvre étrangère se porte de préférence sur les pôles extrêmes du système des emplois : non qualifiés et faiblement rémunérés pour les uns, hautement qualifiés pour les autres. La politique migratoire relève, avant tout, de l’économique : « Stimuler le développement économique », écrit ainsi Adelheid Hege, responsable de "Chronique internationale", « se positionner favorablement dans la course à la compétition, assurer aux marchés du travail leur nécessaire flexibilité et mobilité sont des motifs forts et durables de l’appel à l’immigration, quel que soit par ailleurs le degré d’ouverture ou de fermeture des politiques ».
Dans sa contribution, le directeur de l’IRES, Jacky Fayolle, estime que, malgré la volonté des États européens de conserver la mainmise sur la politique d’immigration, la communautarisation est incontournable et porteuse de droits. « Elle remet de fait en cause la réduction de la citoyenneté à la nationalité et oblige à réfléchir à son contenu... Le développement et la mobilisation de la législation antidiscriminatoire constitue aujourd’hui la voie la plus assurée pour faire progresser les droits des immigrés et étrangers ». Quant au jugement sur l’intégration, il est sans surprise : « le travail conserve un rôle majeur dans les processus d’intégration des migrants au sein des sociétés d’accueil ». Avec cette remarque tout de même : « les canaux d’entrée en Europe devraient être élargis. Plus se ferme la forteresse, plus les activités illicites deviennent rentables, il faut avoir une vision dynamique de l’immigration », explique El Mouhoub Mouhoud, chercheur à l’Université Paris-XIII.

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