Exclus de la CMU

Le compte n’y est pas

Malgré l’engagement du candidat Chirac

27 octobre 2003

La mesure mise en œuvre depuis le 1er septembre par le gouvernement pour réintégrer les exclus de la CMU ne donne pas entièrement satisfaction. Mme Dupuis, présidente de l’ORIAPA, l’a fait savoir la semaine dernière. Une telle situation résulte de la décision de ne pas suivre la proposition faite par le candidat Chirac durant la campagne de la présidentielle. Ce dernier était en effet favorable à « une déduction fiscale ou un crédit d’impôt afin d’aide au paiement des cotisations aux mutuelles et aux régimes complémentaires pour les plus démunis ». Le gouvernement a, lui, opté, pour un relèvement du plafond des revenus donnant droit à la CMU.

Plus de 12.000 "gramounes" ont participé mercredi dernier au rassemblement organisé à leur intention par l’ORIAPA au Colosse. Dans son intervention, la présidente de l’organisation du troisième âge, Marie-France Dupuis, n’a pas caché sa déception devant les nouvelles modalités de la CMU complémentaire. « Ceux qui ont une allocation logement ne peuvent pas encore y prétendre. Et puis, il y a le forfait de 45 euros que l’on applique d’office pour ceux qui sont propriétaires d’une petite case et qui ne paient pas de loyer. Ce qui là-aussi, les fait dépasser le plafond et les exclut des mesures. Il y a encore fort à faire », a-t-elle déclaré selon "le Quotidien" qui, dans son édition du 23 octobre, rendait compte de la manifestation.
Un peu plus d’un mois après sa mise en application, le décret du 1er septembre relevant le plafond de la CMU outre-mer de 10,8% ne répond donc pas totalement à la demande des exclus de la CMU. Les propos tenus mercredi par la présidente de l’ORIAPA confirment plusieurs informations qui circulaient. Elles sont dans la droite ligne du contenu de cette lettre publiée dans la presse locale, où un lecteur exprimait sa déception en expliquant comment il n’avait pas pu faire jouer son droit à la couverture maladie universelle.
En septembre, le plafond de la CMU était relevé, sur le plan national, de 0,8%. Le gouvernement soumettait pour avis aux collectivités locales un projet de décret qui proposait un coup de pouce supplémentaire de 10,8% pour l’outre-mer.

Encore exclus

Dans un courrier adressé fin juillet au chef du gouvernement, Jean-Luc Poudroux écrivait : « compte tenu que le montant du minimum vieillesse contributif versé à La Réunion s’élève à 591,89 euros, auquel s’ajoute le forfait logement de 49,40 euros, soit un montant total de 641,29 euros qui est supérieur au nouveau plafond de la CMU complémentaire prévu par le projet de décret, les élus de la commission permanente ont demandé à ce que le plafond de la CMU complémentaire soit valorisé pour La Réunion et porté à 14% et non à 10,8% comme proposé ».
Dans notre île, le montant du minimum vieillesse varie entre 627,31 et 641,29 euros. Le relèvement de 10,8% du plafond de la CMU a été porté à 627,68 euros mensuels pour une personne seule. Les bénéficiaires du minimum vieillesse dont l’allocation se situe entre 627,68 et 641,29 euros restent exclus du dispositif.
Le Conseil général comme le Conseil régional refusèrent la proposition gouvernementale et demandèrent une augmentation de 14%. Ils ne furent pas suivis par Paris.
Des premières estimations ont alors été faites. Sur les 28.000 personnes qui perçoivent, à La Réunion, l’allocation supplémentaire du Fonds de solidarité vieillesse (elles sont 24.000), et l’allocation spécial vieillesse (elles sont 4.000), on évaluait à 11.000 le nombre d’allocataires qui devaient de nouveau bénéficier de la couverture de la CMU complémentaire. Par ailleurs on chiffrait à 1.500 les bénéficiaires de l’AAH (Allocation adulte handicapé) qui restaient exclus de la CMU.
Ainsi, une grande partie des exclus de la CMU restait des exclus. Une telle situation résulte d’une erreur d’aiguillage, c’est-à-dire du choix opéré par le gouvernement.

Alternatives

Pour réintégrer les exclus de la CMU, deux alternatives étaient possibles : soit augmenter le plafond des ressources pour permettre à ceux et celles qui ont des revenus supérieurs de passer en dessous et donc de bénéficier de la complémentaire ; soit aider les exclus à cotiser à une mutuelle. Cette dernière solution avait au moins un avantage, celui de responsabiliser les intéressés. C’est celle qui avait la préférence du candidat Chirac. Dans son programme électoral "Mon engagement pour l’outre-mer", il indiquait : « je veux améliorer et compléter le dispositif existant pour répondre à ce problème, par une déduction fiscale ou un crédit d’impôt afin d’aide au paiement des cotisations aux mutuelles et aux régimes complémentaires pour les plus démunis ». Cette mesure serait venue compléter l’aide à la mutualisation d’un montant de 7,62 euros par mois que la caisse de sécurité sociale avait mise en place pour ses assurés qui dépassaient de 20% au maximum le plafond de la CMU.
Pendant longtemps, on a cru que le gouvernement travaillait sur cette solution. « Une aide nationale doit se mettre en place pour (...) remplacer » l’aide à la mutualisation, expliquait Jean-Luc Arnould, directeur-adjoint de la CGSS de La Réunion au "JIR". Cette disposition aurait été plus avantageuse et aurait été destinée qu’aux personnes qui dépassent de 10% au plus le seuil de la CMU.
Le gouvernement a choisi de ne pas suivre le candidat Chirac et d’opter pour la seconde alternative, le relèvement du seuil des revenus. Mais il l’a fait à un niveau qui ne permet pas à tous les exclus d’être réintégrés. D’où les problèmes rencontrés depuis un mois et dont certains ont été énumérés la semaine dernière par Mme Dupuis.


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