Budget

Le gouvernement reprend d’un côté ce qu’il donne de l’autre

Baisse des impôts mais hausse des autres prix

16 septembre 2003

Super : le gouvernement confirme sa volonté de réduire de 3% de l’impôt sur le revenu. Mais... premièrement, cela ne concerne qu’un quart de la population réunionnaise, et encore, les foyers imposables ne seront pas concernés de façon équitable. En plus, ce ’cadeau’ fait à certains va être compensé par une sérieuse ponction faite... dans les poches de la totalité de la population, avec l’augmentation envisagée des taxes sur les carburants, ou une nouvelle taxation des médicaments...

L’INSEE a publié des tableaux de données statistiques régionales sur le thème : "Revenus Salaires". Ce document a été mis en ligne en avril 2003, même s’il étudie la structure du tissu fiscal de 1999. Les conclusions sont claires : à La Réunion, le pourcentage de foyers fiscaux imposés est de 22,5%, alors qu’en France, ce pourcentage est de 52,3%. Autrement dit, le pourcentage de foyers fiscaux non imposés est de 77,5% à La Réunion alors qu’il est de 47,7% en France.
La différence est intéressante en ce qui concerne le revenu moyen net annuel imposable : 27.959 euros pour La Réunion contre 22.691 euros en France. Mais la différence porte également sur le montant de l’impôt net moyen, à l’inverse cette fois, puisque ce montant est de 2.532 euros à La Réunion, contre 2.828 euros en France.
Notons que ce sont des revenus moyens, et qu’il faudrait, pour avoir une plus juste idée de la situation, avoir une approche plus précise : nombre et montant pour les revenus supérieurs à la moyenne, idem en ce qui concerne les revenus inférieurs.
Toujours est-il que la fiscalité est plus allégée ici : les revenus moyens sont supérieurs à la France mais le montant moyen de l’impôt sur le revenu y est inférieur. Cela fait partie d’un tout autre débat. Qui se posera immanquablement un jour ou l’autre.
Néanmoins, l’annonce d’une baisse de 3% des impôts a - et reste - un sujet très polémique en France. Et si cela n’est pas le cas à La Réunion, c’est probablement au vu des raisons précédemment évoquées.

Un cadeau de 3 euros

Mais ce "cadeau" n’est pas si impressionnant que ça, au vu des chiffres publiés par "L’Humanité", qui a demandé à un agent des impôts de réaliser une estimation sur la précédente baisse d’impôt. « Une personne au revenu net imposable de 60.000 euros a bénéficié d’une économie de 1.078 euros, alors qu’une personne au revenu net imposable de 8.080 euros ne réalise une économie que de... 3 euros ».
Comme l’écrit "Libération", en parlant de la France : « la moitié de la baisse de l’impôt sur le revenu reviendra, en effet, aux 6% des contribuables les plus fortunés. Les huit millions de bénéficiaires de la PPE recevront, eux... 62,5 euros par personne. L’injustice est aggravée par le crédit d’impôt pour personne à domicile, qui profite le plus à ceux qui paient 7.400 euros par an d’impôt ». Pour information : le coût de la baisse des impôts est estimé à 1,8 milliard d’euros.
Conclusion : la fracture sociale à La Réunion, au vu des mesures préconisées par le gouvernement va encore augmenter.

Ce qui va augmenter
Le cadeau fiscal offert aux plus favorisés va être payé par... tout le monde. En effet, selon "Libération", le gouvernement a des visées sur les carburants, sur le tabac, sur les médicaments, notamment. La manœuvre : augmenter les taxes sur ces produits pour payer le reste. Et tenter de combler le trou de la sécu.

Selon "Libération", « le gazole pourrait augmenter de 2,5 centimes par litre au 1er janvier », mesure qui aurait pour conséquence de faire rentrer quelques 925 millions d’euros dans les caisses de l’État.

Deuxième version de l’opération : l’augmentation ne concerne pas uniquement le gazole, mais tous les produits pétroliers, via la TIPP, d’où un gain de 500 millions d’euros (chiffre avancé par "Le Parisien").

Certes, la hausse à venir de la fiscalité sur les carburants ne concerne pas La Réunion au même titre que la France, puisque la taxation sur les produits pétroliers est différente chez nous. Mais l’on sait très bien qu’une hausse en France est généralement suivie d’une hausse à La Réunion.

Certains disent même que c’est pour pouvoir, par la suite, annoncer, à grands renforts médiatiques, une légère baisse sur ce même prix... Car n’oublions pas que nous sommes ici dans une situation de quasi monopole à La Réunion. Et que lorsque quelque chose change dans les prix, ce n’est pas souvent le taux de taxation mais le prix de vente du baril.

À ta santé !

Autres solutions rapportées par "Libération" : une nouvelle taxe sur les tabacs, pour la France métropolitaine de 15% (gain de 700 millions d’euros).

Dans la foulée, hausse de la taxe sur les alcools (gain : 200 à 250 millions d’euros de gain). Revalorisation du forfait hospitalier (gain : 300 et 400 millions). Taxe de 1 euro par feuille de soin (gain : 2,5 milliards d’euros). Taxe sur la boîte de médicament (gain : 1,3 milliard d’euros). Augmentation d’un point de la CSG (gain 9 milliards d’euros).

Sur toutes ces idées, le gouvernement est en train de travailler. On en saura beaucoup plus, au plus tard le 25 septembre, date de la présentation du projet de loi de finances pour 2004.

D’abord "non", puis "oui"
Toutes ces mesures encore en discussion. Mais l’idée est lancée. Sur la TIPP, elle l’est depuis mai, depuis que la question a été posée dans le cadre du débat parlementaire sur le financement des infrastructures de transport. Et si elle avait été alors critiquée par la majorité, notamment le député Pascal Clément (UMP-DL), président de la commission des lois, aujourd’hui, les arguments avancés changent.

On ne s’insurge plus contre la hausse : on tergiverse sur le taux. Et pinaille sur le délai. On accepte l’idée et on défend son point de vue sur les affectations des recettes. On ne crie plus au vol : on s’interroge sur la pertinence d’étendre la mesure aux particuliers et aux professionnels : les uns ? les autres ? les deux ? Comme quoi, même une idée qui est en premier lieu rejetée, y compris par des élus de la majorité présidentielle, peut être reprise, quelques mois plus tard. Et approuvée. Avant d’être appliquée.


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