France

Les graves carences du gouvernement montrées du doigt

« Jusqu’à 3.000 morts » dus à la canicule selon le ministre de la Santé

16 août 2003

Jeudi, à l’issue d’une réunion de crise, le gouvernement a incité les préfets à déclencher le "plan Blanc". Le ministre de la Santé a reconnu jeudi que « de 1500 à 3.000 décès » étaient « dus à la canicule » mais, a-t-il rassuré, « la situation est à peu près stabilisée ». Présidée par Jean-Pierre Raffarin, cette réunion de coordination sur les effets de la canicule en matière de santé réunissait le ministre de la Santé, Jean-François Mattéi, le secrétaire d’État aux personnes âgées, Hubert Falco, le président de l’Association des médecins urgentistes hospitaliers de France, Patrick Pelloux, le directeur du SAMU de Paris, Pierre Carli, ainsi que des représentants du ministère de la Défense, de l’Intérieur et les préfets d’Ile-de-France.
La vague de chaleur a provoqué la mort de milliers de personnes, surtout des personnes âgées, une « véritable épidémie », a reconnu le ministre de la Santé sur France Inter. Conséquence de la surmortalité : les morgues sont pleines. Pour faire face au nombre croissant de morts, à Longumeau et Vigneux, dans l’Essonne, tout comme à Vitry, dans le Val-de-Marne, des tentes réfrigérées ont été installées par les Pompes funèbres générales.

Inquiétante chronologie

Ces scènes de chaos sont à l’origine d’un débat sur la gestion de la crise par le gouvernement. Car dans les pays voisins de la France, le thermomètre a battu les mêmes records, mais les morts ont été beaucoup moins nombreux (voir encadré). Dans son édition d’hier, "Libération" rappelle que le 10 août dernier, « Patrick Pelloux, président de l’Association des médecins urgentistes hospitaliers d’Ile-de-France, qui évoque déjà une "hécatombe" avec "une cinquantaine de morts en quatre jours en région parisienne" ». Or, cette annonce n’a pas entraîné une réaction vigoureuse du gouvernement, on a plutôt le sentiment que l’on s’est trouvé face à un laissez-aller, avec des ministres qui ont du mal à quitter leurs lieux de vacances. Ce n’est que mercredi 13 août que le ministre de la Santé, accompagné du président de l’UMP Alain Juppé est allé voir ce qu’il se passait sur le terrain. Il a été alors violemment pris à partie par des personnels débordés, qui voient leurs patients tomber comme des mouches. « On a vraiment l’impression qu’il y a un décalage entre une réalité qu’on ne veut pas trop voir et la mise en oeuvre des moyens d’État », notait alors le chirurgien François Aubart, président de la Coordination médicale hospitalière, cité par "Libération". Ce n’est que mercredi soir que l’on a eu l’impression que le gouvernement avait la volonté de reprendre les choses en main, avec la mise en place de plans d’urgence coordonnés par les préfets. Mais il a fallu attendre jeudi, « alors que l’air devient plus respirable dans le nord de la France », ironise "Libération", pour la tenue d’une réunion de haut-niveau avec la présence de plusieurs ministre et du chef du gouvernement.

Gestion calamiteuse

Le gouvernement n’hésite pas à prétendre que la mise en place des 35 heures dans les hôpitaux sont à l’origine de cette hécatombe. Mais de nombreuses réactions démentent cette pathétique défense et rappellent l’irresponsabilité du gouvernement et le fait que ce phénomène de chaleur n’est pas conjoncturel mais structurel. Les professionnels de santé parlent d’« incurie du gouvernement dans une situation de crise ». Pour sa part, le premier secrétaire du PS demande la création d’une commission d’enquête parlementaire pour établir les responsabilités. La CGT estime que « si le gouvernement n’est évidemment pas responsable du temps qu’il fait, la population est en droit d’attendre de lui qu’il assure les conditions d’une qualité et d’une continuité des services publics, y compris dans des situations sortant de l’ordinaire ». De son côté, la députée européenne (UDF) Marielle de Sarnez pense, qu’« on a eu peur d’informer les gens. Sur les questions de prévention, on en est encore au Moyen Âge ».
« Au-delà de la controverse qu’elle génère, la canicule de 2003 ne doit pas rester sans leçons », indique "Le Monde", « les deux phénomènes majeurs que sont le vieillissement de la population et le réchauffement de la planète font que d’autres épisodes caniculaires surviendront qui, en toute hypothèse, imposeront des actions préventives de large échelle ».

Beaucoup moins de morts ailleurs en Europe
Alors qu’en France, la canicule a provoqué la mort de milliers de personnes, cela n’a pas été le cas dans les pays voisins touchés par une vague de chaleur aussi importante. Seule l’Italie a clairement affiché une surmortalité, mais moins importante que la France. Répondant aux critiques de la presse à ce sujet, le maire du Turin a signalé « que l’État venait juste de couper les fonds destinés à la prévention en faveur des personnes âgées ». C’est au Portugal que les températures les plus élevées d’Europe ont été relevées avec plus de 47 degrés. La durée de la canicule était également sans précédent. Si des incendies ont ravagé des forêts entières, le bilan humain reste largement inférieur à ce que connaît la France. En Belgique, le ministère de la santé publique estimait jeudi, qu’« il n’y a pas d’augmentation statistique significative du nombre de décès par rapport aux mois de juillet précédents ». Pour le mois en cours, les chiffres provisoires l’amènent à tirer le même constat. En Espagne, on comptabilise 45 morts des suites de la canicule. Les scènes vécues dans les hôpitaux français ne se sont pas produites dans ce pays où le climat est plus chaud qu’en France. En Grande-Bretagne, malgré le records historiques de chaleur, « les décès ont été essentiellement dus à des noyades », signale "le Monde" daté d’aujourd’hui. Et en Allemagne, malgré des températures supérieures à 40 degrés, aucune victime directe de la canicule n’est à signaler selon "Le Monde". Eu égards à la faiblesse relative des dégâts humains dans ces différents pays, l’attention est davantage tournée vers les conséquences économiques et environnementales de la canicule. En Allemagne par exemple, les centrales nucléaires ont été autorisées à déverser dans les rivières une eau plus chaude que d’habitude. En Espagne, on estime que la vague de chaleur va coûter 500 millions d’euros de perte aux agriculteurs.

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