France

Mobilisation pour sauver le droit à une retraite digne

Une manifestation prévue à la fin du mois prochain

14 avril 2003

L’heure de vérité approche pour le système des retraites en France. Ces derniers mois, le gouvernement se dépensait sans compter en efforts de communication, mêlant propos rassurants - il s’agirait de « sauver le système par répartition » - et démonstration de la prétendue nécessité de réduire les garanties actuelles : "Moins d’actifs, plus de retraités, comment on fait ?"
Désormais, il commence à lever le voile sur ses réelles intentions. Dans un premier texte, qui devrait servir de préambule au futur projet de loi, le ministre des Affaires sociales, François Fillon, a déjà précisé quels doivent être, selon lui, les « objectifs et les moyens de la réforme ». Plutôt vertement critiqué par les syndicats, ce document équivaut selon eux à une fin de non-recevoir pour plusieurs des revendications essentielles avancées, le 6 janvier, par toutes les centrales, alors unies.
Par exemple, le gouvernement proclame l’objectif consistant à « viser un haut niveau de retraites ». Les syndicats, eux, avaient demandé à la réforme de « viser un haut niveau de retraite en définissant et en garantissant un taux élevé de remplacement par rapport à l’ensemble de la rémunération ». François Fillon refuse de s’engager sur ce taux, pourtant important pour apporter une véritable garantie en termes de revenu aux futurs retraités. De même qu’il a, en toute logique, écarté l’éventualité d’un retour sur la réforme Balladur de 1993, laquelle, si elle est menée à son terme, abaissera le niveau des retraites du secteur privé de 20% d’ici à 2020.

L’intention gouvernementale se confirme à la lecture de l’objectif n°2 : « veiller à maintenir » le niveau de pension « en valeur réelle pour chacun tout au long de sa retraite ». En clair, il s’agit d’indexer la retraite sur les prix, et seulement sur eux. Jusqu’à la réforme Balladur, elle évoluait avec les salaires, disposition plus avantageuse car permettant de faire en sorte que les retraités, eux aussi, bénéficient de la croissance de la richesse nationale, assurant ainsi une solidarité concrète entre les générations. C’est d’ailleurs pourquoi la déclaration intersyndicale du 6 janvier exigeait que soient « garantis » non seulement « le pouvoir d’achat des retraites », mais aussi « leur niveau relatif par rapport aux rémunérations des actifs ».
Autre exemple, le texte rédigé par François Fillon affirme la volonté de « confirmer le droit au départ en retraite à l’âge de soixante ans ». En omettant sciemment une précision figurant dans la plate-forme syndicale : « à taux plein ». Et pour cause, puisqu’il envisage d’allonger la durée de cotisation requise pour avoir droit à ce taux plein. Quant aux mesures de justice revendiquées, comme le départ anticipé pour travaux pénibles ou pour carrières longues, elles sont laissées en suspens.

En réalité, la vérité du projet du gouvernement s’impose lorsque, au terme de l’examen d’un texte censé indiquer « les moyens de la réforme », il apparaît qu’aucun moyen nouveau n’est prévu. Cela, au motif de « préserver la compétitivité des entreprises ». Pas de ressources en plus, donc, pour la retraite, alors que le nombre de retraités va doubler en France ? Il ne reste alors d’autre solution qu’une amputation des droits actuels.
Devant cette remise en cause d’une conquête sociale, la CGT a décidé de proposer aux autres confédérations une « grande manifestation nationale, interprofessionnelle et centralisée à Paris, à la fin du mois de mai ».

Le gouvernement continue de consulter
Vendredi encore, les organisations syndicales se sont vues présenter des "pistes" de réformes pour les retraites, des "premières propositions". Au terme de plusieurs mois de "concertations", le bateau n’a guère avancé.
Les pistes qui devaient être présentées vendredi soir visaient notamment à tester les réactions syndicales et ne devaient être délivrées qu’oralement. Les concertations entre ministre et syndicats de la Fonction publique se poursuivant jusqu’au 15 avril, l’heure n’est pas venue d’annoncer le détail des réformes. Le ministre des Affaires sociales, François Fillon, devrait profiter de son passage dans l’émission "100 minutes pour convaincre" sur France 2 le 24 avril pour présenter son projet directement aux Français. Et comme l’a récemment indiqué Jean-Pierre Raffarin, le calendrier sera tenu, c’est le 7 mai que la réforme sera présentée en Conseil des ministres.

On ne dit mot donc, mais on en connaît déjà les contours, grâce à des fuites. Sauf surprise, la durée de cotisations des fonctionnaires devrait être ramenée à 40 années d’ici 2008 contre 37,5 ans aujourd’hui. Davantage de souplesse devrait être introduite dans le système. Ceux qui ayant déjà cotisé 40 ans voudront partir avant 60 ans le pourront, de même que ceux qui voudraient continuer ou bien cumuler la retraite et un travail à temps partiel. Le principe d’un pension minimale pour les petits salaires est théoriquement acquis.

Mais sur le reste, c’est flou. Le gouvernement donnera-t-il raison au MEDEF qui demande à ce que soit dès à présent inscrit un prochain allongement de la durée de cotisation pour le privé ? Quid de la méthode de calcul des pensions de fonctionnaires ? Pour le moment, le gouvernement consulte.

En mars, les prix ont augmenté de 0,5%
Les prix à la consommation en France ont progressé de 0,5% en mars par rapport à février et de 2,6% par rapport à mars 2002, selon les données provisoires publiées vendredi par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). Pour l’INSEE, cette hausse « est le résultat, à l’issue des soldes d’hiver, du renchérissement des prix de l’habillement et des chaussures et des autres produits manufacturés, moins accentué que l’an dernier après une période de soldes plus courte », auquel s’ajoute « la poursuite de la hausse des prix des produits pétroliers » et, « dans une moindre mesure, celle de l’alimentation et celle des services ». Sur un an en France, les produits pétroliers augmentent de 15,9%.
Deux fois plus de contrats précaires en dix ans
Le nombre de salariés en contrats temporaires (contrats à durée déterminée et intérim) a été multiplié par deux entre 1991 et 2002, selon une étude du ministère du Travail publiée mardi dernier. L’an dernier en France, 1,4 million de salariés étaient en contrat temporaire, dont 900.000 en CDD et 500.000 en intérim. Cet essor, observé en période de chômage élevé, « se poursuit même quand le chômage diminue », relève l’étude de la DARES (Direction des statistiques du ministère des Affaires sociales).

L’agriculture est, de loin, le secteur le plus utilisateur des contrats courts, principalement des CDD, en raison du caractère saisonnier de l’activité, indique la DARES. Le tertiaire a également fortement recours au CDD, particulièrement dans les activités récréatives, culturelles ou sportives où 28% des salariés sont sous ce type de contrat, tandis que les hôtels et les restaurants emploient 9% de CDD. L’industrie et la construction recourent, elles, trois fois plus à l’intérim que le tertiaire.


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